Conte populaire russe, dont une version a été fixée par Léon Tolstoï sous le titre La Couleuvre, dans son recueil Contes et fables, publié en 1888.
Il était une fois un village comme les autres, dans le royaume de Mechtareka. De tous les jeunes gens de ce village, le plus beau était un orphelin que l'on avait prénommé Perce-Neige car il était arrivé au village sans aucun souvenir, avec seulement un bouquet de ces petites fleurs d'hiver à la main. Ce jeune homme n'avait aucune famille, ne se rappelait pas ce qui lui était arrivé avant le village, et il vivait chez une vieille dame acariâtre qui l'avait accueilli seulement parce qu'il pouvait l'aider à faire ses tâches ménagères. Il n'avait rien pour être heureux, et pourtant il était envié de tous car ainsi va le monde. Ses longs cheveux avaient la blondeur d'un pâle soleil de décembre, ses yeux étaient aussi verts que les jeunes sapins qui bordaient le village, il avait la beauté d'un ange et le sourire d'une fée.
Un jour qu'il accompagnait quelques jeunes gens à la rivière afin de puiser l'eau pour la cuisine, il se trouva pris dans leur conversation. Tout en plongeant leurs seaux dans les flots glacés, les garçons se mirent à évoquer leurs amours et parler de mariage. Comme toujours, Perce-Neige restait en retrait car il avait appris depuis longtemps qu'il n'était pas l'égal de ces garçons qui connaissaient leurs parents et leurs origines. Pourtant, ses compagnons se tournèrent vers lui pour l'interroger à son tour.
— Et toi ? demanda l'un d'eux d'un ton moqueur. As-tu une tendre amie ? Ou bien un fiancé ?
— Hélas, répondit-il humblement, je suis si pauvre que je ne puis prétendre à rien. Une couleuvre se présenterait à moi que je l'épouserai car je ne pourrais jamais trouver quelqu'un qui m'accepte aussi démuni que je le suis.
Sa réponse ne provoqua que des rires dédaigneux mais Perce-Neige ne s'en offusqua pas car il en avait l'habitude. Sans un mot, il se pencha pour remplir son seau, et c'est alors que sortit de la rivière une énorme couleuvre noire qui roula ses anneaux paresseux jusque sous les pieds des jeunes gens qui s'en effrayèrent.
Terrifiés, ils agrippèrent leurs seaux et s'enfuirent en courant, abandonnant Perce-Neige avec le serpent noir.
— Viens-tu en réponse à ce que j'ai dit ? demanda le jeune homme en maîtrisant sa peur.
— Peut-être bien, siffla le serpent. Tu penses ne rien posséder mais tu es au contraire bien plus riche que tes déplaisants compagnons car tu sais sourire avec bonté et douceur. Si tu veux bien de moi, je suis prêt à être ton tendre ami.
Sous le regard médusé de Perce-Neige, la couleuvre se mit à enfler et à se tordre sur l'herbe craquante de givre, jusqu'à ce qu'à la place apparaisse un prince magnifique, tout vêtu d'or et de noir.
— Je m'appelle Uzha, je suis le prince de ces eaux. Jour après jour je t'ai vu venir remplir ton seau à la rivière et subir la pénible compagnie de ces envieux qui se montrent méchants par jalousie, et il m'a été bien difficile de ne pas quitter mon royaume pour prendre ta défense en tant que chevalier servant. Permets-moi à présent de t'offrir mon amour et ma protection, car je t'aime de tout mon cœur.
Perce-Neige rougit, troublé par cette déclaration, et prit le temps de réfléchir à sa demande. Un autre que lui aurait accepté avec empressement l'affection et l'amour d'un aussi puissant personnage, surtout avec ce charmant visage, mais l'orphelin n'était pas comme les autres garçons.
— Votre aveu me touche, répondit-il gentiment. Cependant, je viens seulement de vous rencontrer et je ne sais pas si je puis vous accorder ma main dès à présent. Êtes-vous bien certain de vouloir de moi ? Comment puis-je savoir si je suis capable de vous rendre heureux ?
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