OFF COURSE

Chapitre 17

On dit qu'une âme voyage éternellement...

Même si son corps disparaît, l'âme recevra une nouvelle enveloppe charnelle.

Yûgi l'avait vu de ses propres yeux, admirant chacune des vies que son âme avait pu entreprendre. Comme un fantôme, il se tenait non loin de sa propre personne, assistant à la scène. Il avait pu rire, hurler et pleurer durant chaque existence de son « passé ». La rencontre avec Mao était bien son destin, il le savait désormais. Néanmoins, il lui était difficile d'appréhender tout cela correctement. Même si toutes ses vies étaient siennes, il ne les prenait pas en considération.

Il se frotta le visage de ses deux mains, passa celles-ci dans ses cheveux et replongea dans ses pensées en grimaçant. Mao... Pharaon maudit, mon amant... Il sentit ses joues lui brûler rien qu'en pensant à tout qu'il avait vu.

D'ailleurs, il venait tout juste de finir la contemplation de sa vie de soldat japonais. Il pouvait maintenant traverser la porte qui menait à sa chambre d'âme. Se dirigeant vers celle-ci, il jeta une dernière fois un regard à « Klaus ». Le voir ainsi le faisait énormément souffrir... Il aimerait tant le prendre dans ses bras et le consoler, sauf qu'il ne pouvait rien faire. Yûgi soupira une dernière fois et emprunta enfin la porte.

Il eut la sensation que quelque chose d'important manquait à ses souvenirs, une chose qui intéressait énormément Kura. À peine arrivé, il se fit questionner de façon énergique par cet énergumène qui parlait horriblement fort. Il était un ami de longue date, certes, mais il était différent...

— Alors ? Tu as vu quoi ?

— Hum... alors j'étais dans le lit avec...

— Pas tes histoires de boules ! l'interrompit-il énervé. Tu as vu Horakhty ou un autre de nos confrères ?

— Non.

— Bordel de... ! cracha-t-il avant de parler à nouveau correctement. Écoute, va à la prochaine porte.

Yûgi le saisit par le col et plongea son regard dans les yeux du garçon.

— Je n'ai pas d'ordre à recevoir de toi !

— Eh bien, ce voyage dans tes souvenirs t'a changé. Il y a quelque temps, tu n'osais même pas m'approcher ni même me regarder.

Kura disait vrai, Yûgi était toujours victime de ses peurs. Il n'était qu'un simple lycéen frêle, pitoyable et lâche... Il n'était pas Hedj, le prêtre qui avait survécu malgré un coup mortel, suivant ses convictions. Pas davantage ce soldat japonais qui avait quitté sa famille par dévotion pour son pays... Il n'était rien face à eux. Il expira un bon coup, lâcha Kura et posa ses yeux sur l'anneau du millénium.

— Ce pendentif appartient à Mahad, comment peux-tu l'avoir autour du cou ?

— Oh, je lui ai pris ! Je l'ai poignardé pour avoir ce trophée, déclara Kura joyeusement.

— Dis-moi en plus.

D'une voix joyeuse, il conta son passé. Disciple de la lumière, il avait tenté de fuir le soir de la grande catastrophe, pensant uniquement à sa survie contrairement à ses confrères. De fait, son acte fut puni, car il fut capturé et amené à Kul'Elna, sa ville natale. Le lieu de son enfance réduit en cendres remplit son cœur de désespoir et de haine. Traîné, puis mis à genoux comme tous les autres prisonniers, Kura ferma les yeux à chaque gorge tranchée pour ne pas voir le sang couler. Tremblant comme une feuille, il souhaitait que tout cela s'arrête au plus vite.

Soudain, la température chuta et des hurlements de douleur résonnèrent dans toute la pièce. Il ouvrit les yeux et vit les prisonniers ainsi que leurs bourreaux mourir en une fraction de seconde. Paniqué, il balaya les alentours du regard alors même que le Prince se métamorphosait en une bête difforme et sombre. Puisqu'il était toujours en vie, il décida de fuir du mieux qu'il pouvait, errant dans ce royaume, seul, sans rien.