chapitre 14

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La Lunard commença par les salles adjacentes au hall, pour la plupart noircies par les flammes.

Il y restait peu de mobilier, la majeure partie n'ayant pas survécue à la catastrophe, et les rescapés menaçaient de se transformer en poussière. Elle ne connaissait pas la montagne. N'avait aucune idée de son agencement, ni sa profondeur. Elle savait encore moins où un roi nain pouvait bien garder les gemmes volées d'un roi elfe. La rôdeuse avançait lentement. Malgré l'entrain qu'elle pouvait y mettre, examiner chaque salle, retourner tous les coffrets d'or et d'argents des nains lui prenait un temps fou. Gaviria avait arrêté de compter les minutes, et avait perdue toute notion du temps. Il n'y avait aucune fenêtre, aucune ouverture, rien ne donnait sur l'extérieur. La seule lueur ambiante devait provenir d'une crevasse, ou d'une paroi fissurée. Celle-ci faisait aussi attention aux pierres se trouvant dans les coffres et tiroirs de certains ateliers. Plusieurs fois ses iris rouges avaient croisé l'éclat vert de l'émeraude, ce qui n'était pas pour l'aider.

Après avoir fait toutes les salles se trouvant sur la gauche du hall, la rôdeuse décida de ne pas s'attarder au milieu des colonnes. Sur la droite se trouvait le même genre de pièce : de grandes tables, utilisées pour les anciens banquets. Il y avait également une grande armurerie non loin de l'entrée, recouverte par la poussière et la vieillesse. 

Aussi sombre que le royaume apparaissait, une étrange atmosphère y régnait. La visiteuse s'attendait à s'y sentir oppresser, de sentir la malveillance du dragon qui avait couvé Erebor pendant des années durant. Et pourtant, une sorte de nostalgie enveloppait chaque recoin de la montagne. Se mélangeant à la tristesse, Gaviria avait l'impression de voir des scènes de la vie quotidienne d'un château. Elle pouvait presque imaginer les nains et naines, attablés aux banquets calcinés, mâchant et mangeant joyeusement. Le pic s'était comme éteint brusquement. Tout était resté en état dans lequel le peuple l'avait laissé. Le temps avait bien entendu forgé sa trace, rongeant par endroit de ses crocs acérés le métal et pourrissant le bois.

La jeune femme traversa le sol lisse de la salle, et descendit dans les salles inférieures. Mais alors qu'elle descendait d'immenses marches polies, elle vit une torche. 

Là, au milieu de l'obscurité contre un mur, un brasier brûlait vivement au bout du bois. La Lunard dégaina son arme, et ralentit sa marche. L'escalier était étroit, et n'en finissait plus. Les torches se suivaient, toutes récemment allumées. La chaleur se faisait sentir, tandis qu'elle pouvait également observer des traces de boues sur le sol. 

L'escalier finit par déboucher dans un grand couloir, aux proportions toutes aussi gigantesques. Au bout du corridor, elle pouvait apercevoir une lueur jaunâtre. Un éclat brillant dépassant toute mesure, parsemé de rouge, de vert, de bleu et de violet. Un tapis d'or recouvrait le sol. Gaviria déduisit qu'il devait s'agir du trésor. Elle se souvint alors des nains mentionnés par le pêcheur Barde, une petite troupe qui avait pénétré dans Erebor.

Elle qui n'avait jamais réellement discuté avec les nains, connaissait d'ores et déjà leur farouche ténacité en ce qui concernait les trésors. Ils étaient avides, protecteurs, et ne laisseraient jamais un étranger comme elle s'en approcher. Elle avança alors doucement, guettant à droite et à gauche le moindre mouvement. Non loin en face, l'escalier continuait, pour s'enfoncer encore plus dans les entrailles de la montagne. Lorsque la rôdeuse s'avança vers le bord du couloir, elle put apercevoir d'immenses brasiers allumés au sein même du trésor, projetant au plafond une lueur dorée à faire envier les morts sous la montagne. Une lumière comme on ne pouvait jamais en voir ailleurs. Gaviria comprit alors les récits, les louages et la convoitise des seigneurs. Ce trésor, aussi maudit qu'il était, était d'une beauté renversante. D'une beauté que l'on pourrait admirer toute sa vie entière, sans s'arrêter.

La Rôdeuse Du Nord : messagère de l'ombreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant