ORPHÉE & TÅVIE ━ﾞLA PASSE-MIROIR✔

Chap 1. Le bibliothécaire

Un bruit clair résonna sur le sol du vestiaire des Archives familiales.

Quelque chose venait de tomber : c'était une paire de lunettes.

Elle appartenait à un nez droit qui dépassait d'un miroir, dont la surface s'évadait comme l'onde pure d'un lac.

Une silhouette continua à sortir du psyché, comme si celui-ci était un simple passage liquide. S'en suivit des cheveux noirs ébouriffés qui cachait un front et sûrement un regard. Un long torse. Des longues jambes. Un pull-over gris à la laine trop détendue et un pantalon noir.

La silhouette masculine sortie totalement du miroir et pencha sa longue colonne vertébrale. Il récupéra ses bicycles et ajusta la longue écharpe de laine qui traînait jusqu'à sa taille.

Lorsque sa vue devient plus nette derrière les verres grisâtres - dû à une certaine frustration, contaminés par son animisme - le jeune homme se releva entièrement. Il était grand, même trop. Il avait une allure élancée, presque dégingandée. Il se nommait Orphée et il avait un sacré problème sur les bras.

Comme à chaque fois qu'il s'infiltrait dans le bâtiment des Archives - à l'improviste, hors des heures d'ouvertures et en plus, par un miroir - tout les meubles lui faisaient singulièrement comprendre, qu'il n'était pas la bienvenue.

Franchement, pour Orphée, c'était le dernier de ses soucis. Après tout, il n'était pas là pour rendre visite au bâtiment grognon et caractériel selon les saisons, non. Il était là pour écouter des conseils et annoncer une nouvelle difficile. Et ce n'était certainement pas un bâtiment public, qui allait commencer à lui faire la leçon.

Orphée, avec sa grande silhouette et ses pas silencieux, tapota sur un mur au hasard, pour calmer tout les objets.

L'effet fut immédiat, en bon Animiste qu'il était. Les Archives persiflèrent encore un peu, mais le reconnaissant, finirent par se calmer. Orphée laissa derrière lui les vestiaires et une traînée d'écharpe pleine de petites peluches. Il ouvrit la porte, sur une pièce tout en longueur et glaciale, pour cette matinée d'automne. Ce n'était pas si étonnant, il s'agissait des chambres froides, où reposaient des centaines de registres sur la famille, avec quelques détails importants sur la consanguinité, les décès et les naissances.

Orphée passa la salle des consultations, où une belle luminosité roussâtre se reflétait dans la salle vide. Évidemment, il était beaucoup trop tôt. Puis, en à peine trois enjambées, il était arrivé devant l'appartement de la gardienne des lieux : l'archiviste, sa grande-tante.

Orphée ne se demanda pas, si elle était réveillée. Après tout, cette douce odeur de café qui stagnait dans l'atmosphère depuis derrière le rideau, qui le séparait de l'appartement, en était la preuve. Il dégagea le pan de tissu et comme d'habitude, trébucha sur la marche traître, qui servait de délimitation. Orphée ne s'en agaça pas, cette maladresse était une malédiction qui lui collait aux chausses depuis sa pré-adolescence. Et c'était en parti de sa faute.

-Te voilà, fils, tu es aussi discret qu'une allumette qu'on craque dans le silence, navrée de te le dire ! Allez, pose-toi là ! Claqua une voix un peu bourrue.

Pourtant, c'était bien une femme qui venait de lui parler. Orphée s'excusa derrière son écharpe. Le petit appartement réunissait à lui tout seul, salon, chambre, cuisine et cabinet de lecture. Orphée fit attention de ne pas se prendre une casserole sur la tête, qui pendait des poutres. Après tout, il touchait presque le plafond.

Sa grande-tante était assise sur un fauteuil, dans une vieille robe qui ressemblait à une salopette, aux yeux du jeune homme. Elle avait de longs cheveux blancs attachés en un chignon avec des baguettes, une pipe dans la bouche et une loupe d'expersise sur les genoux. Elle avait la peau fripée et des gants de liseur, comme ceux d'Orphée.
Celui-ci s'assit sur un tabouret à longs pieds, qui était parfaitement à sa taille. Son dos se tassa un peu, sur lui-même.