Chapitre 7

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– Fais-moi une place

«Je voudrais que tu oublies le goût du malheur »


Hiver 1815 – Birmingham, Royaume-Uni


Je pousse les portes de la maison close avec un sourire bête peint sur mon visage. Un sourire que je n'arrive pas à empêcher depuis la nuit dernière.

Je me suis réveillé à l'aube, Louis dormait encore. Je lui ai laissé une note et me suis éclipsé pour rentrer au château. Il était préférable que mon père ne découvre pas que j'ai découché. Ma matinée a été ennuyante à mourir alors j'ai prétexté une balade en forêt avec Belzébuth pour quitter notre domaine. Je me suis presque retenu de ne pas courir jusqu'ici. J'espère que Louis est toujours dans sa chambre. Je me rappelle qu'il avait le sommeil lourd lorsque nous étions à Vienne.

Je m'avance vers la maîtresse de maison. Amanda esquisse un sourire en m'apercevant.

— Déjà de retour, joli cœur ?

— Louis est sorti ? l'interrogé-je.

— Tout à l'heure, oui.

La déception doit se lire sur mon visage car elle éclate d'un rire gras en passant une main dans ses cheveux qui le sont tout autant.

— Il va vraiment falloir que tu apprennes à retenir tes émotions. Tu es un livre ouvert.

— C'est un problème ?

— Bien sûr que ça l'est, rétorque-t-elle. Les gens se joueront de toi.

— Pourquoi le feraient-ils ?

Elle m'observe sans répondre, comme si elle se demandait à cet instant pourquoi elle pense autant de mal des hommes. Mais la réponse à cette question doit lui revenir à l'esprit, puisqu'elle reprend, presque triste de devoir l'admettre :

— On ne peut être blessé par quelqu'un que parce qu'on lui faisait confiance, non ? Alors si y a autant de gens blessés, dans ce monde, c'est bien que personne n'en est digne, de cette confiance.

— Vous êtes comme Louis, vous ne croyez pas que les hommes peuvent être bons, constaté-je.

Amanda soupire en lançant un regard las tout autour d'elle.

— Moi, je dis que personne n'est parfait. Pas même votre Louis. Il n'a jamais été tendre avec cette pauvre gamine.

— Ella ?

La femme opine de la tête.

— Il était malheureux. Donner son amour à Ella était vécu comme une trahison envers sa sœur décédée.

Amanda m'écoute, presque étonnée de mon raisonnement.

— Faites attention, ajoute-t-elle simplement.

— À quoi dont ?

— À ne pas trop excuser les hommes, vous oublierez qui ils sont.

— Qui sont-ils ?

— Des êtres solitaires, répond-elle naturellement.

— Mais nous vivons en société, relevé-je.

— Rien n'est plus seul qu'un homme qui vit en société. Il est confronté à tout ce qu'il ne pourra jamais être.

— Et qu'est-ce qu'il ne pourra jamais être ?

Après minuitOù les histoires vivent. Découvrez maintenant