VIII. ... C'est que tu es le bon qui arrive aux autres.

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Après plusieurs heures de marche, ils firent halte sur un plateau rocheux surplombant plusieurs vallées. Damao ne dit rien, mais s'écroula au sol. Il était à bout de forces.

Shizume soupira. Pathétique. Encore heureux qu'il ne se plaigne pas.

- Bon. On arrête là, déclara-t-elle. Vient boire au lieu de rester prostré.

La jeune femme s'approcha du précipice qui s'ouvrait sur une gigantesque étendue de forêt en contrebas, et s'assit, les pieds dans le vide. Elle but une gorgée de sa gourde.

Le paysage était magnifique. À perte de vue s'étendaient d'immenses pics rocheux, parfois enneigés, semblant faire surface dans une mer de sapin, suivant son cours à travers les vallées.

Aucun village n'était visible. Uniquement la nature sauvage.

Son compagnon de voyage finit par réussir à se lever et se traîner vers elle avec ses jambes fatiguées. Il s'assit à ses côtés.

Les deux voyageurs avaient marché toute la matinée d'un pas soutenu sur un chemin en constante ascension. Malgré cela, le soleil était déjà haut dans le ciel.

- Il faudra qu'on accélère le pas, dit la fille. J'aimerai être arrivée avant la nuit.

- On va où ?

Shizume leva un pousse en l'air, et fit un lui fit un clin d'oeil.

- Tu verras !, s'exclama-t-elle. Une ville où on aura la paix. Mais avant...

La gardienne se leva. Du sol, la tête levée vers elle, Damao la regarda vraiment pour la première fois, sa silhouette se détachant dans le ciel pur. Sa nouvelle sensei portait un pantalon et une veste de kimono beiges, serrés aux chevilles, aux poignet et à la taille par une sorte de ruban blanc. Ses sandales étaient semblables à celle que portait l'adolescent.

La jeune femme avait les cheveux courts, d'un noir de jais. Ses yeux en amande étaient bruns également. Son visage fin semblait porter en permanence un masque de lassitude.


Sa coéquipière lui fit un faux sourire quand elle s'aperçut du regard. Elle s'étira un instant puis coupa un bout de ruban attaché à son poignet, avant de se le nouer autour de la tête comme un bandeau.

- Voilà ! La paix absolue, comme ça.

- Mais... tu as...

- Oui. C'est préférable, tu verras.

Shizume venait tout simplement de dissimuler son tatouage de gardienne sous un bandeau blanc. Le jeune homme la regarda avec étonnement. Puis il porta la main à sa joue. Il ne savait pas ce qu'il lui arrivait : celles-ci le brûlaient et le démangeaient depuis plusieurs jours maintenant. La fille surprit son geste.

- Ah ça, oui, ça va être plus difficile à cacher. Il faudra qu'on te trouve un baume apaisant ou quelque chose comme ça, un fois arrivés à destination.

Damao ouvrit de grands yeux. Il s'inquiéta :

- Pourquoi ?! J'ai quelque chose ?...

Un regard déconcerté se posa sur lui.

- Heu... tu n'auras qu'à regarder ton reflet quand tu en auras l'occasion.

L'intéressé sauta sur ses pieds, soudain ragaillardi. Il tourna la tête à droite et à gauche, mais il y avait uniquement de la pierre et quelques herbes autour d'eux.

- Mais c'est quoi ?

- Mmh ? Tu verras pas toi-même. Faudra juste t'y habituer, c'est comme ça. En attendant... dit-elle en fouillant dans son sac en bandoulière, c'est pas qu'on est un peu fauchés, mais faudra trouver un moyen de gagner de l'argent.

Elle étala sur le sol une poignée de pièces.

- C'est tout ce que j'ai. Il y a le bout de paye que j'ai eu des commerçants ambulants. C'est tout. J'avais déjà plus rien avant.

- Si c'est juste ça, tient.

Damao lui tendit deux bourses pleines qu'il sortit de ses poches.

- Mais... t'as trouvé ça où ??

- Elles appartenaient à des voyageurs...

- Que tu as volés ?

Le garçon ne répondit rien. Il suffit d'un bref coup d'oeil de la gardienne pour qu'elle comprenne qu'il n'avait pas dû faire que les voler. De là devait venir également le kunai. Jamais une arme n'est confiée à un exilé.

L'apparition de l'argent et les révélations laissèrent un silence froid. Shizume prit les sacoches tendues sans rien dire.


Malgré la course du soleil, ils s'installèrent pour se reposer un peu.


- Quand m'apprendras-tu à utiliser mon don ?, demanda Damao un peu plus tard, réveillant sa coéquipière d'une sieste.

La jeune femme se leva en maudissant les gosses. Puis, un peu réveillée, elle déclara :

- Avant de commencer quoi que ce soit, renforcement musculaire. Agilité, j'ai cru voir que ça allait. Endurance, on travaille ça depuis ce matin. Réflexes...

L'enfant ne put éviter un uppercut qui l'étala au sol.

- À voir ! Tu vas tout de suite me travailler les réflexes et la vitesse.

- Et comment je fais ?

- Tu fais la planche avec ton corps, en pliant et dépliant les bras de façon alternative.

- Des pompes ?

La sensei eut un sourire diabolique.

- Exactement. Et ne t'avises surtout pas de me réveiller une seconde fois. En continue jusqu'à mon réveil !


Ce fut un soleil rouge qui l'éveilla cette fois. Elle sut tout de suite qu'elle était seule. Damao n'était plus à ses côtés.

La fille se leva et ramassa ses affaires, puis entreprit la descente du plateau où ils avaient fait halte. Elle rejoignit ainsi le couvert des arbres.

Là, une ombre la dépassa à pleine vitesse. Il suffit à Shizume de tendre le pied pour que celle-ci s'écroule dans la poussière, avant de se relever.

- J'avais dis des pompes, dit-elle tranquillement. Qu'est-ce que tu fais là ?

- Je ne vois pas en quoi des pompes puissent m'aider dans ma rapidité et mes réflexes...

- Éviter ce croche-pied t'aurait servi.

Le jeune homme baissa la tête.

- ... Mais bon, tant pis, continua-t-elle en s'étirant.

- Je suis désolé. Le soleil va bientôt se coucher. Nous n'arriverons pas avant la nuit.

- J'ai changé d'avis. Nous resterons ici quelques jours. Rien de tel que la forêt et les montagnes pour la condition physique. Et on va commencer...

Son sourire s'étira.

- ... par un jeu.

La Destinée du DragonOù les histoires vivent. Découvrez maintenant