Chapitre 1

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Il sentait sa peau se déchirer, un liquide se refroidir sur son corps tremblant. Il était horrifié. Ses oreilles sifflaient, le faisaient souffrir et il ne prêtait plus attention aux cris de l'homme qui le retenait. Soumis, son corps était douloureux, le brûlait et le consumait de l'intérieur. Il avait été souillé, humilié et avait tout perdu...

Dans son cauchemar, il ressentait des fortes secousses et percevait des sons inarticulés. Il émergea et ouvrit subitement les yeux. Sa vision s'éclaircissait lentement, mais il reconnut le visage de son grand-père, inquiet.

— Yûgi, mon garçon, j'ai eu la peur de ma vie quand je t'ai entendu hurler !

— Excuse-moi grand-père, répondit-il en affichant un sourire forcé.

— Tu n'as pas à t'excuser, mais tu devrais m'en parler sa te-

— Tu entends ? Il pleut... je ne dois pas oublier mon parapluie, l'interrompit Yûgi toujours souriant.

— Hein ? Oui... je te laisse te préparer pour l'école alors...

Le vieil homme se dirigea vers la sortie et resta un moment dans l'encadrement de la porte. Les yeux posés sur son petit-fils qui lui souriait toujours, il comprit bien vite qu'il n'allait pas réussir à le dissuader et préféra partir, fermant la porte, vaguement inquiet. Une fois seul, Yûgi rassembla ses idées, il tremblait encore de tout son être. Sa respiration soulevait sa poitrine avec force et il transpirait à grosses gouttes. Il souleva ses draps pour vérifier s'il n'avait pas eu de fuite honteuse, heureusement pour lui, non. Dans le passé, ses cauchemars réussissaient à faire tourner quotidiennement la machine à laver, il en avait atrocement honte rien qu'en y pensant. Mais il était soulagé que cela ne soit plus le cas.

Il prit le temps de se calmer alors que la pluie battait à sa fenêtre et balaya sa chambre du regard. Elle n'était pas très grande, mais elle était remplie d'une petite collection de jeux et surtout d'instruments de musique couverts de poussière. Ses murs étaient tapissés de divers posters, depuis son manga favori jusqu'au groupe de musique du moment. Il y avait aussi sur le mur un parchemin, encadré, écrit tout en hiératique*. Yûgi se leva et s'en approcha de plus près... c'était l'héritage de son ancêtre d'après les dires son grand-père. D'ailleurs ce n'était pas le seul, il avait aussi reçu à sa naissance un pendentif cartouche avec une inscription peu lisible. Même son grand-père qui était dans sa jeunesse archéologue avait du mal à élucider le mystère de ces objets.

Maintenant remis de ses émotions, il était temps pour lui de se préparer pour l'école. Il prit une douche rapide, coiffa ses cheveux aux couleurs particulières, enfila son uniforme de lycée bleu par-dessus sa chemise blanche et mit son appareil auditif.

Il dévala les escaliers et récupéra son panier-repas préparé de la veille, en chantonnant. Il prit ses clés, salua une dernière fois son grand-père d'un signe de la main et une fois dehors, déplia son parapluie avant de se mettre en route. Pour un mois de novembre, les matinées étaient presque glaciales, surtout avec la pluie.

Mais Yûgi aimait ça...

Car pour lui, la pluie changeait radicalement sa vision du monde, elle rendait la foule de cette ville animée silencieuse et calme... la pluie l'isolait du monde extérieur. Il aimait particulièrement admirer ce paysage urbain qui émergeait d'une brume dense sous un ciel opaque.

Délecte-toi du murmure de l'eau, oublie mes pleurs,

Mire-toi dans ce paysage sombre semblable à mon cœur,

Écoute les murmures du vent, oublie ma voix,

La pluie est ma tristesse et mon désarroi...

OFF COURSEOù les histoires vivent. Découvrez maintenant