Samedi :
Il faisait encore nuit lorsque j'ouvris les yeux. Allongée dos à Taylor, sa main était posée sur mon ventre, son corps contre le mien. Je dégageai doucement son bras et me levai en prenant soin de ne pas le réveiller. Il bougea légèrement et bascula sur le dos. La lumière du lampadaire, se trouvant dans la rue, éclaira suffisamment la pièce pour que je sorte sans trébucher. Je descendis jusqu'à la cuisine et me servis un grand verre d'eau.
Je me perdis dans mes pensées. Je savais que j'avais joué avec le feu, que je n'allais pas ressortir indemne de cette histoire. J'avais des sentiments pour lui, des vrais sentiments comme je n'avais jamais eu. Certes je ne le connaissais qu'au travail et aux quelques sorties où nous nous étions retrouvés ensemble, mais mon cœur lui avait compris bien avant moi ce que je ressentais pour lui. Je fus surprise de voir à quel point derrière son sale caractère se cachait un homme tendre et doux et cela ne me déplaisait pas, au contraire. J'aimai ce côté de lui.
Je m'étais dis que même si il ne voulait pas de moi au quotidien, même si il ne se servait de moi que pour oublier son amour de fac qui avait fait son retour et bien je pouvais m'en contenter, non ?Mais c'était impossible, il m'avait dit clairement que rien ne serait possible entre lui et moi. Je devais me faire une raison.
Je posai le verre dans l'évier et jetai un œil sur la pendule au style d'une horloge de gare, elle indiquait trois heure quinze. Je remontai le plus silencieusement possible et allai chercher mes vêtements dans la salle de bain. Je m'habillai rapidement, des larmes coulaient sur mes joues. J'avais mal et il n'y avait qu'une seule solution pour ne pas souffrir d'avantage. Je retournai au rez-de chaussée, enfiler mon manteau et quittai le loft de Taylor. Une fois sur le trottoir, j'appelai un taxi qui me ramena chez moi.
*****
J'avais écumé toutes les petites annonces d'assistante de la ville, envoyé quelques CV par mail aux plus intéressantes. En rentrant cette nuit, j'avais pris la décision de quitter le cabinet et donc mon poste auprès de Taylor. Je n'étais pas celle qu'il convoitait et même si je pensais y arriver, ce fut un échec. J'avais pleuré dans le taxi qui m'avait ramené chez moi, le pauvre chauffeur avait fini par me donner la boite de mouchoirs. J'avais pleuré en passant le seuil de la porte de mon deux pièces parce qu'il me rappela à quel point j'étais seule et j'avais pleuré devant mon assiette parce que j'étais à bout, j'en étais donc arrivée à la conclusion qu'il fallait que je m'éloigne de lui. Au final, tant que je n'avais pas couché avec lui tout ce passait bien, je n'aurai jamais dû l'inviter à monter chez moi ce soir là. Jamais... Grossière erreur de ma part.
Il ne m'avait pas contacté de la journée, alors il était inutile d'espérer quoi que ce soit de plus et il me l'avait bien fait comprendre, mais j'avais dû mal à m'y faire. Assise en tailleur sur mon canapé, j'allumai la télé et mis une chaîne au hasard, une série humoristique passait, c'était parfait, au moins je n'allais pas pleurer, je regardai sans regarder quand mon téléphone émit une sonnerie indiquant un message. Ce n'était pas Taylor, mais ma sœur qui me proposait une virée shopping, mais je n'en avais aucune envie. Je lui répondis que j'étais fatiguée et elle n'insista pas à mon plus grand étonnement. Elle était plutôt du genre à obtenir tout ce qu'elle voulait et ça depuis sa naissance. Moi, j'étais le vilain petit canard, celle qui n'en faisait qu'à sa tête.
Je m'allongeai et me couvris avec la petite couverture à carreaux verte et blanche. J'étais épuisée moralement et psychologiquement. Je n'avais jamais autant souffert pour un homme, je me remettais toujours facilement de mes ruptures, sauf que là il n'y avait eu ni début, ni fin d'histoire. Je sentis mes yeux se fermer et je ne luttai pas contre le sommeil. J'avais besoin de récupérer des derniers jours où j'avais passé mes journées et mes nuits à ne faire que penser.
*****
Des coups à la porte me sortirent de mon sommeil, j'ouvris les yeux et regardai l'heure sur la pendule du four. Dix sept heures. J'avais dormi deux heures. On frappa à nouveau et je me levai en marmonnant, la tête complètement dans le coton.
-J'arrive, dis-je d'une voix enrouée.
