Ces regards étaient comme du venin. Le jus de ciguë que j'avalais chaque jour. Mes veines devenaient pourpres, brillaient sous ma peau pâle. Comme une drogue. J'en avais besoin.
Besoin car tu n'étais pas là pour m'en combler. Je les voulais tous. Sentiment de puissance, horrible et malsain : celui de plaire aux autres pour exister. Je les convoquais, je les attirais.
« Je veux être rassurée », je pensais. Parce que tes yeux n'étaient pas toujours là pour m'assurer que j'étais à toi.
Une lionne libérée d'une cage, je flairais le danger de tous les côtés. Séduite, par les mains de l'autre ; ces yeux brillants entre les lumières des néons du bar. Cette danse à laquelle il m'invitait, ce verre en trop ou pas assez. Invitations soudaine, assaillie d'une douce envie de m'échapper, de m'en aller. Entre ses bras, ses lèvres.
Tromper.
Non, le diable ne m'a pas tenté -jusqu'au bout-.
Je ne voulais pas être le grand méchant loup des contes.
Mais les pensées, alors ? J'ai rêvé que je te trompais. J'ai rêvé mille fois que j'étais avec l'autre. La culpabilité m'envahissait, et toi tu me haïssais en te levant parce que dans tes songes j'avais embrassé un autre.
Alors que moi, parfois, j'en rêvais.
Je comprends ta jalousie. Tes pétages de câble, ta peur maladive qu'on me prenne la main. J'étais égoïste quand je t'en voulais. « Je t'en supplie, fais pas le con », alors que je savais bien que l'autre beau gosse d'en face avait déjà mordu mon cœur.
Tu comprends mieux, maintenant, pourquoi je t'ai dit au revoir ? « T'es qu'une connasse », oui ; mais le suis-je encore en te disant que j'ai évité le pire ?
Non, je ne suis pas le grand-méchant loup des contes. J'ai tout fait pour le fusiller et l'enterrer au fond du bois.
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Le meurtre de Dionysos
Şiir" Je le fais pour toi " . Mais ça, il ne le comprend pas. L'ivresse l'a tué. Le meurtre de Dionysos est barbare et sanguinaire.