OFF COURSE

Chapitre 16

Allemagne 1950, la chaleur estivale n'était pas aussi éprouvante que les précédentes années, du moins dans son souvenir. Car à la fin de la seconde guerre mondiale, il mit fin à ses jours d'une balle dans la tête pour fêter l'Armistice, perdant ainsi son identité de puissant général allemand.

Avec les siècles, son apparence physique avait changé, il n'était plus un homme au teint basané aux origines exotiques, mais un homme charismatique à la peau blanche plaisant énormément à la gent féminine. Le voyage entre le monde des vivants et le Royaume des Ombres n'était plus un mystère pour lui, contrairement à ses compagnons qui mettaient plusieurs années à revenir à la vie. Ainsi la jeune Mana qui prenait presque une bonne cinquantaine d'années pour revenir parmi eux. D'ailleurs, en ce beau jour d'été, il veillait sur elle, la pauvre était touchée par le mal de résurrection. À chaque fois qu'ils revenaient à la vie, ils étaient atteints d'une forte fièvre ou d'autres maux divers.

— Je déteste être malade... se plaignit Mana alité. Ça m'apprendra à toucher à ce qui m'appartient pas.

— Oui, Mahad t'a bien réprimandé pour avoir porté la relique.

— M'en parlez pas Maître...

Mahad était revenu de Kul'Elna bien des années plus tard sans son Anneau du Millénium.

Il s'en fit déposséder une fois après avoir été poignardé par un homme dénommé Kura, un scélérat qu'ils affronteront encore et encore. Mais le fait de ne plus avoir la relique ne le priva pas de l'inconvénient de vivre éternellement.

— Je vais te laisser Mana, donc repose-toi bien.

— Merci Maître.

Avec une caresse sur la tête en guise d'au revoir, il s'apprêta à quitter l'hôpital, les mains au fond des poches. Il savait que chaque relique possédait des pouvoirs qui lui était propre, tous en rapport avec l'âme et l'esprit. Toutefois, il ignorait ce que le puzzle lui apportait réellement...

Dans l'allée menant à la sortie, un sifflement attira son attention, le sortant de sa rêverie. C'était une mélodie qu'il connaissait et que ses anciens alliés de guerre chantaient régulièrement.

Du japonais ?

Il se dirigea vers la voix, vit un jeune homme en chaise roulante qui admirait le jardin tout en sifflotant. Il ressentit immédiatement sa chaleur qu'il reconnut entre mille, Hedj. Enfin, une de ses réincarnations. Il s'arrêta et se mit à réfléchir, était-ce une bonne chose d'aller à sa rencontre ? Il l'avait évité pendant des siècles afin de ne pas bouleverser sa vie, alors il devait continuer sur cette voie.

— Monsieur ?

Son cœur bondit dans sa poitrine dès qu'il entendit cette voix, et il succomba aussitôt à la beauté des yeux qui le fixaient. Il resta sans voix face au sourire qu'il lui offrait. Rebrousser chemin lui était terriblement difficile...

— Monsieur ? répéta l'homme qui avait les yeux rivés sur lui. Vous allez bien ?

— Ah... hum, et vous ? Vous allez bien ?

— Vous dites ? dit-il en mettant sa main en coupe contre une de ses oreilles. Je n'entends pas très bien et je ne maîtrise pas bien votre langue.

Il leva ses mains et commença à signer.

— Et là ? Vous me comprenez ?

— Parfaitement, lui répondit-il de la même manière. En quoi puis-je vous aider ?

— Eh bien, je pense que c'est malpoli de ma part. Mais j'aimerais en savoir plus sur vous... Et je vous en prie, ne me demandez pas pourquoi.

— Et pourquoi donc ? l'interrogea l'infirme avec un léger rire ignorant volontairement sa faveur.