Chapitre 4

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Les portes du métro se refermèrent derrière Léa. Le compartiment était presque désert à cette heure. C'était le premier métro. Nul doute que dans la direction inverse, la rame devait être bondée.

La jeune femme s'assit sur le premier strapontin à côté d'elle. Puis, appuyant contre la vitre sa tête sur laquelle était fichée son éternelle casquette, elle augmenta le son de ses écouteurs.

Elle aurait juste le temps de prendre une douche et de grignoter quelque chose avant de repartir. La fatigue commençait à se faire sentir. Depuis qu'elle avait repris son emploi de nuit dans les immeubles de bureaux, elle avait du mal à garder les yeux ouverts pendant le trajet de retour. Retenant avec effort un bâillement, elle jeta un coup d'œil discret dans le wagon. Il y avait trois hommes et une femme... Et, étrangement, contre toute logique, la présence de cette femme seule la rassura immédiatement.

Elle se détendit légèrement et se concentra sur la musique. Couvrant le son de la rame, sa playlist jouait à fond. « Everybody's gotta learn sometimes », de Beck succéda à « C'est un secret », de Patrick Andrey...

Léa sursauta et ouvrit les yeux. Vivement, elle jeta un regard sur le mur de la station.

Bon sang ! C'était sa station !

Elle descendit précipitamment du métro et se dirigea vers l'escalator pour prendre la sortie. Des pas résonnèrent derrière elle. En général, à cette heure, elle était seule à descendre ici. Discrètement, elle jeta un coup d'œil par-dessus son épaule. Elle aperçut furtivement la silhouette d'un homme de taille moyenne, et assez trapu, à quelques pas d'elle.

Soudain, son cœur fit une brusque embardée dans sa poitrine, avant de commencer à battre de façon erratique. Une peur irraisonnée, une peur reptilienne, primaire, s'empara tout à coup de la jeune femme.

Elle accéléra et grimpa quatre à quatre les marches de l'escalator, qui était immobilisé. L'aube pointait à peine lorsqu'elle déboucha sur le boulevard seulement fréquenté par quelques voitures. Elle fut surprise par la fraîcheur de l'air. Bifurquant bientôt, elle ne put s'empêcher, une fois encore, de jeter un regard vers l'homme... qui suivait, apparemment, la même direction qu'elle.

Elle marchait maintenant à vive allure. En fait, elle était à la limite de courir. Quelque part dans un recoin de son cerveau, elle savait que son attitude n'avait aucune logique. Mais c'était plus fort qu'elle. Qu'est-ce qui avait déclenché cette peur ? Elle n'en avait pas la moindre idée... Ou peut-être était-ce la façon dont avaient résonné les pas derrière elle, ou la silhouette de cet homme, qui avait réveillé des souvenirs en elle ? Ou peut-être rien de tout cela. Peut-être était-elle tout simplement fatiguée...

Léa déboucha dans sa rue et entra précipitamment dans son immeuble, non sans avoir vérifié, une dernière fois, où se trouvait l'homme. Mais elle ne le vit pas.

Elle prit pourtant les escaliers au pas de course. Puis, refermant vivement la porte de son studio, avant d'en tirer tous les verrous, elle s'y adossa. Les jambes flageolantes, elle retira sa casquette. Et, du revers de la manche de son blouson en jean, elle essuya son front moite de sueur...

Léa priait désespérément pour que Dimitri ne s'aperçoive pas de son trouble. Du trouble qu'il créait en elle.

Auprès de son patron, il lui devenait, à chaque rencontre, un peu plus difficile de plaquer sur son visage son masque d'indifférence. Car, non content d'occuper toutes ses pensées dans la journée, il envahissait maintenant ses rêves. Dans ceux-ci, il la serrait dans ses bras, l'embrassait à en perdre haleine, la caressait de ses mains viriles...

Dans le regard de Léa...Où les histoires vivent. Découvrez maintenant