Chapitre IV

879 59 28
                                    

Je me retourne une seconde fois, la main sur le cœur. Puis je rejoins Line à grandes enjambées tremblantes. Nous rigolons nerveusement lorsque nous apercevons la fenêtre du couloir claquer une seconde fois sur elle-même à cause du vent. Plus de peur que de mal cette fois-ci. Pourtant, cela pourrait être l'inverse si je ne me dépêche pas. Je parcours les quelques mètres me séparant de la cause de notre peur en regardant autour de moi, puis je ferme la fenêtre et retourne dans le bureau de mon père après avoir échangé un regard entendu avec ma meilleure amie. Cette fois-ci, c'est la bonne.

Le bureau de mon père est plutôt grand et presque entièrement fait de bois, du sol au plafond. Un vieux canapé d'une couleur verte horrible traine au fond de la pièce, une immense bibliothèque recouvre le mur de droite et bien sûr, le bureau en chêne de mon père trône en plein centre de la pièce. Une belle métaphore de ce qu'il pense être : le centre du monde. J'inspire un grand coup car j'ai l'impression de manquer d'air et ne perds pas plus de temps dans la contemplation de la pièce interdite. Je m'approche du bureau en jetant un coup d'œil aux piles de documents qui le jonchent. Tout est extrêmement bien ranger et j'ai peur que si je décale une malheureuse feuille d'un millimètre, il le remarque. Ou pire, qu'une alarme se déclenche. Dans les deux cas, cela est clairement possible. Tout est possible.

Je fais le tour du meuble et me baisse pour atteindre les tiroirs fermés par un code. Mon père est plus intelligent que je ne le pensais. Tant mieux, je préfère me battre contre quelqu'un du même calibre que moi. La victoire ne sera que plus belle. J'essaie de faire carburer mon cerveau pour tenter de trouver le code que mon père pourrait utiliser. Lorsqu'une idée me vient, je tape en vitesse les chiffres et le tiroir s'ouvre. Je retire ce que j'ai dit, mon père n'est pas si intelligent que ça finalement. Utiliser la date de mon mariage est quand même une grande preuve de maladresse. D'ailleurs, je commence à me demander pourquoi ce mariage lui tient tant à cœur. Je trouve cela très étrange.

J'ouvre doucement le tiroir et tombe sur une multitude de dossiers classés par ordre alphabétique. Rafael est une énigme pour moi et bien sûr, je ne connais pas son nom de famille. La tâche serait trop longue si je devais éplucher tous les dossiers un par un. Pourtant, je refuse de sortir d'ici les mains libres. Alors c'est ce que je fais. D'une main de plus en plus tremblante, je regarde chaque nom du plus vite que je peux. Lorsque je finis par chance par percevoir les premières lettres du prénom du garde du corps sur un dossier, je le tire doucement en m'asseyant par terre. Rafael Genevy. Je l'ouvre rapidement et une simple feuille me tombe sur les genoux.

- Hé ! Salut Rafael !

Je me fige en entendant la voix de Line qui a presque crié ces mots pour que je puisse entendre. D'un mouvement brusque et désordonné, j'attrape la feuille, ferme le dossier, le replace à sa place dans le tiroir puis ferme ce dernier doucement. Mes mains sont si moites qu'elles commencent à onduler la feuille que je tiens dans mes mains tremblantes.

- Qu'est-ce que tu fais là ?

La voix de Rafael me ferait presque hérisser les poils. Je rampe sous le bureau et tente de calmer ma respiration. Ensuite, je plie la feuille en quatre puis la glisse dans mon soutien-gorge.

- Je me promenais.

- Tu te promenais ?

- C'est fou comme cette maison est belle, tu ne trouves pas ?

Rafael ne répond pas et j'entends des pas entrer dans le bureau. Je ferme les yeux en priant pour que tout se passe bien. Si Rafael me trouve ici, qu'importe ce qu'il s'est passé hier dans ma chambre, il ira tout raconter à mon père et je ne sais même pas si je serais encore vivante demain. Ses pas s'approchent puis se stoppent et je retiens ma respiration en déglutissant difficilement. J'ai l'impression d'étouffer et je ne sais si je pourrais rester cacher ici quelques minutes de plus.

VIRGIEOù les histoires vivent. Découvrez maintenant