20 Pour Sang

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En atteignant le toit, Théo se place immédiatement hors de tout champ de vision possible.

Le garçon reprend son souffle, ses yeux vert scrutent l'obscurité à la recherche d'une possible menace. Mais il n'y a rien, personne n'a encore pointé le bout de son nez à un endroit aussi dangereux.

Théo se maudit d'avoir couru dans cette direction-là. Il n'a aucune issue, sa seule chance est de parvenir à tuer Jack avant lui, il ne peut plus fuir. D'un autre côté, il se serait certainement retrouvé face à Raphaël s'il avait choisi d'entrer dans le manoir. D'autant que grâce à Thomas, Théo sait maintenant que le grand blond est caché de son côté de la façade.

Théo fixe le nuage couvrant les rayons de lune. Il compte profiter le plus possible de ce manque de lumière. Étant arrivé sur le toit le premier, c'est lui qui a l'avantage.

Un instant ses pensées dérivent vers tous ceux s'étant retrouvés à l'endroit où il se tient sans qu'ils n'aient aucune idée de ce qui puisse leur attendre.

Il jure que pour lui, ça ne se passera pas de la même manière.

Théo se positionne près de l'escalier et sort son couteau. Il entend l'acier grincer de plus en plus fort. La sueur perle sur son front, Jack se rapproche. Théo sert un peu plus le manche de son couteau, ses mains sont moites, l'acier continue de crisser.

Puis le silence.

Seul le souffle haletant de Théo brise le mutisme de la nuit. Plus rien ne bouge, c'est comme si Jack avait disparu. Une minute s'écoule à une lenteur insupportable.

Théo doit se faire violence pour ne pas se pencher en avant et regarder ce qu'il se passe de l'autre côté de la façade. Il est presque certain qu'il s'agit d'un des pièges de Jack. Il ne doit pas céder.

Une nouvelle minute passe. Théo ne craque pas, s'efforçant de maîtriser les battements de son cœur afin d'être le plus silencieux possible.

Une troisième minute défile, puis une quatrième. Théo croit devenir fou.

Jack a-t-il pu partir par un autre chemin ? Y a-t-il une autre issue à l'escalier en colimaçon que les bleus ne connaissent pas ? Ou alors les bruits que Théo a entendus étaient en réalité Jack qui descendait les marches au lieu de les remonter ?

Un instant, Théo est tenté de regarder derrière lui pour vérifier que Jack n'a pas rejoint le toit par un autre moyen. Il est freiné par l'idée que ce peut être aussi un stratagème de la part du garçon pour le déconcentrer. Alors Théo ne lâche pas. Il restera ici toute la nuit s'il le faut.

Le silence se rompt à la sixième minute par un couteau sifflant l'air. Théo a tout juste le temps d'esquiver la lame surgissant des escaliers et fondant sur lui. Dans sa précipitation, le garçon perd l'équilibre et vacille sur le côté. Lorsqu'il se relève, Jack se jette sur lui comme un fauve. Theo le repousse d'un grand coup de pied et se relève brusquement. À peine remis sur ses jambes Jack sort un nouveau couteau qu'il balance dans l'avant bras gauche de Théo. Celui-ci esquive d'un geste et appuie sa main dans son dos pour le faire basculer. Jack se rattrape en s'accrochant à son adversaire et sa lame frappe entre ses omoplates. Étourdi par la douleur, Théo bascule. Jack retire la lame sanglante du dos du garçon et va pour se relever quand Théo parvient à se retourner et balancer son genou dans la gorge de son ennemi qui titube le souffle coupé. Théo se tord de douleur, il sent son tee shirt alourdi par le sang coller à son dos. Il se place à quatre pattes avec beaucoup de difficultés. Devant lui, Jack a récupéré son premier couteau et rangé le deuxième dans un passant de son short. Il se met à rire en découvrant l'état de son adversaire, et tel un tireur d'élite, il jette sa lame sur Théo. Celui-ci l'attrape au vol en blessant ses mains, n'étant pas parvenu à l'attraper par le manche. Il se relève en ignorant la douleur hurlante entre ses omoplates et se jette sur Jack en brandissant sa dague. Le rouge esquive l'arme mais pas le poids du corps du garçon. Ils tombent sur le sol et Théo est le premier à se relever. Il tire Jack contre lui dans le but de l'attirer près du bord et de le faire tomber. Le garçon éclate d'un rire sardonique lorsqu'il s'en aperçoit, il se retourne et enfonce son poing dans le ventre de Théo. Celui-ci bascule, le souffle coupé.