La Danse des Royaumes - T1 : La Vengeance de l'Impératrice

Chapitre 1 : Toman

Ile Giantos, an 319 après la Grande Révolution

Il devait être bientôt midi lorsque Toman Rohr et ses camarades arrivèrent, sur leurs hippogriffes respectifs, à l'île Giantos où demeurait le peuple des géants. Un grand défi les attendait : ils devaient survivre et négocier avec les insulaires.

Toman avait survolé le territoire de Rohr depuis Geiburg, la capitale, sur le dos de Cavil. Comme tous les hippogriffes, il possédait le corps d'un cheval et la tête et les ailes d'un aigle mais il se distinguait par ses grandes ailes et ses muscles surdéveloppés. Son pelage blanc et ses plumes bleu ciel faisaient également tâche parmi les autres hippogriffes qui étaient de couleur beaucoup plus sombre. Le jeune prince le montait depuis son plus jeune âge et il ne l'avait quasiment jamais quitté. Il le considérait comme une véritable partie de lui-même et se sentait plus proche de cette créature que de beaucoup de ses amis. S'il lui arrivait malheur, il serait dévasté.

Il avait emmené avec lui quatre soldats qu'il connaissait plus ou moins. Il y avait Boris Mygrin, son meilleur ami. Il le cotoyait depuis longtemps et avait même grandi à ses côtés car il s'agissait du fils du Général de l'armée royale, Mison Mygrin. C'était un jeune homme bienveillant et digne de confiance mais c'était surtout, à l'instar de son père, un combattant redoutable et un formidable épéiste. A ses côtés, Toman se sentait en sécurité. Pourtant, d'apparence, Boris ne faisait peur à personne. Plus petit que la moyenne, plutôt maigre, seuls son regard vif, sa grande mâchoire et sa cicatrice à la joue gauche trahissaient son tempérament de guerrier.

Les trois autres avaient été choisis par Mison pour l'accompagner dans sa mission. Ils s'appelaient Pyk Hullien, Ridan Aregel et Aldwig Menesc. Le seul que Toman connaissait déjà était Ridan. Il l'avait rencontré lorsqu'il avait accompagné Boris et d'autres soldats lors d'une virée dans une auberge de la ville. Ridan était un homme franc et loyal. Toman savait également qu'il pouvait compter sur lui. C'était tout l'opposé de Boris. Il était grand, robuste et imposant mais il ne possédait pas un dixième de son talent épée en main.

Lorsqu'il avait aperçu au loin l'île Giantos depuis le ciel, le prince avait sorti de son petit sac un grand drapeau blanc. Il ne voulait absolument pas que les habitants de l'île se sentent menacés par l'arrivée de soldats rohriens. Il était peu probable qu'une tribu de géants se sente à un quelconque moment en danger à la vue de cinq soldats de la taille de leur bras mais son père, le roi Tran II, lui avait appris l'art de la diplomatie et les géants n'en étaient pas exemptés.

C'étaient des créatures dotées d'une intelligence humaine qui, autrefois, régnaient sur le territoire d'Opewaldia et sur le Sud de Rohr. C'était avant la Grande Révolution survenue trois siècles auparavant et la prise de pouvoir des hommes. Après leur victoire face aux géants, les trois grands chefs de la rebellion humaine - Rohr, Opewaldia et Wahtaarm – se partagèrent le Continent du Monde et décidèrent d'épargner les géants qui avaient survécu et de les exiler sur une île déserte désormais nommé Giantos. Depuis lors, plutôt que de chercher à se venger, les immenses créatures avaient préféré accepter leur sort et avaient construit une véritable civilisation indépendante des royaumes du Continent. 

Avant de descendre se poser sur la plage au Nord-Est de l'île, Toman s'arrêta quelques instants pour apprécier la vue. Entre la vaste forêt sauvage qui occupait la grande partie du territoire et la magnifique plage qui bordait la mer, une magnifique cité avait été construite par les géants. Elle était composée de plusieurs dizaines de gigantesques maisons en bois qui encerclaient trois bâtiments imposants mesurant chacun plus de cinquante mètres de hauteur. Le prince de Rohr était impressionné : les géants avaient réussi à faire d'une ile déserte un formidable lieu de vie où les habitants, imaginait Toman, devaient être très heureux. Il aurait pu rester des heures à contempler le paysage mais malheureusement, il avait une mission à accomplir.