Nouveau riche .

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La berline noire aux vitres foncées pénètre l'imposant building que représente la "Lawyer Association".. À sa tête règne sans partage le puissant et réputé ténor du barreau César Ambassa. C'est un monsieur qui, bien loin de ses compères s'est bâti une réputation d'intraitable et de tenace, qui parvient toujours à ses fins, quelques soient les méthodes employées.. C'est donc ce monsieur qui sert d'avocat et de notaire à ma famille depuis déjà trois décennies. Il m'a vu naître et grandir, mais à toujours su garder sa place, sans se laisser détourner par le caractère hospitalier de mes parents. Il disait vouloir me rencontrer dans les plus brefs délais.. J'ai bien hâte de savoir ce qu'il a à me dire.. Tic tac tic tac, plus que quelques secondes.

( six minutes plus tard).

Toc toc, qwinnnnn (la porte s'ouvre d'un coup devant moi, comme si quelqu'un avait appuyé sur un bouton). Me voici donc dans ce fameux bureau dont tant de gens parlent.. Je n'y suis jamais venu. On raconte que le président de la République y serait venu en personne. J'avoue être impressionné par le faste et le prestige de la pièce. Des tableaux,  me semble-t-il d'une très grande qualité, longeant toute la pièce.. Et au fond de la pièce, un imposant bureau d'un bois, dont la majesté semble évidente, assombri par de hauts rideaux de couleur marron foncé.. Le baron impose son ora dominatrice dans toute la vaste pièce :
"--Tu es en retard, je commençais à me faire du souci.
-- Oui, mon vol a pris du retard
--Bien, installes toi, il ne me reste que peu de temps à t'accorder ".

Empli de tracc et d'excitation, je longe la pièce à pas de course, et m'installe juste en face du maître.
"--Bien, Commençons ( Il ouvre un Dossier gros comme un livre religieux et recadre ses lunettes avec une grande élégance).
À partir de maintenant, tu devras être un homme, un homme fort. Le destin a placé de grandes responsabilités entre tes mains, je me dois de te mettre en garde..
-- Excusez-moi maître, je suis confus.
-- Tes parents s'en sont allés, et tes frères avec eux. Du point de vue légal et en respect de l'article 167 de la constitution de notre pays, tu es l'unique dépositaire de l'héritage familial, un véritable empire ! "

À ce moment, je me retrouve à nouveau dans mon monde intérieur. Je suis conscient que mes parents disposaient de nombreux biens, et que ma mère était l'actionnaire majoritaire de la banque d'affaires dont elle était la fondatrice, mais si ce monsieur au bras si long et à la réputation internationale est lui même impressionné, cela signifie que je suis encore très loin de la réalité.

"-- Tu ne le sais peut être pas, mais tes parents ont toujours vécu très chichement, comparativement à leurs revenus en tout cas. Sur une période de trente trois ans, ta famille a amassée la bagatelle de 38 millions d'euros, avec en plus des résidences, ici à Douala, à Yaoundé, à Edéa. Tes parents disposaient aussi d'un total de 17500 m2 de terrains aux abords du pays, et de plantations de noix de palme dans le littoral . Tu es donc le nouveau président du conseil d'administration de la CACB ( Central Africa Commercial Bank) et l'unique administrateur de ces biens.

Pendant dix secondes, un silence de cimetière règne dans la pièce insonorisée.

"-- J'avoue.. J'avoue que je ne sais pas trop quoi dire, maître.
-- Et je le comprends parfaitement, une telle quantité de patrimoine etourdirait n'importe qui dans ce pays.
-- Dans un premier temps, j'assurerai le fonctionnement de l'entreprise familiale. Mais d'ici trois mois, il faudra que tu reprennes les rênes. Je te remets ce document, tu y retrouveras tes nombreux titres de propriétés, et les informations bancaires nécessaires.
-- D..d'accord..
Merci, maître.
-- Une dernière chose, tes parents avaient émis le souhait d'être enterrés à la maison de la campagne, penses-y. Et tiens moi informé de l'évolution des préparatifs du deuil.
-- Compris, maître...

Je me lève timidement du fauteuil.. J'essaie de garder la tête froide. J'ai l'impression que mon corps pèse des tonnes, et la porte de sortie semble maintenant si loin.
C'est fou, je ne m'imaginais pas une pareille sensation. J'ai pourtant si souvent rêvé de disposer à ma guise des biens de ma famille, mais je ne pensais pas que cela aurait l'air aussi effrayant. Que vais-je faire maintenant ? Que vais-je devenir ? Et moi qui rêvais de musique et de gloire.. Me voici donc réduis à cette charge affligeante.
Je sors de la pièce et me dirige vers l'ascenseur, mais mon esprit n'est plus dans ce corps. Mes pensées se sont égarées dans le million de perspectives qui s'ouvrent devant moi.
Décontenancé, je rejoins la voiture..
"-- Où va-t-on, monsieur ?
-- Je voudrais que l'on roule, sans jamais s'arrêter.. ".

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