Chapitre 1: Eveille-toi.

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PDV Mia:

Seulement 1 jour après l'accident...

Il faisait noir. Un noir d'encre, profond, sans issue. Je me sentais... étrangement bien. Comme dans un cocon de douceur. J'ouvrais les yeux, la vue encore trouble. Devant moi semblaient danser des flammes. Je tentais de me frotter les yeux mais mon bras semblait ankylosé. Je me souvenais à peine de qui j'étais...

Ah si. Mia, 19ans, orpheline depuis aussi loin que je m'en souvienne. Ça, c'est acquis. Mais pourquoi étais-je allongée devant ce feu aux flammes chatoyantes, envoûtantes ? Les souvenirs me revenaient par bribes.

La lettre de mes parents, le manoir, les squatteurs, la fuite, la rencontre fatale, la chute, la douleur, le sang, le jardin, les fleurs, l'espèce d'homme costumé qui me parlait, ma vue trouble et puis... Et puis, quoi ?

J'avais occulté la suite des évènements. Je n'étais sûre que d'une chose : je devais partir au plus vite pour... pour trouver quelqu'un, n'importe quel humain qui puisse me tirer de ce manoir de fous et m'emmener au commissariat le plus proche. Tant pis pour l'héritage.

Je me redressais donc, et constatais que j'étais allongée sur le tapis, à même le sol, ce qui expliquait mes courbatures. A peine je fus assise qu'un violent tournis me submergea. Ajouté à cela, la sensation qu'un liquide coulait, du haut de mon front vers mes narines, m'asphyxiant davantage. Attends... Ce n'est pas qu'une sensation ! Il y a réellement un liquide qui m'empêche de respirer !

Je hurlais et attrapait sur mon front... une serviette mouillée d'eau glacée. Quel genre de tordu réservait un réveil aussi étrange à sa victime ? Je jetais la serviette dans un coin de la pièce et me tentais de me lever, m'aidant d'un canapé qui trainait là. A peine je réussis à m'asseoir dessus que je m'affalais dedans, épuisée et en nage. Je réitérais l'opération jusqu'à tenir à peu près debout, en appui sur le canapé. Allez maintenant sortir de cette pièce en marchant. Tu sais faire ça, marcher, hein Mia. En réalité, je me sentais comme la Petite Sirène lorsqu'elle venait de récupérer ses jambes, tant je devais fournir d'efforts ne serait-ce que pour traverser la pièce.

Je marquais un arrêt dans ce qui aurait dû être l'embrasure de la porte (mais il n'y avait pas de porte), épuisée. Des gouttes de sang s'écrasaient sur mes pieds. Je portais machinalement une main à mon nez et constatais la présence de sang sur mes doigts bien plus pâles qu'à l'accoutumée. J'en étais là dans mes réflexions, quand je fus interrompue par l'arrivée d'une affreuse migraine. Je titubais, me pris les pieds dans le tapis et me rattrapais en catastrophe à une nappe.

Bon ce n'est pas passé loin mais on a évité la catastrophe.
Ce fût à ce moment-là que je remarquais qu'un énorme vase roulait lentement sur la longueur de la table... avant de s'écraser sur le sol dans un vacarme infernal.
Oh, zut. On repassera pour la discrétion, je n'ai plus qu'à filer droit vers la sortie.

Je traversais tant bien que mal cette foutue salle à manger. Je remarquais tout de même, à travers les fenêtres, que le soleil semblait à son zénith et que je n'avais jusque-là croisé aucun des squatteurs. À chacun de mes pas, mes migraines s'intensifiaient et mes saignements de nez avaient repris de plus belle ; je m'étouffais dans l'odeur métallique.

J'arrivais enfin dans le hall et m'écroulais, en nage et en sang sur le carrelage. J'espère qu'ils ont une sacrée gueule de bois, ça pourrait être leur genre... ou mieux, j'espère qu'ils ne sont pas là parce qu'on dirait qu'un morse rampe dans toute la maison.
Je rampais (avec toute la grâce dont j'étais capable) jusqu'à la porte d'entrée et me hissait à l'aide des battants jusqu'à la poignée.
Encore un effort et je pourrais être...

???- Ooh, putain mais c'est pas possible d'être aussi chiante !

