Histoire 8 : Inconnue à la porte

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Ce soir, ma fille et moi sommes installés devant la télé pour regarder une bonne série. Les pizzas sont chaude, la télévision est prête, c'est vendredi soir et demain on ne travaille pas... Bref, une soirée de rêve. Je vis seule avec elle depuis que ma femme m'a quitté pour partir dans un autre monde. Un accident bête, mais mortel. Les dernières paroles qu'elle a prononcée avant de mourir, allongé dans la voiture retourné pendant que j'essayais de l'aider à sortir, c'est :

- Prends bien soin de notre fille.

Juste après cette phrase, son cœur s'est arrêté. Alors j'ai promis, et Cassandra est devenu ma raison de vivre, mon support pour ne pas devenir une loque endeuillé. Alors que je m'apprête à appuyer sur le bouton play de la manette, la sonnerie de la porte d'entrée retentit. Cassandra râle du haut de ses huit ans.

- Attends-moi là, je vais ouvrir, dis-je en me levant péniblement.

Je marche jusqu'à l'entrée et ouvre la porte. Un homme en grand manteau gris se tient debout. Il piétine sur place, la mine torturé. Je ne le connais absolument pas.

- Oui ? je demande, un peu interloqué.

- Je suis désolé de vous déranger, mais est-ce que je pourrais vous emprunter vos toilettes ? J'ai une envie pressante depuis une heure et j'ai encore une moitié de mon chemin à faire.

Surpris, je tressaille en analysant sa requête des plus... inattendues.

- Vous rentrez chez vous à pied ?

Il soupire et baissa la tête avec lourdeur.

- Oui, ma voiture est en panne.

Il me regarde avec des yeux implorants. Pour le coup, je n'aurais jamais pensé à ça. Si j'avais su qu'un jour un homme sonnerait à ma porte pour me demander d'aller aux toilettes, je crois bien que j'aurais éclaté de rire. Mais devant sa tête suppliante, je ne peux qu'accepter et me pousse pour le laisser entrer.

- Merci infiniment, dit-il en rentrant.

Dehors, il pleut à verse et il est trempé. Son manteau dégoulinant trempe mon carrelage. Je lui propose de le suspendre au porte manteau pendant qu'il va aux toilettes. Mais à ma grande surprise, il refuse.

- Je ne veux pas vous embêtez, je repartirais aussitôt de toute façon.

- Mais si, j'insiste. Vous ne préférez pas attendre ici que la pluie se calme avant de repartir ? Il me semble qu'un bus passe non loin de là, dans une petite demi-heure surement.

Je le vois hésiter, se balancer d'un pied sur l'autre pendant qu'il réfléchit puis il accepte.

- Bon, c'est d'accord.

Il retire son manteau et me le tends. Un drôle de sourire se dessine sur son visage pendant qu'il se dirige vers les toilettes que je lui ai indiqué. J'ai sûrement rêvé. Cassandra vient me demander qui est venu et je lui explique la situation en lui caressant les cheveux. Quand elle comprend qu'il faudra attendre encore une demi-heure pour commencer la soirée, son premier réflexe est de protester mais finalement elle se calme.

- Attends-moi dans le salon ma puce, je reviens bientôt.

L'homme n'est toujours pas ressortit des toilettes. En attendant qu'il revienne, je me dirige vers la cuisine pour un prendre un couteau. Les pizzas ne vont pas se couper toute seule après tout. Mon pied fait un bruit étrange en se posant et je vois une flaque d'eau légèrement rouge s'étendre dessous. Elle semble provenir du manteau de l'inconnue. Bizarre. Pourquoi l'eau de la pluie est devenue rouge ? Je décide de n'y prêter pas attention et entre dans la cuisine. Par la fenêtre, je remarque qu'il pleut toujours autant. Je tends la main vers l'étui du couteau de cuisine que j'utilise tout le temps... et mon poing se referme dans le vide. L'étui est vide, le couteau disparue. J'étais pourtant sûr de l'avoir laissé ici, je me rappelle n'avoir pu couper la pizza. Mais alors où est-il ? Soudain, la radio que j'avais laissé allumé par mégarde commence à crachouiller plus fort.

Flash spécial : Un évadé de la prison de la ville se promène en toute liberté ! Je répète : Un évadé de la prison national se promène en toute liberté ! On le soupçonne d'avoir déjà assassiné deux personnes, c'est un tueur extrêmement dangereux qui prend plaisir à garder les doigts de ses victimes dans son manteau.

Il ne m'en faut pas plus pour qu'un grand frisson de peur me parcourt le dos. L'inconnu. La prison n'est pas très loin d'ici. Je me tourne vers la porte pour courir en direction de l'entrée, pas question de rester ici plus longtemps. L'eau rougeâtre, le couteau disparu, l'excuse pour entrer dans ma maison... Tout s'explique, se met en place dans ma tête. Mais une ombre d'homme apparaît devant, un objet long dans la main. Le couteau de pizza. Je me retourne et cours vers la fenêtre. Heureusement pour moi, elle n'est pas dur à ouvrir et je la fais coulisser sans problème. La pluie me mouille le visage mais je m'en fiche, je viens d'échapper à un tueur. Mon cœur bat à cents à l'heure, sans pouvoir s'arrêter. J'ai du mal à respirer mais je cours tout de même vers la rue pour trouver refuge chez quelqu'un. 

Ce n'est que quand le cri d'une fillette retentit de ma maison que je comprend que j'ai oublié Cassandra.

Je n'ai pas tenu la promesse faite à ma femme.

Je ne l'ai pas protégé.

Le Recueil d'Histoire d'Horreur...Où les histoires vivent. Découvrez maintenant