Chapitre 7 : Surprises

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Lorsque je m'éveillai le lendemain, je ne trouvai personne dans l'appartement. J'entrai dans la cuisine vide, nimbant dans la clarté de midi. La chaleur du soleil s'étalait de tout son long sur ma peau et m'enveloppait dans un cocon de douceur alors que je me frottai les yeux. J'allais ouvrir la porte du frigo lorsqu'un post-it attira mon attention.

Eden bosse jusqu'à 13h.
Je suis parti faire des courses.
Ben.

Mes yeux restèrent figés sur son écriture en me demandant ce qu'il pouvait bien penser de moi à l'heure qu'il était. J'étais arrivée en pleine nuit, accueillie par les ténèbres et les ombres de l'appartement. Ils dormaient déjà quand j'avais passé le seuil et ne m'avaient pas réveillé ce matin. Je supposai que Ben devait être encore furieux de mon abandon mais dire que je regrettais mon choix serait un mensonge éhonté. Priam ressemblait à la fois à l'image que je m'étais faite de lui et à un être complètement différent de mon monde qui me fascinait plus que je ne voudrais l'admettre. Je me souvenais encore de chaque détail de notre discussion, de chaque parcelle de son visage jusqu'à la kyrielle interminable de verts dans ses yeux. Je n'avais pas oublié sa façon de m'appeler ou de prononcer mon prénom, ni le grain rocailleux de sa voix qui faisait vrombir ma cage thoracique. L'odeur dans la loge semblait encore flotter autour de moi ; je pensais qu'il faudrait me décaper la peau pour la faire partir, comme du sang coagulé sous mes ongles. Mais une partie de moi refusait de passer sous la douche. Le mâle, la vaseline, la sueur, c'était de ça que j'avais envie à ce moment présent et cette pensée me rendit folle de rage.

Pour me changer les idées, je me focalisai sur mon petit déjeuner et le choix de mes vêtements. Pour la première fois depuis longtemps, j'osai appliquer un peu plus que du mascara. Je me lissai les cheveux avec parcimonie, laissant ma cascade polaire onduler soigneusement dans mon dos. La sensation de mes cheveux sous mes doigts me rappela le velours de son peignoir.

Nous étions vendredi. J'avais terminé mes partiels en début de semaine. Il restait encore à Eden des examens cet après-midi mais son nouveau job lui occupait toutes ses matinées. Je repensais au message de Ben ; il n'allait pas tarder à revenir... Est-ce que je craignais son retour ? Ho que oui... Je n'avais aucune envie qu'il conteste mes décisions, ni qu'il me fasse regretter mon initiative. Puis, j'avais encore la menace de l'expulsion qui pesait au-dessus de ma tête. Mes cours ne reprenaient qu'à 14h alors pourquoi ne pas retenter ma chance ? Peut-être que je trouverai le travail qui me sauvera la vie.

Je m'armai donc de courage et partis en ville, plusieurs CV que j'avais imprimés un peu plus tôt soigneusement rangés au fond de mon sac. Je n'oubliai pas de laisser un message à Ben pour l'avertir que je sortais.

Je me rendis compte en sortant un de mes CV que je n'avais pas vraiment de compétences, ni de qualification. Je n'étais pas ambitieuse, je n'aimais pas l'esprit de compétition et je n'excellais dans aucun domaine en particulier...

Madison Square Garden ne vibrait plus de la même folie que la veille. Les néons plus bleus que le ciel en pleine tempête ne brillaient plus et avait été remplacés par des lanternes suspendues qui libéraient une légère lumière tamisée à peine visible à cette heure-ci. Certaines personnes s'arrêtaient encore devant l'énorme affiche où Priam affrontait Buffle dans un combat de regards. J'avais l'impression qu'il me fixait moi aussi. Ses yeux ruisselaient de passion, d'adrénaline et de force. C'était le regard qu'il avait sur le ring, le masque de conquérant qu'il semblait endosser pour marquer les esprits. Personne ne ressortait de ses matchs sans se rappeler de son nom et grâce à cette aura magnétique, il y veillait personnellement. Cependant, lors de notre entrevue, j'avais perçu quelque chose de différent émanant de lui. Je n'irais pas jusqu'à dire qu'il avait quitté son rôle – loin de là – mais, à aucun moment il ne m'avait donné l'impression qu'il calculait chacun de ses gestes ou la moindre de ses paroles. Il n'avait pas triché en ma présence. Pour une fois, on ne s'était peut-être pas joué de moi.

K.OOù les histoires vivent. Découvrez maintenant