La princesse au petit pois, conte écrit par Hans Christian Andersen en 1835.
Il était une fois en Hyverealm, un vagabond orphelin qui était connu de par le pays sous le nom de Vif-comme-le-vent. Personne ne savait d'où il venait — lui-même l'ignorait — mais tout le monde avait l'habitude de voir passer sa longue silhouette encapuchonnée sur les chemins. On supposait qu'il avait vécu plus d'une vingtaine de printemps, sans trop le savoir exactement, et on le tenait pour l'un des garçons les plus costauds du pays. D'ordinaire il se louait à la journée pour les travaux des champs avant de repartir à l'aventure, son salaire dans la poche, un bout de pain dans l'autre. Son surnom, il le devait à son agilité dans de nombreux domaines, ainsi qu'à la manière qu'il avait de changer d'endroit jour après jour sans jamais s'arrêter, comme le vent.
Vif-comme-le-vent n'était pas un garçon malheureux, bien au contraire ! Il se satisfaisait de sa vie de voyage et ne s'imaginait pas s'arrêter un jour quelque part, parce qu'il n'avait ni origine, ni but. Il allait là où ses pas le portaient et pensait qu'il continuerait ainsi jusqu'à sa mort. Il ne se sentait pas spécialement seul, puisqu'il avait des amis dans chaque village, des gens qu'il avait connus l'an passé, ou bien celui d'avant, et il était toujours très bien reçu. En bref, c'était un jeune homme simple, qui était content de vivre et ne demandait pas grand-chose. Il avait beaucoup d'amants mais peu d'amoureux — il ne restait jamais assez longtemps pour que quelques regards appuyés et deux ou trois nuits de tendresse ne puissent se transformer en quelque chose de plus solide. Et, toujours, il avançait sur les chemins en chantant gaiement.
Régulièrement, ses pas le ramenaient jusqu'au château d'un très vieux comte qui s'était illustré autrefois en se battant aux côtés du roi, et qui avait reçu de nombreuses distinctions. Ce comte était un homme bon, qui veillait sur ses sujets, et il n'avait comme seul souvenir de sa défunte épouse que le fils qu'elle lui avait donné. Depuis son plus jeune âge, Eldric avait sillonné le comté aux côtés de son père pour apprendre à connaître les gens qui vivaient sur leurs terres et pouvoir ainsi les servir et les protéger au mieux de ses capacités. Tout le monde l'aimait et chacun était fier et heureux de se dire qu'un jeune homme aussi sage, brave et bon que celui-ci serait un jour comte à la suite de son père.
Fatalement, il fallut que Vif-comme-le-vent et Eldric se rencontrent, puisqu'ils parcouraient tous les deux le pays en long, en large et en travers. La première fois que leurs pas se croisèrent, ils venaient chacun d'un côté de la route et se trouvèrent au même moment à traverser une forêt à la suite d'un orage assez violent. Le fils du comte chevauchait sa jument placide, tandis que le vagabond marchait de bonne allure, mais ils se trouvèrent tous les deux arrêtés par un arbre couché en travers de la route, qui avait immobilisé un riche carrosse. Le cocher et deux valets de pieds étaient en train de chercher un moyen de relever l'obstacle, sans pour autant y parvenir, et ils étaient déjà couverts de boue.
— Un souci, voyageurs ? demanda Vif-comme-le-vent en arrivant à leur hauteur.
— Nous devons nous rendre au plus vite à la capitale, expliqua le cocher, mais cet arbre nous bloque la route et la crue a emporté le pont le plus proche.
— Laissez-moi vous aider, on ira plus vite à quatre.
Le vagabond laissa tomber son baluchon dans l'herbe humide et relevait ses manches lorsque Eldric arriva à son tour. En voyant la situation, il ne posa pas la moindre question mais sauta à bas de son cheval, retira son manteau pour le jeter en travers de la selle, et s'approcha pour aider les quatre hommes présents à déplacer l'arbre abattu.
A eux tous, ils parvinrent à décaler l'obstacle suffisamment pour dégager la route et que le carrosse puisse passer. Ils se redressaient, couverts de boue et de feuilles, lorsqu'une tête passa par la fenêtre de la voiture et qu'une voix impatiente s'éleva.
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