IX. Peur

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  Gênée par ce contact visuel et les paroles du professeur, la jeune Hermione détourna le regard. Elle avait un profond besoin de se confier à cet homme, mais elle se taisait, pensant qu'il se fichait éperdument de ce qu'elle pensait. Mais pour une fois, la brillante sorcière avait tort. Rogue était tout sauf indifférent à son sort, et son pouvoir de Legilimens lui avait permis à plusieurs reprises de s'infiltrer discrètement dans les pensées de Granger, et de connaître sa souffrance.

Ainsi, il savait qu'elle avait mal, très mal en ce qui concernait ses parents. Son geste de les oublietter avait été héroïque, et elle avait fait un très bon choix. Atroce choix, mais bon. Il savait également à quel point elle tentait de refouler sa tristesse, et avait même compris qu'elle cherchait à le rendre, lui, Severus Rogue, plus heureux. Et il en était infiniment reconnaissant, bien qu'il se gardait bien de le lui dire.

Selon lui, si elle avait décidé de cacher ses émotions, il se devait de respecter ce choix. Mais au fond de lui, une sorte de fureur brûlait, tant il désirait venir en aide à cette fille qui méritait bien plus que ce triste sort.

Oh, ce n'était pas qu'être professeur à Poudlard était une mauvaise chose, il avait même souvent trouvé une sorte de défouloir dans cette activité. Mais elle. Elle avait besoin de plus, après tant de péripéties vécues. Besoin d'aventures, besoin de ses inséparables amis, et besoin d'amour.

Mais elle n'avait que lui pour la soutenir, et cela le mettait hors de lui. Lui qui se définissait comme un homme froid, égoïste, un Mangemort déchu et lâche. Il n'était même pas capable de la réconforter ou de l'encourager, et n'avait pas perçu sa détresse lorsqu'il l'avait taquinée un peu fort ce matin-là. Il se détestait!

Quelle situation ironique et tragique à la fois. Chacun pensait savoir ce qui tracassait l'autre, mais aucun d'eux n'osait le lui dire, pensant qu'il était moins bien que ce qu'il n'était vraiment. Une insupportable Je-Sais-Tout et un Mangemort sans cœur.

Mais l'étaient-ils vraiment?

§§§


Cher Harry,

J'espère de tout mon cœur que tu vas bien, et que tu trouves à ta place dans ton métier d'Auror. Après l'adolescence que tu as menée, je ne pouvais pas te voir exercer une autre profession.

Ici, à Poudlard, tout va très vite. Minerva m'a demandé d'enseigner la Défense Contre les Forces du Mal, et j'espère que cette place maudite n'aura pas raison de moi! J'aime enseigner, mais les élèves sont.... difficiles. J'admets que vu ce que j'exigeais de mes propres résultats, j'ai toujours eu du mal à comprendre ceux qui bavardent, loupent les cours et ne font pas d'effort. Mais je n'ai pas à me plaindre, la plupart de mes élèves sont captivés par le cours qu'ils jugent utile, et Merlin sait qu'ils ont raison!

Je n'ai pas encore reçu de questions te concernant de leur part, mais ça ne saurait tarder! Je les entends souvent chuchoter des choses à ton sujet, et sur la guerre que tu as menée contre Voldemort.

A propos, je sais que c'est ridicule, mais ma main tremble encore lorsque j'écris son nom. C'est comme si j'avais de nouveau peur, alors que j'avais l'impression que tout cela était derrière moi depuis plusieurs années! Parfois, on dit qu'un simple événement ou une personne qui nous rappelle inconsciemment le passé peut nous rendre triste, effrayé ou agressif. Et quelqu'un est revenu, Harry....

Je ne sais pas comment tu prendras cette nouvelle, j'ignore même si tu es déjà au courant, mais je préfère t'en parler de toute façon. Le professeur Rogue n'est pas mort. Je sais, ça parait fou, et j'ai moi-même eu beaucoup de mal à le croire, même en le voyant de mes propres yeux.

Il se trouve que durant toutes les années durant lesquelles il était l'espion de Dumbledore, il était censé tuer et torturer les victimes de Tu-Sais-Qui pour passer pour un fidèle serviteur à ses yeux. Mais ce destin tragique ne lui convenait pas! Il a choisi de risquer sa vie chaque jour en tentant de fabriquer une potion qui simulait la mort, mais qui, bien dosée, faisait revivre la personne par la suite. Cette potion, il l'a fabriquée sans penser une seconde qu'elle lui serait personnellement utile. Mais lorsque cet affreux serpent l'a mordu, il a réussi à en avaler assez. Assez pour paraître mort pendant dix dans, et pour revenir à Poudlard comme s'il avait rajeuni.

Si elle est nouvelle pour toi, cette information va très certainement t'ébranler, et ne te culpabilise pas. Sache qu'il n'a aucune rancœur envers toi, même s'il a gardé son sale caractère. Mais il est devenu un collègue et.... un ami, quoi qu'il en pense.

Vous n'avez pas eu l'occasion de reparler de... ce que tu as vu dans la pensine, et je pense que si tu pouvais un jour passer à Poudlard, ne serait-ce que quelques heures pour que vous puissiez enfin vous dire ce que vous avez sur le cœur, ce serait positif.

Mais je sais que tout cela fait remonter à la surface de vieux souvenirs douloureux, et qu'en plus de cela, tu as beaucoup de travail. Mais sache que tu manques à tout le monde ici, et que chaque personne serait ravie de te revoir. Et je ne parle même pas de l'enthousiasme que manifesteraient mes élèves si je leur proposais de se battre en duel avec l'Élu!

Sincèrement Harry, tu me manques horriblement. Nous avons passé tant d'années côte à côte, et soudain, j'ai pour seule compagnie un maître des potions dont tu connais la sympathie et son hibou qui a le même genre de caractère! Je les apprécie.... ou plutôt je les aime bien, mais il y a un réel vide dans mon cœur. Je n'ai même plus mes parents....

Bien, je pense m'être assez plainte pour au moins un demi siècle! Excuse-moi, j'ai la plume facile ces temps-ci. C'est comme si tout ce que je ne peux pas dire à l'oral accepte de se déverser sur le parchemin. Merci d'être là, et de lire toutes ces lignes, Harry. Merci d'être toi.

Je t'embrasse,

Bonjour à Ronald si tu le vois!

Hermione

La belle sorcière posa la plume et se relu, se rendant compte en rougissant qu'elle s'était réellement livrée à lui. Mais elle se sentait beaucoup mieux. Elle avait presque l'impression que son ami était là, près d'elle.

Elle monta alors à la volière pour emprunter un hibou de l'école, quand Philibert se posa près d'elle en se dandinant. Ses grands yeux jaunes lui firent rapidement comprendre qu'il souhaitait de tout cœur que la sorcière lui donne la lettre à envoyer. Elle haussa les épaules. Au fond, Severus ne lui en voudrait certainement pas si elle lui empruntait le hibou, si?

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Merci d'avoir lu! A très bientôt pour un nouveau chapitre!

Qui Bene Amat.... [En Pause] Où les histoires vivent. Découvrez maintenant