Chapitre 1

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Décembre 2056.

Aéroport international Maiquetía Simon Bolivar – Venezuela.

Sur le tarmac, les rayons brûlants du soleil venaient faire fondre l'asphalte. Sur les pistes, les décollages étaient temporairement suspendus et seuls les atterrissages des compagnies étrangères venaient accompagner le bruit des valises à mains que trainait un petit groupe. Une trentaine de personnes, toutes habillées des marques les plus prestigieuses, se ruait vers le seul avion qui avait été autorisé à décoller de la matinée. Pour cette faveur, une somme avoisinant le million de dollar avait dû être déboursée, autant dire une broutille dans le budget pharaonique de l'organisation. Dans les terminaux, plusieurs silhouettes noires s'agglutinaient aux vitres et salivaient d'envie d'être parmi l'un des trente.

« Ah la plèbe... Vous verrez, cet engin est une pure merveille ! Vous y êtes déjà monté ?

— Jamais, répondit Altaïr. »

Pour tout dire, peu d'hommes au monde avaient pu séjourner à bord d'une croisière aérienne solaire. Certes, le prix en était la principale cause. Le montant nécessaire, d'environ cinq millions par tête, était inconcevable pour n'importe lequel des dix milliards d'humains sur Terre. Il fallait également compter les délais d'attente qui s'allongeaient en années, ce qui donnait une idée du poids de l'organisation qui s'offrait ce luxe chaque mois de décembre.

« Le Soleil est unique, vous savez ! »

Altaïr regrettait cependant son nom si commun, alors que l'engin était si extravagant. Car effectivement, il n'avait jamais rien vu de tel durant les six dernières années. Ni même de toute ma vie d'ailleurs !

La structure du géant des airs était tout simplement grandiose. Un large tronc formait la partie principale de l'appareil, nommé – simplement là aussi – le salon. Le tronc se terminait à l'avant par un nez commun à tous les autres avions fonctionnant au kérosène, à ceci près que la cabine des pilotes était entièrement vitrée. À l'arrière, sa structure finissait en une courbe élégante dressée vers le ciel. Le salon disposait d'un bar, d'une cuisine, de plusieurs tables de billard et de jeux, d'une petite piscine-jacuzzi et même d'une antiquité hors de prix : un juke-box américain qui datait du siècle dernier. Évidemment, avec de tels aménagements, le Soleil ne pouvait accueillir qu'une trentaine de personnes tout au plus, quand bien même sa taille était équivalente à celle d'un avion de ligne.

De chaque côté, quatre ailes donnaient accès aux suites privées et suspendaient chacune quatre hélices à moteurs électriques. Les deux ailes les plus proches du nez étaient plus longues que les deux autres, mais leur construction était similaire. Elles aussi étaient entièrement vitrées, mais leurs parois pouvaient s'assombrir pour préserver l'intimité des quelques privilégiés qui y dormaient. Il parut à Altaïr que les deux ailes les plus longues donnaient accès aux suites les plus grandes tandis que les deux autres offraient moins d'espace. Pas de quoi se plaindre non plus...

C'est sans doute pour toutes ces raisons que l'homme qualifiait le Soleil d'unique. Peut-être aussi parce qu'il l'est vraiment, au sens propre, pensa Altaïr. Conçu par la société américaine Solar Destiny, il était effectivement le seul exemplaire de la sorte sur la planète, à tel point qu'une poignée de pilote seulement pouvait le faire décoller. D'après les rumeurs, le président américain et son homologue vénézuélien y avaient séjourné avec leurs familles respectives le mois dernier, pour y discuter énergies et matières premières. Peut-être ont-ils égaré leurs codes nucléaires autour de quelques verres de trop...

Quand il entra dans sa chambre – la n° 7 – il ne trouva aucun code. En revanche, un lit souple et large trépignait d'impatience de le voir lui sauter dessus, tout comme la femme nue qui y était allongée.

L'Ordre de JanusWhere stories live. Discover now