Priam ouvrit la porte d'un restaurant des plus banals. Pas de grand lustre en verre et de majordome aux petits soins laissant traîner derrière lui sa queue de pie. Il n'y avait personne. Priam était certain de ne pas se faire remarquer. Une jeune femme nous accueillit et nous plaça sur une terrasse où les bourgeons étaient sur le point d'éclore. Des dizaines de plantes grasses et vertes s'accrochaient et s'entrelaçaient comme du lierre autour de la balustrade. Nous pouvions voir la route en contre-bas, les passants et les commerçants plongés dans un bain de soleil redoutable. Comme dans le hall d'entrée, les tables étaient pratiquement toutes inoccupées et des serveurs s'attelaient à les nettoyer. Je jetai un coup d'œil à ma montre et écarquillai les yeux. Il était à peine quinze heures.
— Il est encore très t-tôt pour manger, bégayai-je.
Priam arrêta de jouer avec la serviette qu'il triturait entre ses longs doigts.
— Il n'y a pas d'heure pour manger, répondit-il en me faisant un clin d'œil.
La jeune femme qui nous avait placée revint avec les menus. Au moment où j'ouvris la carte, je faillis partir en courant. Ma salive venait de s'assécher comme si elle était restée trop longtemps au soleil. Les prix étaient élevés et... Et, je n'avais que quelques dollars dans mon sac. J'osai lever les yeux vers Priam qui, sans surprise, m'épier avec fascination.
— J-Je ne peux pas me payer un tel repas, Priam.
L'argent n'était sûrement pas un souci pour lui, il semblait être riche comme Crésus. Cependant, je vivais avec mes économies et l'argent que pouvait m'envoyer mon père. Un restaurant de cette envergure n'était même pas envisageable.
— Que tu aies de l'argent ou non, je t'aurais offert le dîner, chérie.
— Je... Je ne veux pas vous embêter avec ça.
Je ne veux dépendre de personne.
Priam serra ses doigts autour de son menu.
— Ne dis pas de conneries, Belle, grogna-t-il. Tu oublies que j'ai de l'argent, tu ne me coûteras rien, au contraire.
Je retroussai mon nez, dubitative.
— Laisse-moi au moins t'offrir ça, dit-il en me regardant.
La morsure glaciale dans sa voix m'intima de ne rien dire de plus. Soit il me payait le repas, soit je devrais partir sans manger. Et, je n'avais aucune envie de le quitter. Je n'arrivais déjà pas encore à croire qu'il était là avec moi, en train de partager un dîner. C'était juste inimaginable alors raison de plus, pour ne pas protester.
— Prends tout ce dont tu as envie.
Je hochai la tête en lisant le menu afin d'oublier le silence qui nous entourait et qui me rendait nerveuse. Tout me faisait envie même si je n'avais pas faim.
Soudain, Priam referma son menu, posa les coudes sur la table en s'avançant et dirigea son attention vers moi. Mal à l'aise, je me forçai à fixer les plats sur mon livret jusqu'à ce qu'il m'interpelle.
— As-tu choisi ?
— Euh... T-Tout à l'air délicieux.
— Alors prends tout.
Il sourit et j'entrouvris la bouche.
— Je ne peux pas faire ça, P-Priam.
Son sourire s'agrandit en entendant son prénom sorti de ma bouche, ses dents blanches étincelèrent, ce qui le rendit irrésistible.
— Je t'ai dit que tu pouvais prendre tout ce que tu veux. Ça ne me dérange pas.
— Non, non, je vais prendre ça.
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K.O
RomanceBelle pourrait être la définition de la candeur et de la timidité à l'état pur. Victime d'un passé dont elle en a tiré tant de cicatrices, elle emménage à Brooklyn dans l'optique de tout recommencer à zéro. Priam Hidden, lui, est le boxeur du moment...