#16 L'escouade des affamés

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Livaï

Je talonne les couloirs, animé par une colère patente. Mes hommes s'écartent vivement de mon chemin. En apparence, ils consacrent toute leur énergie à la tâche qui leur incombe, mais s'endorment dès que j'ai le dos tourné. Ils croient que je ne les ai pas vus glander ?!

— Remettez-vous au travail, grondé-je.

Enfermé à double tour dans mes appartements, je détache mes gaines qui tombent lourdement sur le sol. Ma cape vole, mes bottes ainsi que mes vêtements suivent bientôt. Les nerfs à vifs, je gémis presque en entrant dans l'eau chaude. Les coudes et l'arrière du crâne calés sur le bord de la baignoire, je me délecte de cet instant mémorable. En effet, je n'ai guère le temps ni l'habitude de me préparer des bains, bien que hors expéditions, je me réserve toujours cinq minutes pour une douche après l'entraînement. Mais cette fois, il semble que la saleté se soit incrustée profondément jusqu'à infecter mon esprit.

Si j'accorde une grande importance à l'hygiène, d'où je viens, cela est inconcevable. Je ne suis pas un enfant de chœur, je ne l'ai jamais été. Après le décès de ma mère, les Bas-fonds n'ont fait que révéler cette part d'ombre enfouie en chacun de nous. Une pulsion, l'instinct qui nous pousse à avancer dans cet enfer, et parfois aux pires extrémités pour y parvenir. Dans la ville souterraine, la mort nous poursuit comme un créancier véreux. La faim est un problème commun contre lequel nous luttons chaque jour, chaque heure, parce que les denrées livrées par les marchands avides de la surface valent plus qu'une vie de servitude. L'eau, elle, ne manque pas, bien qu'elle nous gratifie du choléra, cette saloperie contagieuse. À chaque carrefour, meurtriers, contrebandiers et prostitution participent à son enfoncement dans le vice et l'insécurité. Sans Erwin, je n'en serais jamais sorti.

Une serviette enroulée autour de la taille, je retourne dans mon bureau chercher mes affaires. Un rictus étire le coin de mes lèvres quand je repense à la situation actuelle. Quelle réjouissance que les habitants de la surface, ces cloîtrés qui nous ont condamnés à la misère, peuvent aussi connaître un destin tragique. Cet homme aurait été comblé d'assister à un tel spectacle. Et elle... ?

Mon regard se braque sur mes vêtements qui jonchent le sol. Oui, c'est bien cette fille la fautrice de troubles. Elle a dû avoir la belle vie avant qu'on le lui arrache. À quoi a ressemblé son enfer personnel... ? Ses yeux éteints me reviennent en mémoire, et mon visage redevient neutre. Mes pensées s'embrouillent encore. Si j'éprouve une pareille aversion à son égard, comment expliquer l'autre raison à mon emportement ? Que je me sois senti aussi sale, en face d'elle ?

« Quelqu'un comme toi... est pourri jusqu'à la moelle et ne mérite que de crever la bouche ouverte. »

— Tch.

Ma paume soutient ma tête migraineuse. Qui suis-je pour la juger ?



Five Years T.1 : Inside [Livaï x OC]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant