chapitre 14 : the twenty-ninth of March

500 47 70
                                    


C'est léger. Comme un courant d'air, une caresse. À peine un effleurement et puis ça disparaît.

Ou peut-être que c'est moi qui disparais...

Je ne sais pas...

Je m'extirpe à nouveau de ce brouillard cotonneux dans lequel je me complais et puis je me souviens.

Une tension dans mes muscles, presque une douleur et des voix qui me parviennent, mais restent hors de portée de ma compréhension.

Des bruits de métal, des sirènes, des voix encore, du mouvement, mais sont-ce des souvenirs ou l'instant présent ? Je ne parviens pas à le savoir, tout se brouille, se mêle dans mon esprit.

J'ai eu un accident, on a eu un accident, ça je m'en souviens, mais je ne sais pas ce que je fais , ni comment j'y suis arrivé.

L'odeur aseptisée m'indique que je me trouve dans un lit d'hôpital, et pourtant c'est comme si j'étais ailleurs.

Je me perds à nouveau.

Plus que de savoir où je me trouve ou si ce que j'entends et ressens est le simple fruit de mon imagination ou la réalité, tout ce qui m'importe c'est de savoir où est mon frère.

La même pensée m'assaille à chaque bref retour dans ce monde. Où est mon frère ? Où est Louis ? Pourquoi n'est-il pas près de moi ?

J'aimerais le demander à la personne qui me tripote le corps, sans gêne, et qui chantonne tranquillement alors que je me sens nu. Ce qui n'est peut-être pas qu'une impression quand je sens un drap me recouvrir lentement jusqu'à mi torse.

J'essaie d'attirer son attention.

J'aimerais hurler et attraper ce bras qui tient mon poignet, mais je n'y arrive pas.

Je commence à désespérer du peu d'effet de mes tentatives quand il sursaute brusquement, ses doigts se refermant brièvement sur mon bras.

Il tient ma main et j'entends sa respiration s'accélérer d'excitation.

Je l'entends me chuchoter quelques mots comme s'il avait peur de m'effrayer.

— Vous m'entendez, jeune homme ? Vous pouvez serrer mes doigts ?

J'aimerais lui répondre, mais j'en suis incapable.

Ma poigne sur son bras est faible, mais je m'y accroche comme à une ancre et finalement, je l'entends reprendre plus fortement.

— Bipez le Dr Baker, le patient de la 321 se réveille !

Je referme les yeux quelques secondes ou peut-être plus longtemps, je n'en sais rien. J'ai l'impression de flotter sur un nuage, mais aussi celle de m'écraser brutalement sur le sol.

Quelqu'un entre dans la pièce et le jeune homme s'éloigne, délaissant ma main sur le matelas ferme.

— Je vous ai bipé dès les premiers signes, docteur. Faut-il que je prévienne les parents ?

— Ils doivent déjà être sur la route, les heures de visite vont bientôt débuter, laissons-les arriver tranquillement.

Je papillonne des yeux et suis agressé par une lumière vive qui me fait grogner de mécontentement alors que des mains se posent sur mon visage et me forcent à les ouvrir.

— Pardon pour la lumière, je dois vérifier vos réflexes pupillaires. Grogner, c'est pas mal, mais j'ai besoin de voir si votre corps répond bien aux stimuli.

Je me concentre et essaie de faire ce que cette femme demande. J'ai l'impression que mon corps pèse une tonne et que ce qu'elle veut me demande un effort presque surhumain. Mais je finis par y arriver.

For your eyes onlyOù les histoires vivent. Découvrez maintenant