Chapitre 6

207 26 10
                                    


– Au diable nos adieux

« Je n'ai d'yeux que pour toi »


Hiver 1815 – Birmingham, Royaume-Uni


Les flocons flottent dans la nuit couverte d'étoiles. Un temps parfait pour une fin d'année. Le violoncelle, mon instrument préféré, retentit dans la grande salle de bal du château. Nous donnons une réception avec toute la noblesse de la région pour officialiser mes fiançailles avec Ella.

La pièce est remplie d'hommes, de femmes, d'enfants et de parures. Le duc doit être au comble de la joie de se savoir à l'origine de toutes ces festivités. Nous buvons, mangeons, dansons, bien au chaud dans notre cocon alors qu'un des hivers les plus froids frappe notre pays à l'extérieur.

— Un peu de vin, monseigneur ?

Je me retourne vers Cara, ses yeux rient presque autant que ses lèvres.

— Vous commencez à être ivre et votre père est présent, fais-je remarquer.

— Mon père discute de finances avec le duc de Wellington, m'arrête-t-elle d'un revers de main. Il ne fera pas attention à moi avant demain matin, lorsqu'il se rappellera avoir une fille.

— Je croyais qu'il avait espoir de vous trouver un bon parti au bal.

Les yeux de Cara s'ouvrent de stupeur alors qu'elle se retourne vers le fond de la pièce, là où le comte Delevingne parlemente avec le duc de Wellington.

— Harold, il est si vieux !

— Arthur a déjà une femme, la rassuré-je, en souriant.

— Oh Dieu, soupire-t-elle, soulagée, en posant la main à son cœur.

— Quand bien même, vous pensiez réellement épouser un tel personnage ? Il finira probablement sa carrière à la tête du Parlement.

— Dites clairement que je ne suis pas assez bien pour lui, s'offusque-t-elle.

— Vous êtes bien meilleur que lui, rectifié-je. Le duc est un conservateur.

— Vous et votre famille l'êtes aussi, relève-t-elle.

— Les opinions peuvent changer.

— Vous devenez libéral ? s'étonne-t-elle.

— Vous parlez trop de politique, ça m'influence, ris-je.

Cara affiche un grand sourire avant d'attraper une nouvelle coupe de vin sur le plateau d'un domestique. Je la gronde du regard alors qu'elle me lance un sourire innocent.

— Je vais la garder à l'œil, m'assure Ella, en nous rejoignant.

— Vous êtes aussi ennuyeux ensemble que séparés, soupire Cara d'un air las.

Nous échangeons un sourire complice avec Ella tandis qu'elle attrape son amie par la hanche pour la mener à la salle de bains.

— Je vais m'occuper d'elle, je crois que votre père souhaiterait que vous fassiez des efforts de socialisation. Allez donc discuter avec nos invités.

Je soupire, mais acquiesce. Ella a raison. Mon père veut que je fasse bonne impression maintenant que je rentre officiellement dans la vie d'adulte.

Je me fraie un chemin dans la salle en les observant s'éloigner toutes les deux. Je suis ravi de savoir que Cara et Ella s'apprécient, ce sont les seules personnes avec lesquelles je me sens proche depuis que Louis est sorti de ma vie.

Après minuitOù les histoires vivent. Découvrez maintenant