Chapitre XVII

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Mon cœur est au taquet. À peine ai-je posé un œil sur la silhouette qui hante mon esprit qu'il repart dans un galop effréné et irrégulier, ne demandant qu'à sortir de ma poitrine pour rejoindre la cause de son affolement. Depuis ce baiser inattendu, je ne contrôle plus rien. Et ce n'est pas bon. Je peine à reprendre le dessus sur mon propre corps. J'inspire un grand coup en me dirigeant vers la chambre de Rafael, sentant le regard de ce dernier me perforer le dos. Pour cacher mon trouble, je vais jouer une nouvelle carte. La carte de la mi-indifférence, mi-provocation. C'est une carte très compliquée à jouer, je l'avoue.

Il faut à tout prix que je prenne le pouvoir. Je ne peux pas me sentir si dépendante d'un homme. Mon esprit ne peut pas l'ajouter à mes côtés lorsque je pense à l'avenir. Et surtout, je ne peux pas faire passer un homme avant ma propre personne. Toute ma vie, j'ai tant œuvré pour recouvrer ma liberté que je ne peux pas la perdre pour un petit béguin. Si seulement ce n'était qu'un simple béguin...

Le beau garde du corps arrive enfin dans la chambre en me souriant doucement. J'aimerais tant pouvoir lire dans ses pensées. Savoir ce qu'il a pensé de notre baiser, ce qu'il a ressenti ce matin en se réveillant. Mais c'est contraire à ma nouvelle résolution. C'est peut-être égoïste, mais je ne dois penser qu'à moi-même. Une fois que je serais libre de mes choix et de mes actes, je pourrais me consacrer aux autres. Mais seulement une fois que cet objectif-ci sera atteint. Nous n'avons qu'une vie. J'aimerais pouvoir en profiter comme j'estime en avoir le droit. J'aimerais voyager, découvrir de nouveaux paysages, de nouvelles cultures et coutumes. Et si je dois le faire seule, je le ferais sans hésitation. Je n'ai pas peur.

- Mission peinture enclenchée.

Je lui jette un coup d'œil avant d'attraper un des deux pots qu'il tient encore dans ses mains. Le sourire aux lèvres, je lui réponds en lui chuchotant à l'oreille.

- Voilà ce que nous allons faire. Le mur, on le partage en deux. Le premier qui termine de peindre entièrement sa partie a gagné.

- Je relève le défi. Qu'est-ce qu'on gagne ?

J'hoche les épaules nonchalamment avant d'ouvrir le pot de peinture et de plonger le pinceau dans cette texture crémeuse. Ensuite, j'installe une bâche sur le sol en scotchant les coins et les plinthes.

- Je gagne, on couche ensemble. Tu gagnes, on couche ensemble.

Rafael fronce les sourcils à l'entente de ma réponse avant de sourire malicieusement, tout en répétant les gestes que je viens d'effectuer.

- Je ne trouve pas ça très équitable.

Je ne peux empêcher un petit sourire de venir s'installer sur mes lèvres, avant de l'effacer aussitôt. Nouvelle résolution Flo, penses à ta nouvelle résolution...

- Qu'est-ce que tu proposes dans ce cas-là ?

- Si je gagne, tu te pointes au mariage habillée en sac poubelle.

Le pinceau suspendu à quelques centimètres du mur, je dois pincer fortement les lèvres pour ne pas exploser de rire. Je dois avouer qu'il est doué, carrément doué. Il sait exactement comment me faire rire et me faire craquer. Cela devient désolant et quasi insultant. Mais le problème le plus contraignant, c'est que j'aime ça. J'aime être avec lui, tout simplement.

- Ok.

- Ok ?

- Ok.

Me pointer à mon propre mariage habillée d'un sac poubelle en guise de robe ne m'enchante vraiment pas. Quoique, si cela peut faire enrager d'autant plus mon père, je prends. Toutefois, je préfère encore le faire enrager d'une toute autre manière. Et c'est pour cette raison que je compte bien gagner ce petit défi.

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