CHAPITRE 1

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"La vie nous donne des centaines de raisons de pleurer, pourquoi ne pas lui donner des centaines de       raisons de sourire?"

Je me suis toujours dit que toutes sociétés anciennes comme modernes étaient partagées en deux catégories bien distinctes. Les salauds d'un côté, les naïfs de l'autre. Il n'y a pas, il n'y a jamais eu et il n'y aura certainement pas de juste milieu. Par exemple, mon beau-père est un salaud, mon père était un beau salaud et ma tante est probablement la reine des salopes. Mon frère pour l'instant ne sait toujours pas dans quelle catégorie se ranger. Seules moi et ma mère semblions avoir tous les symptômes de la naïveté aiguë. Notamment moi.

Moi, la naïve car je me pliais aux règles et bons vouloir des salauds sans me plaindre, la faible et la soumise car je ne tentais pas de me révolter, le boulet car j'avais cette impression d'être un poids inutile. Voilà comment je me voyais, comment je me faisais l'image du monde à cet instant alors que je me trouvais dans cette chambre d'hôpital à la regarder dormir, ça faisait des jours qu'elle dormait, et d'après les médecins elle n'était pas prête de se réveiller.

- Cayla, les visites sont terminées, on doit y aller.

Elle, c'est Rebecca, ma tante, la salope. Le fait que ma mère se retrouve inconsciente sur ce lit d'hôpital m'avait obligé à devoir loger chez elle le temps que tout rentre dans l'ordre, mais mettons-nous d'accord sur un point, les choses n'ont jamais été en ordre dans mon monde.

J'ai seulement lancé un dernier regard à ma mère avant de sortir de la chambre. Les lumières s'éteignaient peu à peu et les couloirs étaient pratiquement vides. De l'ascenseur jusqu'au parking souterrain aucun mot n'avait été échangé, seuls les claquements de ses talons aiguilles contre le sol semblaient faire la conversation.

- Écoute Cayla, je ne suis pas comme Hélène, je n'ai pas cet instinct maternelle, moi les gosses c'est pas mon truc, dit Rebecca lorsque je fus assise sur le siège passager. Alors j'espère que je saurai gérer la situation, et puis tu es grande, à dix-sept ans on a plus besoin d'avoir quelqu'un qui s'occupe de nous n'est-ce pas?

Elle venait clairement de dire que ce n'était même pas la peine que je compte sur elle. Voilà pourquoi je la déteste, elle n'a jamais vraiment aimé ma mère malgré le fait qu'elles soient demi-sœurs par alliance. Rebecca était la cadette et avait toujours pris un malin plaisir à se servir de ma mère comme en ce moment même, elle se fout que sa sœur soit dans le coma et n'a jamais eu envie de m'accueillir moi et mon frère chez elle. Mais elle savait parfaitement que si elle avait la gentillesse de nous aider, ma mère le lui rendrait bien. J'aurai pu dire non, j'aurai peut-être dû dire non mais je n'avais pas osé, je n'avais pas voulu me retrouver dans une famille d'accueil avec des personnes que je ne connaissais pas, j'en avais déjà fait l'expérience une fois dans ma vie et je ne voulais plus que cela se reproduise.

- Je te comprends et ne t'inquiète pas trop, j'essaierai de ne pas trop t'envahir, répondis-je en lui souriant.

Le sourire. Je suis certaine qu'avec les pensées sombres et pessimistes que je dévoile, beaucoup de personnes ne m'auraient pas imaginé sourire à cet instant. C'est ma mère qui me l'a toujours conseillé: "Même dans les moments les plus sombres de ta vie, même lorsque tu tomberas, gardes toujours ce sourire sur ton visage, car si quelqu'un découvre ce qu'il y a en-dessous il pourra mieux t'achever." J'ai toujours été une personne souriante, m'attachant aux autres, sensible et surtout naïve. Mais depuis le début de cette journée je me demandais si je n'avais pas fait fausse-route durant tout ce temps.

- Comment ça marche pour le lycée? Je te dépose ou tu y vas à pied ?
- Je prendrai le métro, c'est pas très loin, me contentai-je de répondre.
- Mais si tu veux Justin pourra te déposer demain. On verra ça une fois à la maison.

The Power Of AttractionOù les histoires vivent. Découvrez maintenant