Chapitre 10

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  Alice Avril entre dans la salle d'autopsie où elle trouve Glissant en train de discuter au téléphone :

- Alors, c'est d'accord, poupée ? Bon, à ce soir.

  Le médecin-légiste raccroche et se retourne, voyant ainsi la journaliste.

- Ah, Avril.

- Salut.

- Tu viens chercher des infos. J'en ai de toutes fraîches à propos de notre cadavre. Je m'étonne que Laurence ne soit pas déjà là.

- L'inspecteur doit lui avoir fait perdre ses moyens.

- Tu parles de Rasse ? Il paraît qu'il est prétentieux comme pas deux.

- À qui le dis-tu.

- Bon, sinon, tout ce que j'ai trouvé de nouveau, c'est qu'on a tiré sur cette pauvre femme à très faible distance.

- Genre ?

- Environ... cinq centimètres.

- Elle et le meurtrier se seraient donc battus ?

- Possible. Ou alors on s'est juste approché d'elle et... pfuit.

- Ah ouais. Rien d'autre ?

- Non.

- Sûr ?

- Tu veux vérifier ? demanda Glissant en tendant un scalpel à la rousse.

- Non merci, sans façon. Je n'ai pas la passion des cadavres.

- Ça, on peut en être sûr. Allez, salut.

- Salut.

  Alors qu'Avril s'apprête à partir, Glissant l'interpelle :

- Dis, tu peux me rendre un service ?

- Vas-y.

- Est-ce que tu peux demander à ta copine Marlène quand elle sera libre. Tu sais, on pourrait boire un café ensemble...

- Oui, oui. J'y pense, hein.

- Merci quand même. Jolie tenue pour le tennis, au fait.

  Alice Avril quitte la pièce non sans soulagement. Les cadavres la mettent toujours mal à l'aise. Malheureusement pour elle, c'est elle qui en trouvait la plupart du temps. Alors qu'elle s'apprête à sortir, la journaliste voit Marlène discuter avec Rasse. Piquée par la curiosité, Avril s'approche discrètement sans se faire repérer pour écouter leur discussion. Voici ce qu'elle entend d'eux :

- Quand je pense que le commissaire me soupçonne d'un tel crime, dit la secrétaire blonde.

- Ne vous en faîtes pas, je vais prouver votre innocence. Mais pour cela, il faudra que vous me donnez des renseignements.

- Vous voulez que je fasse l'espionne ?

- Exact, Marlène.

- Vous savez, ça me gêne un peu de faire ça au commissaire, même s'il ose me soupçonner.

- Bon Dieu, Marlène ! Tout ce qu'il veut, c'est la gloire. Et il est prêt à vous mettre en prison pour ça.

- C'est horrible...

- Alors, on est d'accord ?

  Avril voit son amie serrer la main que lui tend le nouveau venu. La reporter rousse quitte les lieux à pas de loup. Alors qu'elle tourne la tête pour vérifier qu'elle ne s'est pas faite repérer, elle percute Laurence. Ce dernier ne perd pas de temps pour lui faire la morale :

- Dîtes donc, Avril, vous ne pouvez pas faire attention, avec vos gros sabots ?

- Eh bien, Laurence, il faudra vous acheter des lunettes, car je n'ai  pas de gros sabots, comme vous dîtes. En même temps, ce n'est pas étonnant que vous ne puissiez pas voir correctement : vous devenez vieux et donc gâteux. Vous rirez moins quand toutes les filles vont se moquer de vous.

- Mettez-vous devant le monde entier et on vous jettera aux ordures pour l'éternité.

- C'est vous l'ordure. Soupçonner Marlène d'un crime, c'est une vraie honte.

- Mais c'était il y a longtemps, ça.

- Vous n'aurez pas par hasard oublié que vous soupçonnez Marlène d'être la meurtrière dans cette affaire ?

  Laurence regarde son interlocutrice sans comprendre.

- Mais de quoi parlez-vous ? C'est à Rasse qu'il faut reprocher ça. C'est lui qui l'a accusé.

- Attendez. Vous êtes en train de me dire que ce qu'il a dit à Marlène, c'est du pipeau ?

- Qu'est-ce qu'il lui a dit ?

- Que vous la soupçonnez.

  Le commissaire reste deux secondes interdit, puis écarte la journaliste en disant comme pour lui-même :

- Il va me le payer...

  Marlène s'approche de lui, une tasse de café à la main. Alors qu'il est près d'elle, elle lui renverse sur sa tenue du café en faisant semblant d'avoir fait preuve de maladresse. Elle lui lance ensuite un regard froid et lui dit :

- Je vous souhaite une bonne journée, commissaire.

  Et elle s'en va, laissant le commissaire trempé devant des personnes ébahies par cet étrange spectacle.

LPM - Jeu, assassinée, et matchOù les histoires vivent. Découvrez maintenant