CHAPITRE 1

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Depuis sa chambre, Jeno avait directement vue sur la mer, et avec la fenêtre ouverte, l'air salin venait chatouiller ses narines. A tel point qu'il éternuait toutes les deux minutes, risquant à chaque fois de lâcher ce qu'il avait entre les mains.

Sa chambre n'était pas plus grande que l'ancienne, mais elle était très cocooning. Une mansarde au-dessus de son lit lui apportait un sentiment de réconfort, comme s'il entrait dans une cachette pour dormir ; à côté, une table de chevet et une grande armoire, en face une commode. Un bureau fonctionnel prenait place à côté de la grande fenêtre, qui n'avait pas encore de rideaux.

Le rangement fut assez rapide. Il n'avait pas beaucoup de vêtements : l'armoire était aux trois quart remplie et la commode vide. Il décida donc d'y ranger son immense collection de CDs héritée de son oncle qui était parti à l'étranger, dans le premier tiroir, et dans les deux autres toutes ses affaires de dessin. Celles-ci occupaient bien trois cartons, entre les différentes sortes de papier, et les crayons, crayons de couleur, fusains, pastels, peintures qui s'étaient déversés de leurs boîtes respectives en créant un ''joyeux bordel''. Passée la fantaisie, il s'attaque à son bureau : ses affaires pour la rentrée étant encore à acheter, il rangea celles de l'année précédente qui avaient été peu utilisées. Il disposa des livres et son ordinateur avec un post-it où étaient écrits des sites de soutien pour revoir un peu le programme avant la rentrée.

Quand tout fut bien ordonné, il prit tous les cartons (tous pliés dans le plus grand), et descendit au rez-de-chaussée, où une bataille faisait rage. Il vit sa mère tirer sur le papier bulle qui la séparait du vase qu'elle avait rapporté d'un voyage au Japon. Il resta bouche bée devant cette vision : ses cheveux ressemblaient étonnamment à la paille que l'on mettait aux épouvantails, son visage avait viré au rouge cramoisi, tous ses muscles étaient tendus et elle se cambrait en arrière, comme si elle essayait de retirer Excalibur de sa prison minérale. Quand elle poussa un long cri étouffé, Jeno se réveilla soudainement et se précipita pour l'aider. Mais c'est ce moment que choisit son père pour apporter son aide : avec la paire de ciseaux qu'il cherchait depuis un petit moment, il coupa le ruban de scotch qui retenait le papier bulle.

Jeno arriva alors juste à temps pour se faire écraser à terre par sa mère qui tombait évidemment à la renverse après que la résistance a disparu. Un peu à l'ouest après le choc, Jeno entendit un rire franc exploser dans le hall d'entrée, couvrant les grommellements de sa mère. Après avoir repris son souffle et essuyé les larmes qui perlaient aux coins de ses yeux, le père de Jeno vint les aider à se relever.

-Bon, et si on reprenait le déballage demain ? proposa-t-il quand tout le monde fut debout. Ce soir on pourrait aller manger en ville ou sur la plage, histoire de se promener, prendre l'air. De toute façon, on n'a rien à manger, et je pense qu'on est tous trop fatigués pour faire des courses maintenant.

Sa femme et son fils acquiescèrent vivement, plutôt enthousiastes à l'idée de découvrir leur nouvel environnement. La mère s'inquiétait déjà de faire bonne impression à ses nouveaux voisins, et se dit qu'elle ferait sûrement appel aux talents de son fils pour faire des cookies. Rien de mieux pour se faire bien voir du voisinage, pensa-t-elle.

Avant de partir, Jeno remonta fermer la fenêtre de sa chambre tandis que sa mère se rafraîchissait à la salle de bain, et que son père les attendait en tapant du pied frénétiquement à la porte. La famille se rejoignit quelques secondes plus tard, et partit à pied dans les rues de la ville sous le soleil couchant.

My Sweet FutureOù les histoires vivent. Découvrez maintenant