Trente-neuvième Chapitre.

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[Jeudi 2 mars. La veille, après un entraînement avec ses amis, Heaven a reçu un message du roi lui demandant de faire un discours le lendemain face au peuple d'Erédia.]

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— Ça ne va pas le faire. Pas du tout.

Ma voix tremble nerveusement alors que je fais les cent pas dans le salon sous les yeux concernés de mes amis.

— Tu es juste stressée, veut me rassurer Zac. Et en plus tu...

Il s'interrompt quand la porte d'entrée s'ouvre brusquement. Je me rue vers celle-ci en sortant du salon et tombe avec grand soulagement sur ma mère, l'air étrangement reposé.

— Teresa ! m'exclamé-je. J'ai eu peur, tu étais où ?

Elle pose sur moi un regard attendri et se débarrasse d'un manteau qui semble tout neuf. Ses vêtements aussi ont changé. Je fronce les sourcils, entendant mes amis me rejoindre.

— J'étais au château, annonce alors ma mère.

— Hein ? Toute la nuit ? m'étonné-je.

— Oui. Je vais y résider, pour l'instant.

Le regard que je lui lance doit être assez expressif puisqu'elle poursuit tout de suite, circonspecte.

— Tu n'as pas assez de chambres pour m'accueillir, dit-elle à Zac. Et je ne veux prendre aucun lit à l'un de vous, ni dormir dans l'infirmerie. Le roi m'a proposé de loger au château. J'ai accepté. Je n'ai plus les moyens de me payer un hôtel, et en plus, les servants sont à ma disposition.

J'échange un coup d'oeil éloquent avec Zac, avant de me tourner de nouveau vers Teresa. Alors que je m'apprête à donner un avis cinglant, elle m'en empêche.

— Tout va bien, Heaven. Je verrai rarement le roi. Et puis, c'est temporaire.

— Oui, enfin, tu as décidé d'élire domicile à l'endroit où tu as vécu le pire traumatisme de ta vie, réponds-je d'un ton piquant.

Elle réagit à l'amertume dans ma voix en haussant les sourcils.

— Tu n'as pas à me protéger, finit-elle par déclarer, elle-même irritée. Je suis la mère ici, pas toi.

— Mais...

Elle me coupe en secouant la tête, puis traverse notre groupe d'un geste bref. Intérieurement, je bouillonne, mais je m'efforce de le cacher.

— Tu as un discours à prononcer bientôt, non ? dit-elle pour changer de sujet.

— Oui, réponds-je avec le plus d'amabilité possible. Dans deux heures. Comment tu sais ?

— Le roi m'en a parlé hier. Il t'a précisé que c'était au château ?

— Non, mais je l'ai supposé.

Une pointe d'agacement pince mon cœur. J'ai beau être soulagée de la savoir alliée au roi, l'entendre en parler comme si c'était la chose la plus naturelle du monde m'irrite plus que je ne l'aurais pensé.

— Je n'ai rien préparé, avoué-je. Je n'arrive même pas à savoir comment commencer, ni-même ce que je pourrais leur dire pour qu'ils ne me prennent pas pour une folle à lier.

Elle rit doucement, s'adossant à un mur du couloir.

— De toute façon, le roi te fait confiance. Tu leur as sauvé la vie. Le reste, ils devront faire avec. Le fait que tu t'exprimes est surtout une formalité.

— Il faut quand même qu'ils croient en moi, marmonné-je.

— Bon, allez, y'en a marre ! retentit soudain la voix de Joyce.

Différente - T2Où les histoires vivent. Découvrez maintenant