Derrière moi s'était élevé une voix. Je rassemblais toutes mes forces dans l'espoir d'ouvrir cette maudite porte mais en vain : elle était vraisemblablement fermée à double tour. Ou peut-être manquais-je de forces à ce point ?
Je n'eus pas le loisir de m'attarder sur la question car je me sentie soudain soulevée du sol. Je sentais un torse contre moi et une main qui me soutenait les omoplates tandis que l'autre était posée sous mes cuisses, un peu trop proche de mes fesses. Mes yeux voyaient troubles mais je distinguais le garçon pâle aux cheveux blancs et à la veste bleue.

M- Aaééémoi... (lâchez moi !)
E- Tu fermes ta bouche je ne suis pas d'humeur, là.
M-Ouaaaaaéaaaah... (Je ne vous permets pas !)
E- T'es shootée, et je ne tenais pas à voir ça un jour.

Parler semblait définitivement au-dessus de mes forces et pourtant ce n'étaient pas les façons fleuries qui me manquaient pour révéler le fond de ma pensée à cet homme.
Je me rendis bien vite compte qu'impuissante comme je l'étais, je n'avais d'autre choix que de laisser faire le bonhomme de neige ambulant. Il me ramena sur le canapé du salon malgré mes protestations télépathiques.

E- Bordel, t'es brûlante. Raah, mais pourquoi il faut que je tombe sur une précoce têtue !

M- Eh, hoo...

E- Tu sais que j'viens de me lever juste pour m'occuper de toi, gamine ? Donc tu te laisses faire et fais pas d'histoires ou j'te laisse crever la gueule ouverte.

Je ne t'ai rien demandé...
J'étouffais sous la chaleur du feu plus la couverture qu'il venait de poser sur moi. N'y tenant plus, je l'enlevais d'un geste vif.

E- Non, ça tu gardes, me dit-il en la replaçant. T'es brûlante et je préfère que tu ne le sois que quand je t'allongerais dans mon lit.

Je ne pus retenir un rire nerveux. Non seulement cet homme est épuisant mais en plus il est bipolaire.

E- Bon, maintenant tu dors et je reste un peu pour te surveiller. Tu te lèves que si je suis là. De toute façon, toutes les portes sont fermées et on a aucun moyen de communiquer avec l'extérieur. Et j'ai ton téléphone.

Hein ?! Ils m'ont confisqué des affaires personnelles, en plus ? Génial, non, vraiment merveilleux. Tout ça par des squatteurs dans ma propre maison. Je fixais le dos de mon geôlier et l'assassinait du regard du mieux que je le pouvais. Je transpirais et je me rendis compte qu'il n'avait rien fait pour le sang qui coulait. Je levais donc péniblement une main... qu'il saisit pour la remettre sous la couverture.

E- Tu permets que je prépare un mouchoir ou même ça tu n'en es pas capable ?
Il essuya ensuite le sang et m'enfonça un autre mouchoir dans une narine.

E- Voilà, reste un peu la tête en arrière et endors-toi, ça me facilitera la vie.

Il ajusta les cousins de manière que ma tête fût légèrement plus basse que mon corps, sans que ça ne fût trop désagréable. Il se pencha ensuite à mon oreille et me murmura :

E- À plus tard, petite souris.

Puis, il s'assit dans un fauteuil voisin et se mît à me fixer. Ces yeux, jusque-là d'un bleu presque limpide, semblaient devenus rouges avec la lumière ambiante. Démon, va. Je fermais les yeux, juste pour quelques minutes.

PDV Ethan :

Elle me saoule déjà. J'suis déjà pas du matin alors si en plus il faut la surveiller quand je dors... Et puis quelle idée de se réveiller alors que son corps est encore mort. J'aurais dû l'enfermer dans la cave, comme prévu. Ça l'aurait mis dans l'ambiance et elle aurait pu constater que les gousses d'ail et autres croix bénites ne marcheront pas sur moi. Il en faudrait bien plus pour me libérer de mal qui nous habite. Mais Vladimir n'avait étonnamment pas approuvé l'idée. Et maintenant, elle dormait, comme si de rien n'était.

Je m'approchais d'elle, touchais ses cheveux et humais sa peau. Il sent vraiment bon. Son sang était un délice à humer et l'aperçu que j'en avait eu avant-hier n'avait fait que confirmer qu'elle ferait un garde-manger satisfaisant. On privilégiera la qualité à la quantité, petite souris chétive. Je me rasseyais. C'était une torture de rester là sans rien faire, mais la tuer n'arrangerais pas arranger mes affaires. Bienvenue en enfer, poupée.

Tu m'appartiens.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant