Chapitre 12

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  Le commissaire Laurence attend à côté du corps sans vie de la victime, son costume tâché sous le bras. Pas besoin d'être sorcier pour savoir qu'il n'est pas de bonne humeur. SA secrétaire lui a renversé exprès du café sur son costume, et il ne voit qu'une seule chose qui pourrait expliquer ce geste.

  Glissant revient dans la salle avec un journal qu'il tend à Laurence. Ce dernier le prend, voit qu'il s'agit de La Voix du Nord et lit les gros titres :

BRAQUAGE : UNE AFFAIRE PEU ORDINAIRE

- C'est ça que vous voulez me montrer ? demande-t-il au médecin légiste.

- Oui, et pour une bonne raison. Les braqueurs avaient utilisé des poivrières, et je ne parle de ce que vous avez sur la table pour épicer vos plats. Je parle des...

- ... armes à feu à canons tournants, oui je sais, Glissant. Et quel est le rapport avec notre meurtre, au juste ?

- Eh bien, il se trouve qu'on a utilisé une poivrière pour la tuer.

- Les deux crimes seraient donc lier ?

- C'est possible. En fait, ajouta Glissant, pourquoi est-ce que les braqueurs ont utilisé des poivrières ?

- Ils s'étaient déguisés en pirates, ces imbéciles. Ils pensaient que ça impressionnerait tout le monde. C'est leur chef, Jules Vosson, qui en a eu l'idée.

- Eh bien, ce n'est pas une lumière, votre type.

- Ça, vous pouvez le dire.

  Le visage du commissaire devient grave, comme s'il vient d'avoir une révélation. Glissant le remarque et lui demande :

- Ça va, Laurence ?

- Mais bien sûr... dit le commissaire comme pour lui-même.

  - J'ai demandé si ça va.

- Euh... Oui, oui, bien sûr. Et sinon.. Vous êtes sûr pour la distance de tir, Glissant ?

- Je peux même vous l'affirmer, commissaire.

- Cela ne veut donc dire qu'une seule chose : la victime a été tuée bien avant mon arrivée. Moi qui pensais que le meurtrier avait tiré avec un silencieux pendant que moi et Marlène parlions.

- En parlant de Marlène, vous ne trouvez pas qu'il y a eu un changement ? Je la trouve plus... plus contrariée.

- Ça, vous pouvez le dire. Regardez ce qu'elle a fait à mon costume.

- Vous savez, Marlène peut faire preuve de maladresse, alors...

- Elle ne l'a pas fait par maladresse, mais exprès.

- Houla... Vous avez dû faire quelque chose de grave pour la contrarier.

- Je pense plutôt que c'est Rasse qui est responsable de ça.

- Vous, vous ne le portez pas dans votre cœur. Tout comme Alice.

- Avril est venue ici ?

- Oui. Pourquoi ?

  À la tête de Laurence, on peut deviner ce qu'il pense à propos de cette manie qu'a Avril de fouiner partout. Il quitte précipitamment Glissant qui se met à contempler le cadavre et à lui dire :

- Dommage que nous ne nous sommes pas rencontrés plus tôt, nous deux. Non mais, quel gâchis...

  Le commissaire Laurence, lui, se dirige vers les cellules. Derrière les barreaux se trouvent une véritable bande, des hommes liés au trafic de bijoux et arrêtés par le commissaire. Ce dernier s'intéresse à une personne en particuliers : un homme de grande taille, mal rasé et avec les yeux qui louchent. Il est en train de parler avec un type à l'allure de serpent quand Laurence s'approche des barreaux et lui dit :

- J'ai à te parler, Vosson.

  Ledit Vosson se lève, s'approche de barreaux et dit :

- Tiens, mais c'est ce cher commissaire. Comment il va ?

- Pas de familiarité avec moi, Vosson. Je ne suis pas votre pote.

- Très bien, monsieur le commissaire. Alors, qu'est-ce que vous voulez de moi ?

- Je voudrais que tu me dises si vous n'aviez pas par hasard gardé des poivrières depuis votre braquage qui a mal tourné.

- Des poivrières ? Vous voulez cuisiner ou quoi ?

- Je parle des pistolets. Ceux que vous avez utilisé pour le braquage.

- Ah ça ! Oui, j'en ai gardé. Pourquoi ?

- Il se peut qu'on ait utilisé un de ces pistolets pour commettre un meurtre.

- Un meurtre ? Fichtre, c'est pas mon genre, ni celui de mes gaillards. Pas vrai, les gars ?

- Ouais !

- De toute façon, vous ne pouviez pas commettre ce crime : vous étiez ici. Mais quelqu'un a très bien pu se servir de vos armes.

- Comme qui ?

- Comme... un membre de lu reste de la bande du trafic de bijoux.

- Possible. D'ailleurs, maintenant que j'y pense...

  Vosson prend un air songeur. Intrigué, Laurence lui demande :

- Qu'y a-t-il ?

- Est-ce que je vais avoir un traitement de faveur si je vous balance quelques infos ?

- Vous n'étiez pas bavard, avant.

- Puisque je vous dis que j'ignore les véritables identités de celui qui nous a employé ! Alors, quelle est votre réponse à ma question ?

- Si c'est vrai, vous aurez droit à un traitement de faveur. Mais si c'est du pipeau, gare à vous.

- Voilà : dans la bande qui nous a employés pour le trafic, il y a - ou avait, je n'en sais rien - une femme qui se fait appeler Vipère.

- Et qui est Vipère ?

- À ce qu'on m'a fait comprendre, c'est elle qui se débarrasse des... importuns.

- Je voudrais bien qu'elle fasse la même chose pour moi, dit le commissaire avec un sourire en pensant à Alice Avril.

- Je n'ai jamais vu son visage, continue Vosson comme si de rien n'était, sauf une fois. Elle était en train de se maquiller devant un miroir quand je l'ai surprise. Heureusement pour moi qu'elle ne m'avait pas vu, sinon, je serais déjà à six pieds sous terre à l'heure qu'il est.

- Pouvez-vous me la décrire ?

- C'est que... je ne suis pas très doué pour décrire les visages. Mais ce dont je suis certain, c'est qu'elle a les cheveux noirs.

- Des cheveux noirs ? Eh bien, ça nous aide beaucoup. Sachant qu'il doit y avoir plus de cent femmes aux cheveux noirs.

  Le commissaire s'en va, tandis que Vosson lui demande :

- Et mon traitement de faveur ? J'y ai pas droit ? Eh !

LPM - Jeu, assassinée, et matchOù les histoires vivent. Découvrez maintenant