20 septembre 2098

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Une semaine déjà que le drame est passé et tant de corps perdus dans son sillage... Seuls des animaux bien heureusement, mais quelle tristesse de contempler au petit matin le chagrin de ses victimes ! Je me souviens de ce chien, du Charlot, de ce sacré cabot qui l'avait vu grandir. Il avait, disait-on longtemps accompagné ce vieil ermite, cloîtré dans sa misère, qui descendait au village dix fois à peine par an. On raconte aussi qu'après la mort du brave homme, il est resté, à errer dans nos hameaux, comme une âme en peine. Je l'aimais ce molosse, j'aimais sa douceur à toute épreuve, quand les enfants lui tiraient la queue. J'aimais sa façon de cracher ses aboiements éraillés lorsqu'un chat s'approchait un peu trop. Mais plus que tout, j'aimais voir sa joie, sa satisfaction, les jours où je cédais un pilon de volaille à sa carcasse maigre. Ah ! Quelle ne fut pas ma peine en ce triste jour où j'ai découvert devant ma porte la bête inanimée, lui, si docile et si brave ! De son vivant, ce bon dingo n'avait causé de mal à une mouche. Mais quelle est cette mouche qui aujourd'hui l'a piquée ? Pire que notre peste, un démon. N'a t'on jamais ce que l'on mérite vraiment ? Ce chien-là, il aurait semblé digne du paradis, puisse t-il ne pas brûler en l'enfer de ce monde si injuste. Et maintenant, maintenant j'ai peur. Chaque soir de nouvelles victimes, chaque aurore un autre deuil et le monstre finira bien par se lasser. Il abandonnera trop tôt cette chair vainement sacrifiée, cueillie dans les champs, comme on ramasse une fleur ou une étoile. Ce jour-là, quand il goûtera l'autre gibier, quand il signera tous notre arrêt. Ô mon Dieu, épargnez leurs têtes blondes et leurs joues roses, épargnez-les, car je vous offre les miennes.

Alien : InvasionOù les histoires vivent. Découvrez maintenant