For your eyes only

Chapitre 17 : Memories

Une foule de silhouettes sans visage, et Louis, là, juste devant moi à un mètre tout au plus. Le visage lumineux et les yeux rieurs, il me contemple silencieusement.

J'essaie de faire un pas vers lui, mais je ne peux pas bouger, comme cloué au sol. Je tends le bras pour tenter de l'atteindre, de le toucher, de sentir la douceur de sa joue contre ma paume.

Et soudain tout s'agite, alors que j'allais frôler son visage du bout des doigts, la foule se met en mouvement éloignant brusquement son corps du mien.

La pulpe de mes doigts glisse brièvement sur son bras tendu dans ma direction, nos phalanges se crochètent un court instant avant de se perdre.

Je panique et sens le souffle me manquer alors que Louis continue de me regarder, serein, malgré la distance qui s'accentue entre nous, son sourire resté figé sur ses lèvres qui se mettent à bouger.

J'ai peur de ne pas l'entendre et pourtant, c'est comme s'il me murmurait ses mots à l'oreille, comme s'il était tout près de moi.

— Il faut que tu me laisses partir Tyler. Je vais bien. Tu dois recommencer à vivre.

L'obscurité se fait et je me retrouve assis dans mon lit, le corps ruisselant de transpiration alors que des frissons recouvrent l'entièreté de mon épiderme.

Une main sur mon cœur, je tente de reprendre mon souffle et y parviens au bout de quelques longues minutes.

Je me lève tremblant encore de cet étrange rêve, et me dirige le plus silencieusement possible vers la salle de bain.

La lumière crue m'éblouit et je me place face au miroir, les yeux encore à moitié fermés. Je me passe de l'eau fraîche sur le visage, les traits de Louis, souriant et apaisé, encore encrés sur la rétine.

Pourquoi a-t-il fallu qu'il utilise les mots exactes, prononcés quelques heure plus tôt, par ma mère, lors de notre discussion.

Cela faisait longtemps que je ne m'étais pas confié à elle comme ça, mais j'en avais besoin. Je pense que c'est cette raison qui m'a poussé à prendre l'avion sur un coup de tête pour me rapprocher de la seule famille qu'il me reste.

Je lui ai parlé de l'intervention, enfin surtout de Aaron et Lenny. Et puis d'un coup d'œil indiscret sur mon téléphone, elle a remarqué les messages d'Alexa, elle m'a demandé pourquoi je ne lui répondais pas, alors qu'elle avait l'air de s'inquiéter pour moi. J'ai donc décidé de lui parler de la jolie brune. Et du baiser.

Elle a presque sauté de joie, mais s'est vite ravisée, quand elle a remarqué mon air perdu. Elle a essayé de m'aider à comprendre pourquoi je l'avais embrassé, et pourquoi j'avais fui surtout, Alexa réagissant plutôt bien à mon geste semble-t-il.

Le souci, c'est que je n'ai aucune explication.

Je me sentais juste bien près d'elle, sa main enserrant doucement mon poignet. J'ai fermé les yeux, et enivré de son parfum léger, j'ai été pris d'une envie irrépressible de l'embrasser. Je ne sais pas ce qu'il s'est passé dans mon cerveau, mais avant que je ne prenne conscience de cette envie mes lèvres étreignaient déjà les siennes.

Et puis ma raison m'avait rappelé que s'attacher à quelqu'un s'était prendre le risque de souffrir et de faire souffrir alors j'étais parti, comme un enfant pris en faute, refusant d'assumer ses actes. Et je n'avais cessé de fuir depuis presque une semaine.

Ma mère m'avait alors dit cette phrase "Quand vas-tu recommencer à vivre ?"

J'avais seulement haussé les épaules, je n'avais pas de réponse à lui fournir et nen aurais peut-être jamais.