Treize

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Oh mon Dieu. Je l'ai entre mes mains, et je le regarde, complètement bouche bée.

Le journal. Un petit cahier, lourd, et très vieux. Un cahier à la couverture en cuir marron, fermé par une serrure et un simple lacet rajouté et noué de manière à ce qu'il soit difficilement défaisable. Il était là depuis tout ce temps. Et je ne sais pas quoi faire à part avoir les yeux fixés sur lui, le contemplant avec insistance. C'est comme si on l'avait laissé ici, exprès. Caché. En sécurité.

Plusieurs mots y sont inscrits sur le cuir du journal, écrits au stylo noir. « one and only ». Le seul et l'unique. « set me free ». Libère-moi. « let me live ». Laisse-moi vivre. « i beg you ». Je t'en supplie. Je fronce les sourcils en lisant soigneusement ses inscriptions à peine lisible, et un frisson me parcourt l'échine à chaque phrase. C'est effrayant–––voire inquiétant. Chacune d'entre elles est différente, mais a la même signification. Distraitement, je touche la boucle de la ceinture, puis la clé de mon collier. Et je ne pensais pas qu'à l'instant où j'aurais enfin ce journal sous la main, ce serait si difficile de m'imaginer en train de l'ouvrir. J'entends mon cœur battre dans ma poitrine, tant l'indécision me prend aux tripes. Est-ce que j'ai le droit ? Non ... Non, je ne peux pas faire ça. Un journal est bien trop personnel. C'est bien à cela que sert le préfixe « intime ». S'il m'appartenait, je refuserais qu'on le lise. Mais une voix à l'intérieur de moi, ne cesse de hurler, me disant que je ne l'ai pas trouvé pour rien. Car cette crevasse géante se trouvant derrière moi, est celle d'un endroit sûrement censé être secret.

Je me lève en titubant, et me rends près de mon lit dont le matelas est complètement retourné au sol, et que je remonte pour le remettre sur le sommelier. Je m'assieds, et continue d'ausculter l'apparence du journal–––toujours hésitant. Je n'arrive toujours pas à réaliser qu'il était vraiment là durant tout ce temps. Que suis-je censé faire maintenant ? Toutes les possibilités sont entre mes mains. L'ouvrir et le lire. Ou attendre. Ou ne jamais l'ouvrir et le mettre en sécurité où personne ne le trouverait. Je ne sais pas. Je suis partagé entre mon instinct et ma conscience. Je touche distraitement le nœud du lacet du journal. Je pourrais tirer sur l'une des ficelles. C'est facile. Puis insérer la clé dans le cadenas, la tourner, et enfin, il sera ouvert. Rien qu'à cette pensée, un frisson me parcourt l'échine et je relève instinctivement la tête, regardant nerveusement autour de moi. J'ignore quelle est cette sensation désagréable qui me surprend soudainement, mais je ne me sens pas bien. Dans ma chambre ... Bordel, c'est la première fois que je ne me sens pas en sécurité dans cette pièce. La seule pièce que je peux tolérer tranquille pour mon esprit. Et plus je regarde la porte de ma chambre, et plus j'ai l'impression ... de me sentir observer. Comme si quelqu'un se tenait derrière elle et m'observait à travers.

J'inspire profondément et déglutis, puis m'empare de mon iPhone, posé à mon côté. Et je ne sais pas vraiment qui je compte appeler. Je pense à Niall. Mais je me ravise aussitôt en prenant en compte le service que je lui ai demandé. Je ne devrais pas abuser. Puis une autre idée me vient à l'esprit. Zayn. Je compose son numéro de téléphone. Je ne sais pas vraiment pourquoi lui. Peut-être parce qu'il est celui qui m'a tendu une perche lorsqu'il m'a parlé du père de Niall ? Je l'ignore complètement, mais je sais que je pourrai compter sur lui. " Allô ? " Zayn répond enfin.

" Salut, Zayn ... " je réponds après un temps de réflexion. " Hum ... Je suis désolé de te déranger, et ... je sais qu'on ne se contacte pas souvent à part les fois où l'on se croise au lycée, mais ... est-ce que je peux te demander un petit service ? "

Il était hors de question que je passe la nuit chez moi. Ça m'inquiétait de laisser mes parents seuls dans cette maison, mais ... chaque fois que je regardais la cicatrice de mon entaille sur mon avant-bras, j'ai réalisé qu'en vérité, cette chose en avait après moi. Moi et personne d'autres. Et je ne comprends pas pourquoi malgré mes efforts pour le découvrir. Alors j'ai décidé de faire le mur. Parti avec mon sac de cours et une petite sacoche contenant quelques-unes de mes affaires – avec le journal –, je me suis rendu chez Zayn qui accepté de me laisser passer la nuit, chez lui.

Distress CallOù les histoires vivent. Découvrez maintenant