Chapitre 14 : Interventions

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Le soleil a atteint son zénith depuis plusieurs heures mais il pleut à verse. La météo n'annonçait pas un torrent pareil pourtant. Je viens de finir mon service au restaurant et je me dirige vers mon domicile. C'est à ce moment qu'une vibration fait bouger la poche de mon manteau. Avec un parapluie à la main, je l'atteins. En le regardant, un sourire se dessine sur mon visage. Komatsu a maintenant pris l'habitude de m'envoyer des photos de ces plats. L'une des images attire mon attention. C'est le fruit que nous avons récolté. Il l'a fait en quartier et il repose sur une mousse jaune et des petites baies donnent de la couleur au plat.

- Ça semble délicieux, Komatsu dis-je tout en écrivant mon sms.

Rangeant mon portable rapidement dans ma poche, je ne regarde pas devant moi et finis par bousculer une personne. C'est Sirine.

- Ha je suis désolée Emeline. Je ne regardais pas où j'allais.

- Ça ne fait rien, à vrai dire moi non plus.

La remarque nous fait rire. Je propose à Sirine de venir s'abriter sous l'une des entrées de la rue. La pluie continue de tomber sans qu'on en voie la fin. Cela faisait un moment que je ne l'avais pas vu. Je lui demande donc des nouvelles. Elle me raconte les différentes courses qu'elle fait pour ses supérieurs et n'hésite pas à casser du sucre sur le dos.

- J'ai vraiment l'impression d'être une esclave et je ne te parle même pas des fila..., dit-elle avant de se mettre la main sur la bouche.

- Tu suis quelqu'un ?

- Non ! Enfin ou ... Plus ou moins.

Avant que je ne puisse dire quoique ce soit, elle me salue en courant sous la pluie. Je lui crie de faire attention à ne pas tomber, mais avec le bruit de la pluie doublé de ceux de la ville, elle n'a pas dû entendre. Je reste un moment sous l'entrée, plusieurs personnes s'y sont aussi réfugiées. L'averse dure encore 15 bonnes minutes avant de laisser passer quelques rayons de soleil. J'en profite pour reprendre ma route.

Au moment où je ferme la porte d'entrée, mon téléphone vibre. Un numéro inconnu s'affiche sur mon écran. Interloquée, je décroche et porte l'appareil à mon oreille.

- Allô ?

- ...

Je regarde mon appareil, la minuterie continue de défiler, signe que la communication est toujours active. Je remets le téléphone à mon oreille et tente une dernière fois de faire réagir mon interlocuteur. Cette fois-ci, j'entends quelque chose. Une respiration. Seulement des expirations régulières mais lourdes, comme si la personne était stressée. Je préviens une dernière fois avant de raccrocher.

- Vraiment très étrange.

Après avoir posé mon téléphone sur la table du salon, je commence à préparer mon repas. Komatsu m'a donné quelques recettes par textos. Mamie Setsu m'a, quant à elle, donné quelques épices. Ils sont d'avis, sans savoir que l'autre a fait la même proposition, que je devrai essayer de mon côté.

- Et je suis entièrement d'accord.

Je fais plusieurs mélanges avec d'autres produits trouvés en magasin et le résultat n'est pas concluant. Assise à table, je regarde la pile d'assiettes. J'ai eu des picotements sur la langue durant les plats sucrés, comme d'habitude, mais presque rien sur le reste. Je n'ai pas encore essayé toutes les combinaisons données par le chef mais pour ce soir ça ira.

- J'ai peut-être un peu trop forcé sur le nombre de plats. Je ferai mieux de faire une petite balade nocturne pour digérer tout ça.

Chose dite chose faite, en peu de temps, je m'habille pour sortir. Le soleil commence à peine à descendre à l'horizon. Fermant la porte, je me fais à l'air frais. Cette pluie est bien passée. On distingue bien les nuances de couleur du coucher de soleil. Les gens sont encore dehors à cette heure. Gourmet Town est une ville où on ne s'arrête pas de manger ou on ne s'arrête pas tout court. Pendant une bonne demi-heure, je fais le tour du centre-ville. Je passe par une petite rue pour faire demi-tour seulement un cri lointain résonne dans la rue parallèle puis une imposante silhouette atterri en force devant moi. Je couvre mon visage. Un nuage de poussière m'empêche de voir qui est l'imbécile qui s'amuse à effrayer les passants. Soudain je me fige de frayeur devant l'individu devant moi. Avec une longue tignasse grise, son corps est aussi gris et d'énormes yeux me fixent.

Une vie gourmande (En Pause)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant