Chapitre 25

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Mes yeux s'ouvrent, s'affolent, regardent de tous côtés sans enregistrer d'information. Ma respiration s'accélère et le sang me bat aux tempes.

Puis petit à petit, ma vue s'aiguise, s'accorde à la faible luminosité de la pièce. Devant moi se trouve un grand ring ; autour, le matériel de sport a disparu. Le Centre d'Entraînement.
Une voix étouffée s'écrie, et je crois reconnaître la sonorité de mon nom. Ma tête pivote brusquement. Rafael. Un bâillon dans la bouche et des cordes qui lient ses mains à un poteau. J'essaye de l'appeler, mais moi aussi, on m'a bâillonnée et les liens me scient la peau. Je cherche les autres du regard. Je tombe sur Elisabeth, Kayla, Rachel, Angelo, Nathalie, Zarah, Aaron… Même M. Forestier !

Où est Joyce ?

La question s'efface de mon esprit : mes yeux s'écarquillent quand je croise un regard noisette, comme le mien, et un autre, bleu ciel, tous deux familiers. "Maman, Papa !" essayé-je de crier ; le chiffon qui retient ma langue laisse filtrer un son incompréhensible.

Ma mère me regarde avec une douceur mêlée d'inquiétude qui me coupe le souffle. Mon père se bat avec ses liens, comme s'il voulait se détacher pour se précipiter à ma rencontre. Les larmes montent, dévalent mes joues. Vous m'avez manqué… leur transmets-je en pensée. Mon paternel cesse de gesticuler et me lance un long regard. Toi aussi, ma chérie.

Je fouille à nouveau le Centre des yeux. Félix et Kenneth sont là ! Les deux Anciens semblent affaiblis, dans leur toge fripée et poussiéreuse… Félix me salue d'un signe de tête serein – mais je sens qu'intérieurement, il panique. Kenneth cache moins bien son anxiété, tressautant par moments.

Je remarque que les fenêtres ont été fermées ; seul un filet de lumière se précipite dans la pièce. Il fait donc jour, dehors…

Je tente de défaire mes liens, grognant sous l'effort. Mais rien.

Montrez-vous ! crié-je en pensée en fusillant les alentours du regard. Le Chef des Destructeurs est dans les parages, c'est sûr. Dissimulé par les ténèbres de la salle…

— Bonjour à tous.

Une voix grave. Masculine.

Tout le monde redresse brusquement la tête, dans l'attente de voir apparaître le Chef des Destructeurs. Mais il préfère rester dans l'ombre pour le moment… Mes poils se hérissent, je déglutis.

Je ne sais pas pourquoi, mais cette voix me semble… familière.

— Comment allez-vous ? Pas trop écorchés ? J'ai demandé aux Enchanteresses de rester raisonnables, mais… Qui sait ? Elles ont l'air de n'en faire qu'à leur tête, dit-il avec une pointe d'humour.

Je vais lui arracher les cordes vocales.

Mon sang bouillonne, brûle dans mes veines, chauffe mes joues. J'entends mes alliés grogner, ne pouvant pas produire grand-chose d'intelligible avec les bâillons qui enserrent leur mâchoire.

— J'ai jugé approprié de ne pas vous donner la parole tout de suite… Vous m'excuserez.

On dirait presque qu'il est sincère… Je ne savais pas qu'il pouvait me dégoûter encore plus…

— Mais j'imagine que vous n'attendez qu'une chose, n'est-ce pas ?

Je fusille l'ombre du regard. Abrège. Montre-nous ton visage, salaud.

Alors, sous nos yeux attentifs, avides de connaître l'identité de cet homme qui s'est joué de nous maintes fois et qui cherche à conquérir le monde, son visage paraît. Mon cœur, qui s'est mis à tambouriner dans ma poitrine, rate un battement.

Le Monde des Créateurs - Tome 1 : La Découverte [TERMINÉ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant