Le Château de Pictordu, conte écrit par George Sand dans le premier volume de son recueil Contes d'une grand'mère, paru en 1873.
Il était une fois, toujours en Hyverealm, une jeune fille qui tomba malade. L'apprenant, son père vint la quérir à la capitale pour l'emmener à la montagne y respirer de l'air pur. On était en hiver et la neige rendait les routes difficiles mais ce n'étaient que de faibles obstacles à l'inquiétude d'un père aimant. La belle Diane fut soustraite au mauvais climat de la ville et partit avec son père pour la petite propriété qu'ils possédaient à la montagne.
Le début du voyage se déroula sans incident, le père et la fille étaient ravis de se retrouver et échangeaient des nouvelles avec plaisir, quoique parfois entrecoupées des violentes quintes de toux qui agitaient Diane. En fin de journée, ils abordèrent le paysage tourmenté des premiers contreforts rocheux et, courageusement, leur carrosse s'y engagea. Hélas, la nuit tombante et la neige modifiaient tout, tant et si bien qu'ils s'égarèrent sur une route abandonnée. Cela faisait des dizaines d'années que plus personne ne l'avait empruntée et elle était toute pleine de cahots et de nids de poules qui firent si bien qu'une roue du carrosse se brisa. Le cocher descendit pour l'inspecter et les nouvelles qu'il apporta à ses passagers n'étaient pas bonnes.
— Hélas, Monsieur, je ne peux pas la réparer ce soir. Il vous faut trouver abri pour la nuit et demain nous y verrons plus clair. Un peu plus loin sur cette route se dresse la silhouette d'un grand bâtiment, vous y trouverez sans doute une protection contre le froid.
— Venez avec nous, déclara le père. Le carrosse ne risque plus rien ici et il serait stupide que vous attrapiez la mort en restant à côté.
Reconnaissant, le cocher attrapa sa lanterne tandis que le père aidait Diane à descendre, puis les trois s'en allèrent sur la route, de la neige jusqu'aux genoux, pour s'approcher du bâtiment que le cocher avait aperçu. Il s'agissait en réalité des ruines d'un vieux château et il ne restait plus guère qu'une tour debout. Des lieux se dégageait une impression de chagrin qui toucha profondément Diane, la poussant à se blottir davantage sous le grand manteau qui couvrait ses minces épaules. La porte de la tour n'étant pas verrouillée, les trois voyageurs purent y entrer sans peine et ils s'installèrent pour la nuit dans la première salle qu'ils trouvèrent. Puisqu'il y avait une cheminée, ils parvinrent à y faire un petit feu qui repoussa vaillamment les ténèbres et le froid.
— Je vais préparer le repas, annonça le cocher. Prenez le temps de vous installer correctement.
Le père utilisa le peu qu'il avait emporté pour préparer un semblant de couchage, sans remarquer que sa fille avait quitté la salle pour s'en aller explorer le château. Oh, elle n'alla pas bien loin, seulement à l'étage du dessus, mais ce qu'elle y trouva la troubla tant qu'elle y resta un long moment. Il y avait dans cette pièce la statue d'une femme d'une grande beauté, faite d'un marbre si délicat qu'il rayonnait du peu de lumière de lune qui parvenait à percer les nuages de neige. Cette femme avait un si joli visage que Diane la regarda longuement, essayant de comprendre pourquoi cette beauté la troublait tant. Elle ne redescendit que lorsqu'elle entendit son père l'appeler avec inquiétude, et elle ne parla pas de cette étrange découverte.
Au beau milieu de la nuit, alors que Diane dormait à poings fermés sous le manteau que son père avait déposée sur ses épaules, elle sentit un contact léger contre son visage qui la tira du sommeil. Il lui fallut cligner des yeux plusieurs fois avant de réaliser que la splendide jeune femme penchée sur elle n'était seulement que le fantôme de la statue qu'elle avait aperçue.
— Qui êtes-vous ? chuchota Diane.
— La Dame du Château. Viens, viens avec moi...
Sans un bruit, la jeune fille se leva et suivit le spectre couleur de lune. Quittant la pièce où dormaient le père et le cocher, elles gagnèrent l'escalier que Diane avait monté un peu plus tôt. Seulement, au lieu des gravats et des ruines, les marches étaient couvertes d'un tapis chatoyant et des torchères brûlaient gaiement aux murs.
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Contes pour attendre Noël
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