L'Ordre de Janus

Chapitre 14

Luxurious Center, discothèque Helsinki, 82e étage de la North Tower – Doha, Qatar.

Rylad était debout devant un petit bar, dos tourné à Altaïr qui s'était affalé dans le siège confortable.

« Tu veux boire quelque chose ? J'ai un peu de whisky.

— Va pour ça. »

Elle servit deux petits verres cubiques et y inséra dans chacun un glaçon. Elle en posa un sur son bureau devant Altaïr et garda le sien dans la main tandis qu'elle prenait place sur son fauteuil. Les deux sirotèrent en silence une gorgée du délicieux breuvage qui leur brûla furtivement les tripes. Altaïr reposa son verre.

« Qui est-ce ? demanda-t-il en désignant le panonceau qui indiquait Aaliyah L. sur le bureau.

— Mon nouveau nom. Quoi ? »

Elle avait changé, elle n'était plus la prostituée fragile des bas-fonds de Melting Pot qui offrait son corps à quelques flics ripoux. Environ quatre mois s'étaient écoulés depuis la dernière fois où elle lui avait tiré dessus, et elle paraissait si différente.

— Rien, répondit Altaïr. Tu sembles... différente, ici.

Elle était habillée d'une jupe souple jaune et d'un t-shirt brun, recouvert d'une veste courte marron qui semblait être faite en peau d'agneau. Altaïr ne savait pas si c'était l'effet du maquillage, beaucoup plus discret qu'auparavant, mais elle était d'une beauté éclatante. Son regard avait changé, il n'était plus craintif, mais sûr de lui. En revanche, ses yeux le regardaient toujours avec insistance, ses sentiments ne paraissaient pas avoir changé. Notons tout de même que c'est avec les mêmes yeux qu'elle m'a tiré dessus...

— Ton fric m'a un peu aidé, avoua Rylad. Toi aussi, tu as changé.

— En quoi ?

— Je ne sais pas comment le dire, avoua-t-elle, un peu triste...

Altaïr opina du chef.

— Mais tu t'en es sorti aussi, apparemment, reprit-elle.

— Non sans mal.

— Grâce à moi...

— Et par ta faute. »

Cette dernière remarque la fit sourire et elle reprit une gorgée pour se contenir. Altaïr repensa à Tirhus, enfin à ce qu'il en restait. Il pensa aussi à Amberson...

« Comment m'as-tu retrouvé ?

— Toi avant, interrompit Altaïr, si tu le veux bien. Comment savais-tu que je te retrouverais ?

— Je n'en savais rien. J'espérais, c'est tout. Je me suis dit que tu progresserais rapidement dans ton travail, c'est ce que tu voulais.

— Hum.

— Et qu'ensuite, tu aurais suffisamment d'argent pour venir ici. C'est le cas visiblement, non ?

— C'est plus compliqué, mais oui. »

Elle se contenta pour le moment de cette réponse énigmatique. Elle y reviendrait à coup sûr un peu après.

« Et donc, comment m'as-tu retrouvé mon chou ?

Mon chou ?

— La Finlande, je n'y ai jamais cru. Partir de Doha pour arriver à Helsinki... Non, et puis le fric que tu m'as volé...

— On s'était accordés sur la somme.

— On s'était surtout accordés sur ton boulot qui méritait cette somme. Bref, avec ce fric, tu pouvais te payer un aller simple en seconde classe, d'accord. Tu aurais pu aussi t'offrir une nouvelle vie, sans doute. Rien de bien luxueux, mais...