Chap I : Ce Qui Leur Est Arrivé (1/2)

501 120 588
                                    

*La narratrice est Alpha*

« Depuis quand Lodart est-il relié à la terre ? me demandais-je, autrefois »

« Un millénaire ? L'espace d'une seconde ? Peut-être même n'en était-il point ainsi ?! »

« Aujourd'hui, je suis à même de répondre à ces questions. »

« Lodart a vu naître la terre, a été relié à elle au cours d'un malheureux incident qui a changé l'existence de cette planète. »

« Sur terre, plusieurs points convergent vers ce monde. Certains sont connus des hommes de la terre. Mais rares sont les élus qui arrivent à atteindre ce paradis et parviennent à retourner chez eux. »

« Tous les écrits portant sur des mythes et légendes influencés par des rumeurs inscrites comme des contes se réfère à cet endroit, mon chez moi. »

Mademoiselle ? Mademoiselle ?! me crie la petite vendeuse.

Je reprends mes esprits et m'aperçois que je n'ai pas encore payé les reliques que je détiens déjà entre mes mains. Je retire de mon carcan une pièce d'argent et la lui tend.

Merci, Mademoiselle ! Si vous tenez à vous rendre à Haemmer, je vous conseille de vous embarquer sur le silfer des Haïns, le vaisseau le plus rapide de la côte ouest carthaginoise. Ils sont toujours à l'heure.

Altruiste et jovial sont les traits que je lis sur ce visage au teint bruni avec une barrette rouge ornant une tête aux cheveux noirs bien lisses.

Je ne réponds pas et continue mon chemin. Il existe neuf royaumes éparpillés sur la vaste étendue d'eau. Environ 85% de ce monde est dévoré par les flots, divisé en cinq parties.

Pour la seconde fois depuis mon arrivée dans ce monde, je foule le sol d'un royaume. Qui plus est, le royaume de la cité d'Achlys où s'est déroulé mon premier spectacle d'e-motio.

Je me trouve à la capitale du royaume de Carthage, le royaume réputé le plus long du monde. Durant mon adolescence, je pouvais apercevoir ses énormes ponts s'étendant à l'infini ou ne s'arrêtant qu'à un mille de la capitale.

De par sa longueur, ces longs bras se doivent d'avoir un pilier sur quoi se reposer. Et c'est là que se rassemble certains peuples, habitués aux allés et venus des indéchiffrables structures se déplaçant à leur gré et cela sans que personne ne puisse avoir une quelconque incidence sur leur trajectoire.

On en distingue quatre de longues dimensions et huit, formant les petites extensions de la capitale. Plus déréglé les unes que les autres.

Lors de mon départ d'Éris, les trois généraux angéliques de la troisième et quatrième légion avaient délaissé leurs occupations pour m'offrir leur bénédiction.

Le plus dur fut pour moi, de les rassurer et de faire taire certaines réticences à mon départ. Mais je me dois d'exercer ce pourquoi j'ai aspiré à devenir depuis toute petite.

Je marche encore, le regard vague, admirant le parterre en moellon peint en blanc sur toute l'allée, sans omettre les garde-fous avec un lustre blanc à chaque intervalle de deux mètres cinquante, dont les bouts ressemblent à de grosses perles.

Je viens d'arriver et déjà, je me suis empressée d'acheter trois reliques.

Nous sommes encore le petit matin, dois-je noter - Mais qu'est-ce qu'il y a foule - Pas facile de se déplacer dans cette suffocante agglomération. Des porteurs d'armes, des enfants se faufilant, des personnes âgées, un rien bousculées par des hommes d'affaires en boubou et coiffées d'un chapeau en carrée où s'inscrit leur début dans une des boutiques du royaume. C'est ainsi que bien des employeurs arrivent à préciser où sont affairés tel ou tel ouvrier.

