IV. Seul

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Pas une seul fois le jeune homme ne se retourna vers les bâtisses qui l'avaient vu grandir. Il avançait, lentement, un pas après l'autre, droit devant lui.

Son regard était fixe, et son esprit était vide. Il était seul.

La solitude avait toujours accompagné Damao, mais jamais encore il n'avait eu ce vide, cette sensation d'être perdu. Il avait l'habitude que personne ne l'attende à la maison.


Mais jamais encore il n'avait eu nul part où aller.


Pendant plusieurs heures, il avança sans vraiment avoir une pensée cohérente. Puis peu à peu, relevant la tête, Damao prit conscience de ce qui l'entourait. C'était un paysage de montagne. Tout autour le cernaient de hauts pics escarpés, des vallées, de grandes forêts. Tout était empli de verdure malgré l'avancé de l'hiver. La température était assez basse, mais lui qui était habillé légèrement, n'avait pas froid.

Toutes ces anomalies climatiques venaient de précédentes guerres. Lui-même en avait entendu parler. Des guerres magiques, où mages et arkassans se combattaient déjà.

Damao compris que s'il voulait survivre, il lui fallait un objectif. Le jeune garçon avait tellement entendu parler des mages en mal qu'il lui était venu de lui-même les détester, et rejeter la partie de son être qui le reliait à ces individus.


Mais avec le temps, s'il lui restait une once de lien avec le Clan des Arka, elle venait de se briser dans l'exil.

Ces individus dont autrefois il avait peur, aujourd'hui, il était prêt à les trouver, et leur demander asile.


Le métamorphe s'arrêta juste à temps avant de faire un pas dans un cours d'eau.

Il s'était reperdu dans ses pensées.

Une envie soudaine le fit soudain s'agenouiller et plonger les mains dans l'eau claire et glacée. Puis il se les plaqua sur les joues, d'où émanait toujours une incompréhensible chaleur. Il finit par inspirer un grand coup, et plonger entièrement la tête sous l'eau. Cela lui fit l'effet d'un immense coup, et il la retira tout de suite, les cheveux dégoulinants, et recula dans l'herbe jusqu'au pied d'un arbre.

Il resta là longtemps, avachi et trempé, le regard perdu dans les limbes de ses pensées.


Ce n'est que beaucoup plus tard qu'un bruit le fit revenir à lui. Un bruit familier. Sa respiration se fit bruyante. Les battements de son coeur se firent violents. Il se prit la tête dans ses mains incapable de comprendre ce qui lui arrivait.

Damao n'arrivait pas à se contrôler. C'était comme si son coeur avait une conscience propre.


Alors il se leva, le visage inexpressif, et se mit à se déplacer silencieusement à une étonnante vitesse malgré les arbres, le froid, et la nuit qui l'entourait désormais. Arrivant à la lisière de la forêt, il grimpa en haut d'un arbre.

En bas, sur un chemin de terre avançaient quatre silhouettes à la lueur de torches. Elles progressaient difficilement, poussant et tirant une charrette à bœufs.


Les pupilles de Damao s'agrandirent. Ses yeux étaient injectés de sang.

Il se jeta sur eux.


Atterrissant sur le dos d'un premier, il le tua d'une torsion des cervicales. Les autres mirent du temps à réagir. Un second mourut d'une main perforant ses poumons.

Hébété, Damao regardait son bras, couvert d'écailles et terminé par de longs doigts aux griffes puissantes.

Un troisième se jeta alors sur lui, armé d'un poignard. Alerté par son cri, l'exilé eut juste le temps de se retourna avant qu'une vague d'énergie brûlante ne fasse s'écrouler le malheureux dans un râle de douleur.

Les yeux de l'assaillant se plongèrent ensuite dans ceux du dernier survivant.

Celui-ci se mit à trembler de peur, et laissa son arc et ses flèches tomber au sol, en levant les mains et reculant précipitamment.

- Qu'est-ce que... vous... voulez ?!, articula-t-il.

Mais Damao ne répondit rien. Son bras se tendit, main ouverte, et un volute de magie s'enroula autour du cou du voyageur.

Ce que je veux ?... Découvrir qui je suis... Et pourquoi... Oui. J'ai envie... de tuer.


La main se referma.

La Destinée du DragonOù les histoires vivent. Découvrez maintenant