Chap V : Les maux de l'humanité (3/4)

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Nous longeons les contours d'un lac. Le soleil atteindra son point culminant dans quelques minutes. La température n'est pas clémente. Je ressens l'ardeur de l'étoile jusque dans mes bottes. La canicule aura raison de notre humeur, tout simplement.

Je ne suis pas la seule, on dirait. Eskiell n'arrive pas à rester calme. Il gigote toutes les deux secondes, espérant endiguer son malaise. Les autres ne cessent d'arborer ce fameux et énigmatique visage d'aigreur.

Il a plu dernièrement, mais le cycle va bientôt recommencer. Il nous faudra choisir où nous devrons camper. J'ai beau pivoter ma tête dans tous les sens, je ne vois pas un seul e-motio. Pourtant, une sensation bestiale me parvient. Mais d'où proviendra la surprise ?

— Bien, les amis ! débute Bordos, exténué au premier coup d'œil. Nous allons camper ici.

Soudain, il pâlit. Ces orbites s'agrandissent.

— Oyphul ! Ton bras ! s'écrie-t-il, en indexant le concerné.

Ce dernier lève ses mains mécaniquement et s'aperçoit de l'horreur que lui présente son membre dominant. Son bras droit est couvert de gale jusqu'au coude. Il recule. Il cherche un appui, n'en trouve pas et se laisse aller sur l'herbe mousseuse.

— Qu'est-ce que c'est que ça ? demande-t-il, en tremblant de tout son être, les larmes prêtes à jaillir.

Il se met à crier pendant que nous nous mettons tous en position de défense formant un cercle, dont il était le centre.

— Selfor ! Ne te retiens pas, ordonne fermement le chef. Oyphul, je sais que tu souffres, mais c'est le moment de nous filer quelques armes en plus.

Oyphul ne répond pas, mais ne se lamente pas non plus. Il fait fi de sa douleur et libère péniblement trois grosses mitraillettes à propulsion électrique.

— Tenez ! lâche-t-il, la douleur au rendez-vous.

Bordos somme tout le monde de se munir d'une arme à longue portée immédiatement. Moi, je suis déjà en position avec mon arc en fer noir et cherche des yeux le danger qui se tapit prodigieusement.

— Que fais-tu, petite ? Tu n'as pas de flèche avec toi. Prends une de ses armes.

Il lance le propulseur* qui atterrit dans la main d'Eskiell et qui me le tend.

— Allez, Alpha ! Je serais beaucoup plus serein si tu prenais ceci.
— Eskiell ! On n'est pas ensemble. Donc, ne t'occupe pas de moi. Je sais me défendre.

Il ne répond pas et se met en position, me dévisageant une dernière fois l'air de s'assurer de ma détermination.

Le silence s'installe. Plus personne ne bouge. Le vent lui-même a subitement pris congé. Moi-même, je n'en suis plus aussi certain. Y a-t-il réellement quelque chose tapis dans l'ombre ?

— Aaaah ! Hurle Oyphul, brisant ainsi le flot de penser de l'attroupement.
— Je t'ai dit de résister, mon v...

C'est comme l'effet d'une bombe assourdissante qui nous brise littéralement l'ouïe. Nous nous flanquons les mains aux oreilles — Je le sais — C'est de derrière notre dos, du bras d'Oyphul que vient le coup. Nous sommes présentement, vulnérables à une attaque surprise.

Je tente de garder ma concentration. C'est là que je vois émerger du lac, un dévoreur de taille imposante. Un mètre de plus que moi, tout au plus. Les premières choses qui me frappent sont les longues pattes munies de quatre griffes qui propulsent la bête juste devant moi.

— Ah, qu'est-ce que c'est ? lance Bordos, assailli par des petits cloportes que je reconnais être des e-motios.

Le son strident s'estompe, mais ses séquelles sont notables. Je n'arrive plus à tenir correctement mon arme. La bête aux longues pattes n'attend plus une seconde et tente de m'écorcher avec ses griffes acérées. Eskiell repousse l'attaque du poing, avant que je ne puisse réagir. Je reprends le contrôle de mes bras, supporte le vertige qui me dérange et décoche une prise fatale, touchant la créature en pleine poitrine. L'animal recule avec des pas saccadés.

Ce Que Tes Émotions Leur FontOù les histoires vivent. Découvrez maintenant