L'agrafe

11

Elle reste muette.

— Hé, Lou...

La brune lève la tête, encore confuse.

— Je suis pas sûr hein. J'ai juste entendu vite fait ton nom, et peut-être que j'ai mal entendu la phrase vu que j'étais bourré. Mais y a moyen que ce soit vrai.

Louna croise son regard, inspecte dans ses yeux la lueur de vérité qui s'en dégage. Elle ne sent plus rien tout à coup. Si elle plaît à Raphaël, qu'est-ce que ça change au fond ? Noé lui plaît et l'amitié persiste pourtant. Ce ne sont que des mots. Où sont les gestes ? À quoi ça sert de savoir si cela est vrai ou faux.

L'amour lui paraît toujours aussi fictionnel.

— Il te plaît ?

Elle n'a pas envie de parler d'histoires de cœur avec celui qui fait battre le sien. Elle n'a pas envie de lui faire croire qu'elle n'est attirée par personne alors que tout son être vibre pour lui, à cet instant précis.

— Non, souffle-t-elle tristement.

— C'est dommage, vous iriez bien ensemble.

Noé est tellement ailleurs qu'il ne réalise pas à quel point ses mots viennent de creuser l'entaille de son cœur.

Il ne se verra jamais avec elle. Et... elle ne se voit qu'avec lui.

— Fin... t'aimes les mecs ? ou les filles ?

— Les mecs, répond-elle machinalement.

Pourquoi parler de ça ? Louna ne veut pas de lui en conseiller et panseur des peines de cœur. A-t-elle l'air si désespérée ? Ils ne parlent jamais des sentiments de la brune, toujours des siens. Alors qu'est-ce qui a changé aujourd'hui ?

— Pourquoi cette question ?

— Je sais pas, on sait jamais, je veux pas t'imposer une orientation alors que j'en sais strictement rien, conclue-t-il simplement.

Elle lui sourit tout de même, trouvant cette attention estimable.

— Hé, lance-t-il en se tournant vers elle.

Il lui sourit d'un air contrit.

— T'as l'air toute mélancolique.

Et elle l'est, au plus profond d'elle-même.