Je sens du coup mon pouls qui s'emballe. Quelque chose est proche. Je me retourne, je scinde le nombre d'âmes m'entourant. Mes actions dérangent clairement la bonne marche migratoire. Des yeux me scrutent, cherchant à comprendre mes gestes.

Ça se précise, il est tout proche. C'est à quelque pas de là où je m'avance déjà. Je dois avoir pris une minute avant d'arriver à sa hauteur. Un homme assis à ma droite, contre le moellon blanc du garde-fou.

Un chapeau noir, une veste en cuir délavé, doublée d'une écharpe. Un jean beige présentant un manque d'entretien. C'est bel et bien un forgeur.

Un forgeur est un dresseur et un interprète d'émotions. L'e-motio capte l'émotion ou le sentiment. Le forgeur la dirige à travers le corps du percepteur et permet sa libération d'une manière claire et ordonnée. S'il se pare toujours de ses accoutrements déclinés, c'est qu'il véhicule un message plutôt mélancolique. De coutume, on ne les voit guère arborer une autre tenue malgré leur correcte rémunération.

Il mâche un bâton que je devine être une barre alimentaire bon marché. Soudain, il arrête d'asticoter la barre dans sa bouche, lève sa face quelque peu cachée par son chapeau.

Nos regards se croisent. Il a l'air de s'approcher de la trentaine. Un collier à son cou me précise son niveau assez élevé. Je ne lui adresse pas la parole et reste devant lui, le fixant sans vergogne.

Cette manie m'avait valu des réprimandes plus d'une fois à Éris. Impossible de m'en défaire. Ma curiosité prime sur toute logique.

Le forgeur ne me lâche pas non plus. Il me scrute avec peut-être moins d'intensité que moi car bientôt, il baisse les yeux pour tirer une petite montre à gousset en bronze puis revient à moi.

Ces yeux sont d'un bleu turquoise très atypique.

Ça va bientôt commencer, lâche-t-il, les pupilles plongées dans les miennes.

Il se lève subitement, prend appui sur la paroi et continue à me fixer. Il fait trente centimètres de plus que moi. Curieusement, il sent le parfum des boutiques chics du royaume. Et ses cheveux accrochés en crinière derrière sa tête démontrent une certaine considération malgré l'ensemble.

En un instant, le public s'écarte. On voit s'avancer deux créatures de sexe opposé à la morphologie humaine, mais dont les traits du visage sont fortement tirés vers l'arrière du visage avec des oreilles en pointe. Leurs corps minces et longs leur donnent une forme délicate.

Comme prises d'euphorie, les deux êtres se mettent à lever les mains, suivies de la jambe droite. Le mouvement s'arrête puis reprend de plus belle, conduisant à une danse digne des grands bals.

À un moment de l'action, ils s'éloignent tout en continuant leurs pas gracieux. Ils s'arrêtent abruptement, s'affalent sur le parterre, puis se mettent en boule, la main sur le front.

Sur le moment, personne ne comprend ce qui se passe. Mais les activités sont à l'arrêt. Pas une conscience n'ose traverser la scène.

On entend alors le son d'un instrument flotter dans l'air Cela se précise Une intonation laissant place à un orchestre symphonique.

D'où provient cette musique ? Cela n'a pas l'air important aux yeux de la foule, malgré certaines têtes se tournant à la recherche de quelque chose.

C'est dans cette atmosphère d'incertitude, que le forgeur s'avance, le chapeau en pente. Il se met à prononcer quelques mots que je confirme être les incantations nécessaires pour diriger une émotion qui vient de traverser le temps.

Je me rapproche de la foule pour ne pas me démarquer. Le forgeur s'apprête à libérer leurs émotions.

*silfer: un des petits bateaux aériens de grande vitesse.

*silfer: un des petits bateaux aériens de grande vitesse

Oups ! Cette image n'est pas conforme à nos directives de contenu. Afin de continuer la publication, veuillez la retirer ou mettre en ligne une autre image.
Ce Que Tes Émotions Leur FontOù les histoires vivent. Découvrez maintenant