Chapitre n°3: ?

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          Quel étrange endroit pour se réveiller d'une sieste dans un tube de verre qu'une clairière entourée d'arbres, sous un soleil qui cognait.

         La première réaction de Chloé fut de jeter un coup d'œil à ses bras. Malgré l'intense douleur qu'elle avait ressentie quelques instants plus tôt, aucune marque n'en paraissait sur son corps. Elle remarqua dans un second temps qu'elle avait toujours ses vêtements,ceux qu'elle avait enfilés en sortant de la douche, mais ce qui lui semblait bizarre, c'est qu'elle avait les cheveux parfaitement secs.Son regard se posa ensuite sur tout ce qui l'entourait : une forêt. Des arbres, de l'herbe bien verte et...de la fumée ?!

        Elle mit quelques secondes à se rendre compte que les deux traits noirs qui coupaient le ciel au-delà de la cime des arbres étaient deux panaches de fumée. Mais ce fut seulement après avoir scruté le paysage autour d'elle et vérifié sa santé physique qu'elle se rappela ce qui s'était passé avant qu'elle ne se réveille au milieu de l'herbe fraîche. Elle se redressa sur ses deux pieds et regarda vers la lisière de la forêt, avec une certaine peur et la boule au ventre, comme une biche affolée après s'être fait courser par des chasseurs et leurs chiens. C'était impossible...elle ne pouvait pas s'être téléportée en dehors du tube ... Si son père avait trouvé un moyen de voyager dans le temps, ou juste de se téléporter, toute la planète serait au courant, en commençant par elle. Jamais son père ne lui aurait caché une si grande découverte.Elle était peut-être à côté de chez elle... C'est ça ! Le tube était une machine servant à plonger les gens dans un profond sommeil, ce qui expliquait que ses cheveux soient secs, et son père l'avait amenée dans une forêt près de chez eux pour lui faire une blague. Tout ceci n'était qu'une farce de son père !

      Rassurée par cette idée, elle commença à marcher vers les deux panaches de fumée d'un pas assez nonchalant, certaine de retrouver sa maison pour le repas du soir. Mais si elle s'en référait au peu qu'elle savait en astronomie, le soleil devrait être à plus ou moins une heure avant son zénith. Il était donc à peu près 11 heures du matin. Elle se mit à douter. S'il était 11 heures, ça ne correspondait pas à sa théorie sur la blague de son père... Son cœur se mit subitement à accélérer, faisant prendre une teinte rouge à son visage. Elle pressa le pas en direction des colonnes noires qui cachaient le ciel. Elle atteignit assez vite la lisière de la forêt. Elle recommença à douter... De ce qu'elle se souvenait, aux abords de Limoges, il y avait beaucoup de routes goudronnées ou alors des lotissements. Les seules choses qui s'étendaient devant elle étaient... trois bâtiments assez imposants, aux allures d'internats militaires et les deux panaches de fumée qui venaient en réalité de deux bâtiments longs. En se concentrant sur ces derniers, elle se rendit compte que les panaches de fumée provenaient... de trains à vapeur. Depuis quand y avait-il des trains à vapeur à Limoges, et depuis quand y avait-il des instituts militaires dans la ville ?! N'y croyant toujours pas, elle commença à marcher vers les trois bâtiments, tous reliés aux différentes maisons situées plus loin.

        La sortant de sa rêverie, un train quitta l'une des gares dans un bruit si assourdissant que même elle, à près de 1 km, réussissait à entendre. Elle baissa les yeux vers le chemin et vit une charrette qui s'avançait vers elle. Elle décida d'aller à la rencontre de cette charrette et de son conducteur qui semblait habillé d'une manière bien atypique.

    Arrivée devant le véhicule, Chloé flatta l'encolure des chevaux et s'adressa au conducteur :

       -Bonjour, sauriez-vous où je suis ?

     Le conducteur de la charrette, un jeune homme dans la vingtaine, assez séduisant malgré son style assez ancien, lui répondit avec un accent que Chloé ne connaissait pas :

     -Vous êtes à Limoges. Vous portez de drôles de vêtements. D'où venez-vous ?

         -Eh bien... Je viens de Limoges mais je ne reconnais pas du tout ma ville.

        - Eh bien peut-être que vous n'êtes pas venue depuis quelque temps.C'est vrai que depuis quelques mois, depuis le milieu de l'été, les choses ont quelque peu changé ici.

        -Que s'est-il passé cet été ?

     Le conducteur partit d'un rire franc, qui fit comprendre à la jeune femme que le jeune homme se moquait de son ignorance. Chloé, qui n'aimait pas qu'on se paie sa tête, enchaîna :

       -Et puis qui êtes-vous ? Pourquoi êtes-vous habillé comme au siècle dernier ? Pourquoi avez-vous une charrette avec des chevaux alors que vous pourriez avoir une camionnette ?Pourquoi ...

       -Oula, oula ma p'tite dame, une question à la fois, vous parlez trop vite, recommencez.

         Chloé poussa un petit soupir d'agacement.

         -Qui êtes-vous ?

        -Je m'appelle Charles et j'habite à Limoges depuis ma naissance et vous ?

      -Je m'appelle Chloé et j'ai habité à Limoges jusqu'à ce que je parte étudier à Toulouse.

      Charles parut drôlement surpris par cette révélation, mais ne fit aucun commentaire. La jeune femme n'en tenu pas compte et continua ses questions :

        - Pourquoi avez-vous ces vêtements ?

      -Mes vêtements sont tout à fait normaux, mais je peux vous retourner la question, car votre pantalon et vos chaussures sont des plus étranges.

     Chloé baissa les yeux sur son jean et ses converses qui à elle, lui semblait tout à fait normaux. Elle remarqua aussi que Charles semblait bien plus sur la défensive que précédemment. C'est d'ailleurs lui qui reprit avant que Chloé ne put poser une autre de ses questions :

       -Vous avez dit que vous étudiiez à Toulouse, mais vous y étudiiez quoi là-bas ?

     -Et bien j'y étudiais le droit. Et j'avais été à Toulouse parce que l'université proposait une spécificité qui m'intéressait pour les prochaines années. Pourquoi cette question ?

        Elle avait un peu tourné la tête et fait quelques mouvements des bras en expliquant son cursus ainsi, quand elle reposa son regard sur Charles, elle ne sut pas quoi lire dans ses yeux : il avait soit peur, soit il était intrigué, soit très surpris.

           Il dit, d'une voix quelque peu tremblotante :

          -Université, droit, spécifici...té ? Qu'est-ce que c'est que tout ça ?

         -Vous n'êtes jamais allé à l'école ?

        -Je n'y suis pas resté très longtemps, je devais aider mon père à la ferme.

       -Et bien l'université c'est une école supérieure. Vous n'en avez jamais entendu parler ?

         -Jamais. D'où venez-vous ?

          Chloé sentit une petite colère monter en elle :

         -Je vous l'ai dit, je viens de Limoges, je suis née ici, en 1996.

       S'il n'y avait pas eu ses articulations pour la retenir, la mâchoire de Charles aurait roulée sur le sol. Les yeux exorbités, la bouche grande ouverte, d'une voix secouée de tremblements de peur et de surprise, il dit :

           -Mais enfin...nous sommes en 1914 !

Les Choix de Chloé [Terminée]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant