Son ancienne vie allait terriblement lui manquer.

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Shoto regarda le portail. Il n'avait qu'un geste à faire pour arriver chez lui. Enfin, la maison de son père.
Il regarda longuement le portail. Vert. Bizarrement, il avait peur. Mais pas la peur qu'il arrivait à refouler. L'angoisse. La crise de panique. Celle qui l'empêche actuellement de poser sa main sur le portail et de l'ouvrir comme une personne lambda le ferait. Shoto regarda la route derrière lui. Il pouvait encore faire demi-tour. Le lycée n'était pas si loin que ça. En quelques minutes il était de retour dans sa chambre. Et Katsuki ne devrait pas tarder non plus.
Shoto secoua la tête. Il devait savoir. Alors avec un immense courage, il poussa le portail pour entrer dans l'enceinte de la maison. Elle était typiquement japonaise, avec du bois vert et un jardin autour. C'était jolie. Mais Shoto en avait peur. Il trouvait les arbres terrifiant, la maison hanté, le menaçant de toute part. Shoto sentit ces jambes trembler, comme ces mains. Il n'avait plus aucun contrôle sur son corps. Il restait immobile devant cette grande et terrifiante maison. Shoto voulait fuir, partir rapidement d'ici et retrouver les bras chaleureux de Katsuki. Mais il se devait de voir ne serait-ce que l'entrée de cette maison pour peut-être avoir des souvenirs qui lui reviendront.
Alors il se mit à faire un pas.
Il regarda la terrifiante bâtisse.
Puis un autre.
Il se disait que le portail était encore ouvert.
Un troisième.
Katsuki l'attendait sûrement au lycée.
Un quatrième.
Il devait encore finir son bento.
Un cinquième.
Il aurait tellement préféré être dans son lit devant une émission un peu pourrie.
Un sixième.
Juste se changer les idées et voir la vie des autres.
Un septième
Leurs vies beaucoup mieux que la sienne.
Il était devant la porte.
Shoto ne pouvait plus avancer, ni reculer. La porte était d'un bois vert, grande, imposante, semblant très lourde.
Il la regarda longuement. Malgré son allure angoissante, elle était très jolie, cette porte. D'un camaïeu de vert, tantôt foncée, tantôt plus clair, avec des petites taches marrons qui révèlent le bois sans peinture. La poignée était jolie aussi. Elle réfléchissait le monde tel un miroir, avec juste quelques petites taches grises qui laissait apparaître sa vieillesse. Shoto la trouvait, malgré son allure monstrueusement flippante, elle était très jolie. Comme l'ensemble de la maison. Il faut juste deux mots pour tout décrire : jolie et terrifiante.
Shoto mit lentement sa main sur la poignée. Elle ne renvoyait plus rien, cacher. Shoto respira un grand coup. Une odeur bizarre se dégageait de l'intérieur de la maison. Shoto baissa la poignée. Il devait ouvrir cette porte, ne serait-ce que pour savoir qui il était.
La porte s'ouvrît.
Shoto regarda l'entrée plongée dans le noir. L'odeur se fit plus présente. Une lourde odeur de fer. Shoto mit sa main devant sa bouche pour éviter de vomir le contenu de son estomac. Il voyait des taches rouges partout. Une fois elles étaient juste devant lui, la seconde d'après elles sont ailleurs, puis elles revenaient dans son esprit. Des cris arrivèrent à lui. Des cris de douleur, de peur, de désespoir. Il entendit ces os craqués, une ombre le surplombé, sa voix qui criait. Il se voyait se débattant sous les coups de cet homme imposant qui était son père. Il se sentit perdre l'équilibre en se souvenant de la cave insonorisée sous ces pieds.
Ce fut trop. Il ferma la porte et courir jusqu'au lycée. Ses larmes dévalaient sur ses joues à une vitesse hallucinante. Ces jambes fuyaient cet endroit maudit. Il devait se réfugier rapidement car il avait enfin compris ce qu'il s'était passé.
Son père l'avait battu. Très récemment et plusieurs fois. Il savait dès à présent que plus jamais il arrivera à être tous seul aussi longtemps. Qu'il ne dormira plus jamais la fenêtre ouverte le soir. Qu'il aura toujours peur en ouvrant une simple porte.
Que son ancienne vie allait terriblement lui manquer alors qu'il ne s'en souvenait pas.

Shoto se dirigeait vers son lycée sans faire attention aux personnes autour de lui. Il se souvenait. Il devait absolument en parler à quelqu'un. Katsuki. Où est-il ? Aizawa. Il doit faire cours. All might ? Oui peut-être dans la salle des profs.
Il passa rapidement l'immense portail de UA, et sauta les marchés des escaliers pour arriver le plus rapidement devant la salle des profs. Il l'ouvrit sans prendre la peine de toquer et chercha du regard quelqu'un qui pourrait l'aider. Il vit le proviseur Nezu le regarder bizarrement avec son café en main.

-Todoroki ? Que se passe t il ?

-Monsieur!! Je... je me souviens!! Je sais ce que mon père m'a fait!! Je me souviens de beaucoup de choses!!

Nezu posa sa tasse et l'invita à aller s'asseoir dans le canapé. Shoto était essoufflé et tremblait légèrement dû à l'effort de sa course.
Le proviseur le laissa reprendre son souffle tandis qu'il lui faisait couler un thé.

-Ne t'inquiètes pas, prends ton temps pour reprendre ton souffle. Nous ne sommes pas pressés mon garçon, prends le temps de remettre tes idées au clair en buvant un bon thé bien chaud.

Shoto regardait la petite table en face de lui et vit une tasse remplit d'un liquide orangée devant lui. Il le prit et sentit l'odeur.

-C'est un roïbos aux épices, en espérant que ça va te plaire.

Shoto regarda le liquide bouger suite à son corps et sa respiration encore irrégulière. Il avala sa salive et but quelques gorgées du thé. C'était bon. Il sentit le liquide chaud passer dans son œsophage et le réchauffer petit à petit. Shoto regarda la tasse, plus détendu. Il l'a serra doucement dans ces mains et regarda le proviseur.

-Mon père m'a battu.

Il n'arrivait pas à développer. Il vit Nezu hocher la tête.

-Je m'en doutais un peu, mais j'aurais préféré avoir tort.

Shoto le regarda un peu surpris et confus.

-Comment pouviez-Vous savoir que le coupable de mes blessures était lui ?

-Tu dois certainement le savoir, mais normalement tu avais changé de lycée pour devenir un héros plus rapidement.

Shoto hocha la tête. C'était l'une de seules informations qu'il avait pu recevoir.

-Le proviseur de l'établissement m'a contacté un mois après ton départ. Il m'avait demandé si tu n'était pas revenu car même si tu étais inscrit, tu n'étais jamais présent en cours ni à l'internat. De plus, une demande de desinscription avait été reçu à ton nom et surtout plus personne n'avait de tes nouvelles.
En conclusion, la dernière fois que l'on t'avait vu, c'était lors de ton départ de UA, dans la voiture de ton père.

Une vie à reconstruireOù les histoires vivent. Découvrez maintenant