Chap 19. Le prisonnier

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Après que Renarde l'ai épaulé jusqu'à la rue des Serviettes, Orphée avait décidé d'effectuer des tâches des plus simples : essayer de trouver un temps pour faire sa toilette sans se faire remarquer, récupérer un bouillon et du pain dans les cuisines et bien sûr dormir.

Lorsqu'il ferma à clef, qu'il se déshabilla de son costume Mirage - en le jetant clairement sur sa chaise - et qu'il s'écroula sur le lit, Orphée était clairement drainé de toutes énergies.

C'était tant mieux, parce qu'il était d'une humeur de chien.

Il fixait le plafond craquelé de sa chambre, l'air sec emplissait les lieux comme si rien n'avait changé. D'une certaine manière, c'était mieux ça que le débarras qui lui servait de cellule.

Orphée soupira et croisa ses doigts sous sa nuque. Il essaya d'oublier les clac clac clac, des draps étendus des lavandières juste à côté. Mais après tout ce temps, Orphée avait l'habitude et s'endormit rapidement dans un sommeil profond et sans rêves.

En se réveillant, huit bonnes heures plus tard, ce qui n'était pas si mal au Clairdelune, des bruits différents lui parvinrent. Orphée soupira et se releva difficilement, en baillant. Au dehors de sa chambre, des couinements, des gloussements et de grands rires résonnaient comme pas deux.

Orphée n'avait même pas besoin de regarder l'heure : les filles allaient se doucher, on était donc en début de soirée juste avant les services pour la haute qui commençait à se réveiller pour vivre une nouvelle nuit déjantée.

Heureusement que Borromee lui avait laissé une pause, sinon il ne serait tout simplement pas venu. Ras le bol d'être conciliant. Il se trouvait déjà très patient pour sa part.

Il se releva et s'étira brutalement pour s'avancer vers le baquet d'eau. Il passa le liquide sur son visage et dans ses cheveux. Torse nu, légèrement bossu à force d'être plus grand que la moyenne, Orphée étudia son reflet.

Son vrai lui.

Il avait prit un cou dans l'aile. Un joli bleu sur les côtes droites, la mâchoire un peu engourdie, poches sous les yeux et un regard éteint. Bon, il avait vu pire selon lui. Par contre il allait devoir raser cette moustache quand il aurait le temps.

Mais, il savait que ce n'était pas le pire. Doucement, il observa ses mains. Ses longs doigts, ses jolis ongles et surtout ses jointures pleines de marques et le dos de ses mains couvert de meurtrissures. Ses gants de liseur - qu'il remit - ne protégeaient pas du choc des coups poings. Mais ça ne le dérangeait pas.

Il avait besoin de se rappeler de chaque visages hypocrites comme une vieille ritournelle. Pour se rappeler que ses fiançailles avaient été bien plus qu'un simple carnage, mais aussi des machinations grotesques. Qui était vraiment digne de confiance finalement ?

Il enfila négligemment sa tenue de bonne.

À part Renarde, "une bonne amie" qui n'était pas de refus dans ce monde de malheur, il ne voyait pas trop. Au même moment, quelqu'un toqua à la porte.

  - Les affaires reprennent, murmura Orphée sarcastique.

Il se faufila sous le masque de Pantoma et déverouilla la porte. Il tomba nez à nez - presque - avec Gaalad qui était quand même plus petit que lui. Surpris, Orphée remarqua qu'il portait un phonographe dans les mains.

Il entendit à l'extérieur les bonnes glousser comme des poules. Fabuleux, les rumeurs allaient aller de bon train. Blasé, Orphée laissa Gaalad entrer et ferma la porte derrière lui.

  - Je te rapporte un peu de musique, lança Gaalad très posé.

Il sortit de son sac en bandoulière, un disque qu'il posa sur l'appareil. Un silence, les rayures de l'objet, puis un tremblement sonore : un son de fanfare à briser les murs. Orphée plissa les paupières sous sa frange. Vraiment, il ne manquait plus que ça : un mécanicien douteux et un disque de foire circacienne, il ne pouvait rêver mieux.

ORPHÉE & TÅVIE ━゙LA PASSE-MIROIR✔Où les histoires vivent. Découvrez maintenant