Chap II : Ce Qui Tue Les Hommes (3/3)

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La pluie a eu raison du sol qui est devenu boueux et de ce fait difficilement adapté pour la situation. Qu'à cela ne tienne, j'ai eu à m'entraîner sur des terrains plus affligeants.

Sous la tempête, la bête m'apparaît clairement. Le nombre restreint d'arbres et des éclairs répétés doivent y être pour quelque chose. C'est à ma plus grande surprise, un e-motio. Un des plus agressifs, sensible aux émotions négatives lui parcourant.

Une tête avec deux longues canines, sortant de la gueule. Une araignée à première vue, sauf que ses pattes sont celles d'un anophèle. Douze pattes sans compter les petites. En supprimant les deux que je viens de couper, il lui en reste dix. Sa réserve de toile est remplacée par une sorte de quadruple aile collée tout le long de son corps. Une tige transparente dépasse le corps me ravisant sur la possibilité que ce soit plus une guêpe ou une mante religieuse.

Curieusement, il ne m'attaque pas tout de suite, m'observe au même titre que moi, cherchant à avoir l'avantage sur l'adversaire.

J'ai face à moi un e-motio d'une taille importante, mais cela ne signifie pas qu'il a déjà évolué. Il existe quatre types d'e-motio et celui-ci appartient vraisemblablement à la classe des dévoreurs.

Ce sont les plus sauvages et dangereux du fait qu'ils captent plus facilement les sombres émotions à travers l'univers. Ils ressentent alors un besoin d'arracher des vies et peuvent se retrouver irrécupérables.

Un dévoreur, une fois l'émotion assimilée, devient très malicieux et rusé. Cet e-motio en est un. Je ne l'ai même pas senti se rapprocher de la cabane encore lorsqu'il a commencé à utiliser ses pouvoirs sur moi.

« Finissons-en ! »

Je prononce ces mots en me lançant sur lui. Je dois premièrement le déstabiliser quelle que soit la méthode. Les pattes sont ses armes ainsi que sa gueule qu'il lance pour m'arracher le bras droit.

Un e-motio est connecté aux sentiments de tous les êtres vivants doués d'une réflexion. Ce qui exclue les animaux, se basant sur l'instinct. Les sentiments qui parcourent ce dévoreur doivent appartenir à un humain.

Pour mieux le dompter, il me faut déceler sa nature.

Les coups s'enchaînent, pattes levées, sauts de quelques mètres, la bête tente une ouverture. Il ne cherche pas à se défendre. Il opte consciencieusement pour l'attaque.

J'arrive à glisser tout le long du buste de l'agresseur. Lui assène deux ou trois coups. Une de ses pattes me rencontre. Je pare du revers de l'épée, tourne sur moi-même et coupe trois autres pattes. La créature gesticule en poussant un cri. Elle recule de quelques pas avant de revenir à la charge.

À ma grande surprise, il m'érafle l'épaule gauche. La pluie bat son plein, aidée d'un fort vent bousculant les arbres alentours. Je commence à sentir son froid sur ma peau. Un léger spasme me parcourt le corps. Je lâche ma respiration, lève ma main gauche sous un écoulement d'eau, puis regarde ma paume. La douleur est négligeable, malgré le fait que cela ne manque pas de piquer.

L'e-motio ne peut attendre et fonce sur moi. Je me lève bien droit, baisse ma main et d'un regard renfrogné, la bête tombe en avant comme paralysé. Cela ne dure guère car la voilà qui se relève. Mais il est trop tard.

En une seconde qui paraît une éternité, je parviens à pénétrer son esprit. Je me connecte à la source responsable du sentiment.

Des mains dans une poche d'un pullover gris, la tête à découvert tournant à gauche, puis à sa droite, fixant à plusieurs reprises dans la même direction, l'air de suivre quelqu'un.

— Un meurtrier ! m'écris-je, en observant la tête de l'e-motio.

« Tu es possédé par l'envie, n'est-ce pas ? »

La bête se relève brusquement. Je remarque que ses pattes coupées sont progressivement remplacées par des nouvelles, émergeant de leur blessure - Je n'ai plus à traîner le pas - D'un bond, suivi d'une pétrification, je blesse ses pattes avant, lui tranche un de ses énormes yeux et m'empresse de lui sectionner la patte avant droite. Je recule frénétiquement, évitant de peu d'être écrasée par la chose qui s'effondre en hurlant intensément. Il tremble de toute sa masse, tente d'endiguer la douleur, sans succès visiblement. C'est alors que je vois ses ailes s'étendre, la queue brillant d'un mauve pareil au reste de la carcasse, vire au rouge d'un mouvement de la tête.

« Sa carte maîtresse ».

Il gémit encore lorsqu'il ouvre grand sa gueule comme pour me lancer quelque chose. Le liquide contenu dans sa queue se met à bouillir tel le Vésuve, en agitant vigoureusement la queue, prêt à exploser.

Je lève mon arme, me servant d'arc sans fil et prend la position d'un archer. La main, près de la poitrine, j'ajuste mon tir, supposée avoir une flèche et le fil pour préciser l'intensité.

Une lueur rouge vif se distingue dans la gueule de mon adversaire, prêt à libérer sa rage.

J'expire à nouveau et prononce à haute voix quelques mots:

« Tu ne toucheras pas ta proie ce soir, humain »

Je lâche ma pression. Un hurlement plus aigu déchire l'espace, suivit d'un tonnerre assourdissant. La créature se déplace rapidement et disparaît parmi les arbres sombres où les craintes peuvent se mouvoir sans dessiner une ombre qu'ils sont.

Je reste là, bien droite, scrutant le point de sa fuite - s'il savait - sa présence à elle seule est à présent perceptible à des kilomètres.

— Elle ne décolère pas, cette tempête, me dis-je, en visant la forêt.

J'ai beau être trempée, je n'ai pas froid. Mes pieds à nu sont ancrés dans la boue. J'arrangerai tout cela.

Un craquement dans le fond, puis un mouvement significatif droit devant moi. Sa tête n'est pas perceptible mais il est là. Il m'observe. Il ne brille plus. Il doit avoir retrouvé le contrôle de ses émotions.

Il bouge, recule lentement, prend une accélération et s'éloigne.

Je tourne la tête et me dirige vers mon pitoyable refuge, explosé de partout. Quelle plaie ! Voilà qui s'appelle un accueil en grande pompe. J'aimerai bien jeter l'éponge, mais quand on me cherche, j'ai tendance à ne plus lâcher l'affaire. Je vais me mettre en chasse de l'e-motio. Blessé comme il est, il se fortifiera.

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Q.U.E.S.T.I.ON.

Alors, dîtes-moi : « qu'est-ce qui tue les hommes ? »

A/ l'épée
B/ le passé
C/ les pulsions

Attention ! La réponse a plus ou moins été donné. Pas la peine de vous triturer, haha.

 Pas la peine de vous triturer, haha

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Ce Que Tes Émotions Leur FontOù les histoires vivent. Découvrez maintenant