J'ouvris et écarquillai les yeux en le voyant là sur le pas de ma porte. Il avança et je reculai prudemment, il ferma la porte avec son pied et celle-ci claqua, ce qui me fit sursauter. Il avait ce regard noir, dur comme quand il était devant un juge et qu'il savait que la partie serait difficile.
-Je ne veux pas que tu partes Lina, dit-il sèchement.
-Que je parte ?
-Le cabinet Lenseen m'a téléphoné tout à l'heure. Garry est un ami, il a reçu ton CV par mail. Il voulait savoir pourquoi tu ne travaillais plus pour moi.
-Oh, fut le seul mot que je pus prononcer.
J'avais oublié que les avocats avaient rarement des jours de congés. Et je ne pensai pas qu'il prendrait contact avec Taylor.
-C'est de ma faute, n'est-ce pas ? dit-il dans un murmure.
Je détournai les yeux, j'allai encore pleurer, une vraie fontaine depuis ce matin.
-Regarde-moi s'il te plait.
-Je n'arriverai pas à travailler pour toi après ce qu'il s'est passé entre nous, dis-je en le fixant à nouveau.
Il s'écarta de moi et tourna tel un lion en cage dans mon minuscule appartement. Je savais que j'allais m'en vouloir, mais je devais me libérer de ce poids même si je savais au fond de moi que cela ne changerai rien.
-J'ai des sentiments pour toi Taylor. De vrais sentiments... Je sais pertinemment que toi tu n'en as pas pour moi. Que cette fameuse nuit n'était qu'une erreur. Que tu n'as d'yeux que pour l'avocate. Je ne connais pas la raison de votre séparation et je ne veux pas savoir... Mais, il est certain que tu éprouves toujours ce truc pour elle. Tu as changé au moment même où elle réapparut dans ta vie.
Il avait arrêté ses allers retours, il me dévisagea d'un regard indescriptible. Il ouvrit la bouche, mais la referma aussitôt. Il prit une profonde inspiration. Il s'installa sur le canapé. D'un signe de tête, il m'invita à le rejoindre. Ce que je fis, je m'installai en tailleur et saisis un coussin que je posai sur mes jambes. Il se positionna de façon à être face à moi.
-Je n'ai pas d'excuse pour ce qui s'est passé entre nous. Je suis désolé.
-Je ne t'en veux pas. Et puis de toute façon que ce serait-il passé quand tu aurais compris que la personne avec qui tu avais envie d'être n'était pas moi, mais Cassandre ? Je ne veux plus être celle qui panse les blessures. Je veux une relation stable et tu ne peux pas me la donner.
Il fronça les sourcils, je venais de toucher un point sensible et il sembla y réfléchir. Il se leva et regarda autour de lui comme si il cherchait une réponse. Je le suivis du regard, j'étais moi aussi perdue, je ne savais plus où j'en étais et ça me faisait peur et mal aussi. Très mal. Je me levai et me mis face à lui, tête baissée car je savais que si je le regardai dans les yeux, j'étais perdue. Mon cœur battait vite et mes mains tremblaient légèrement, j'étais plutôt forte et je gérai bien mes émotions mais pas en ce moment. Je ne contrôlai plus rien et j'avais l'impression de me perdre.
-Tu as raison. Mais je veux que tu restes.
-Non.
Cela me coûta vraiment de lui dire non, mais je n'étais pas suicidaire. Je savais que cela ne nous mènerait à rien. Il hocha la tête et avança vers la porte d'entrée. Il posa la main sur la poignée et se tourna vers moi, le regard sombre. Et je sus à ce moment-là, que lui et moi, sous quelque forme que ce soit, c'était terminé pour de bon.
-Très bien. On se voit lundi au cabinet pour régler ton départ. Je m'occupe de téléphoner à Lenseen, tu auras un nouveau job dès mardi.
Il ferma la porte doucement alors que je m'attendais à ce qu'il la claque. Je restai là, au milieu de mon salon encore hébété par ce qu'il venait de se passer et je regrettai amèrement de lui avoir dit non. Voilà, j'avais tout perdu en l'espace de quelques minutes. Mon job et lui...
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Huit ans après (TAD-MED Tome 2)
Romance"Il faut un cœur solide pour aimer, mais il faut un cœur encore plus fort pour continuer à aimer après avoir été blessé" -Taylor? Qu'est-ce qu'il t'arrive ? Il est quatre heures du mat'. -Tu le savais ? Hein ? Dis-moi que tu le savais !! -Quoi ? -Tu...