.Chapitre 36 : Sissi, dédoublement

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La première chose que je vois est le visage puéril de Charlotte-Aimée à quelque centimètre du mien. Il me paraît comme gonflé à l'hélium tant il me semble immense. Ses yeux verts foncés m'observent avec une curiosité morbide et sa bouche forme son pli très laid de gamine capricieuse qui va crier de colère ou bouder à tout instant.

« T'es pas morte ? articule la bouche en abandonnant momentanément sa moue pour un sourire tordu.

— Aide-moi à me lever au lieu de me poser une question aussi impertinente, lui ordonne-je en lui tendant le plus gracieusement possible mon bras étrangement lourd.

— Stupide princesse, grimace-t-elle, tu es bien Sissi-la-chipie, nous ne sommes pas trompés.

Celle qui aurait pu ressembler à une poupée si une âme plus aimable et plus douce l'avait animée, attrape ma main et tire dessus sans ménagement. Ce n'est pas très efficace, mais j'arrive à me mettre debout malgré ma tête qui tourne. Elle me jette une serviette de bain dans laquelle j'enroule mon corps nu et raide. J'essaye de faire bonne figure, mais je n'ai aucun souvenir récent et j'ignore totalement la raison qui m'a poussée à m'allonger dans les feuilles derrière le Centre d'Entrainement, sans m'être habillée, aux pieds d'un être que je méprise cordialement. Je déteste avouer mon ignorance. Autant attendre un peu que les informations viennent à moi.

Je commence à me douter de quelque sorcellerie lorsqu'un vampire roux apparait tranquillement de derrière une palissade d'où s'échappent deux battements de cœurs. Seulement, ces rythmes cardiaques sont étrangement lents, et tueraient un loup ou un humain. Je perçois également un cœur plus petit et rapide, un animal de petite taille certainement.

— Lewis, quel plaisir de te voir... La Sorcière et toi êtes donc rentrés à la Clairière assez rapidement à ce que je vois, lui dis-je en regardant furtivement ma montre Channel que j'ai récupéré du poignet d'une jeune voleuse aux tresses.

Il est quinze heures trente. J'ai perdu trois heures entre la dernièrement fois que j'ai lu ma montre et maintenant.

— Et oui, la chaleur des loups nous a tout de suite manqué, répond Lewis avec son rire facile habituel.

— Surtout la mienne, à ce que je vois, me mouille-je en lui adressant un sourire enjôleur totalement factice.

Il a le bon goût de réagir en m'envoyant en baiser soufflé sur sa main.

— Disons que c'est surtout Chat qui tenait à ce que tu sois transformée la première, tu devais lui manquer, rétorque-t-il.

— C'est-à-dire ? demande-je en fusillant du regard la gamine timbrée qui imite avec moultes grimaces le geste galant du vampire.

— Cela me faisait plaisir que la potion soit tester sur toi, explique-t-elle le plus naturellement du monde.

Lewis éclaire un peu ma lanterne sur la transformation de la Meute en poules. Je suis la première à goûter la potion de contre-métamorphose d'Asmaldilare. A part une sensation d'un corps trop grand, je ne ressens aucun effet secondaire, ce qui fait victorieusement dire à Lewis que sa maitresse a réussi du premier coup cette fois-ci.

— Mais ce sort de contamination, comme tu dis, d'où vient-il ? C'est un autre cadeau de Maldré ? interrompe-je l'incorrigible bavard roux.

Au même moment, j'aperçois à l'angle du Centre d'Entrainement Ava qui s'avance tranquillement vers nous avec son sensuel déhanché naturel. Elle ne porte pas de perruque ; elle est vêtue d'une robe en coton rouge bien trop grande pour elle et qui doit appartenir à une louve plus âgée et plus... femme séductrice, et tient à bout de bras trois poulets qui se débattent, attachés à une corde.

Les ennuis d'Asmaldilare, sorcièreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant