Chapitre 16

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Étendu dans la piscine de coton de la salle de réception du Big Slide, au 50e étage, Altaïr reprenait peu à peu connaissance. Un batteur dopé aux amphétamines de guerre semblait s'être niché à l'intérieur de son crâne et frappait avec intensité des cymbales. La peau de ses jambes lui brûlait à tel point qu'il vérifia si son pantalon n'était pas parti en fumée et qu'il ne s'était pas transformé en short. En revanche, étonnamment, excepté un poignet douloureux, ses membres supérieurs ne lui faisaient pas mal. Pas trop.

Ses yeux ne mirent pas de temps à voir la silhouette du colosse dans son costume noir. Dans cette salle remplie de coton, dont l'une des parois du mur était vitrée et donnait vue sur les flots aériens des bolides multicolores, le contraste était saisissant. Altaïr entendit la fin de la conversation que le porte-flingue avait avec son patron, Emiliano Farletti.

« ... il se réveille. Je... Non, je n'ai vu personne, mais j'ai son portable. Il y a des messages qui parlent de vous. Je pense que quelqu'un d'autre vous suit... C'est possible. Ok. »

Ils ne connaissent pas Rylad, ils ne savent pas qu'elle est dans le coup. Mais il faut que je m'occupe d'Hercule et que je la contacte ensuite, pas de temps à perdre ! Le colosse explosa en mille morceaux contre un mur le portable d'Altaïr, dont les restes se perdirent dans tout le flot blanc et filandreux. Bon, pour la contacter, je me débrouillerai autrement. Une piscine de coton d'au moins deux mètres d'épaisseur s'étendait sur une quinzaine de mètres et n'avait qu'un seul rebord, menant à la sortie.

Hercule hissa Altaïr assis contre un mur, sur le rebord à côté de lui, puis il le gifla violemment pour lui raviver l'esprit. Cela fonctionna et la première chose qui tritura Altaïr était de savoir comment la poussière de coton ne venait pas les gêner pour respirer. Il vit alors sur les murs plusieurs systèmes d'aération qui ventilaient la pièce : l'air intérieur était expulsé au-dehors de la tour tandis qu'à l'inverse, l'air extérieur était impulsé dans la grande salle. D'ailleurs, derrière la grande baie vitrée, Altaïr vit des minuscules amas de poussières blanches disparaître au gré des vents. Il n'eut pas plus le temps de s'extasier devant ce système ingénieux, car il reçut une seconde gifle. Celle-ci, c'était pour le bon plaisir. Ce que je conçois totalement.

« Alors cette descente ? demanda Hercule, debout devant lui sur le rebord.

Il avait une voix rauque, celle d'un homme qui avait des filtres à cigarettes à la place des dents.

— Mouvementée, répondit Altaïr. Amnésique aussi.

Hercule lui envoya une nouvelle droite dans la tempe.

— Pour soigner l'amnésie.

— Pas la peine, peina Altaïr, je me souvenais de la première avant de descendre. Je ne me souviens juste pas de la descente en elle-même.

— J'en suis peiné, ironisa Hercule.

— Moi aussi 'vieux. Ça coûte un bras cette connerie en plus. »

Le grand homme s'assit à côté.

« Suivre mon boss risque aussi de te coûter un bras, Altaïr... Petit contremaître de mes deux. Un peu plus qu'un bras même... Pas étonnant qu'il voulait te virer.

— Pourquoi il ne l'a pas fait ? nargua Altaïr, sachant que Farletti n'avait pas eu la possibilité de choisir qui virer entre lui et Amberson.

Il se fit gifler à nouveau. Bon, il y a plaisir et plaisir. Il va falloir se détendre, sans quoi je pourrais devenir incontrôlable. Je l'ai déjà été dans les airs en pilotant. Alors moi, ça m'amuse, hein, de foutre le boxon. Mais les autres sont plus perplexes généralement, d'où mon besoin de travailler dans la discrétion. Il se questionna à propos de cette dernière pensée, doutant un peu que discrétion et accident mortel dans l'un des endroits les plus luxueux au monde aillent de pair.

L'Ordre de JanusWhere stories live. Discover now