Chapitre XVIII

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- Les gars, venez voir !

La tête à l'envers, je sèche mes cheveux à l'aide d'une serviette de toilette. Cette douche chaude m'a fait un bien fou. Je n'ai plus aucune trace de peinture orange sur le corps, tout a disparu. Toutefois, ce qui n'est pas parti avec l'eau, c'est la culpabilité que je ressens actuellement. Contre toute attente, je pensais que Rafael avait deviné ce que j'avais en tête. Alors certes, je ne lui ai pas clairement énoncé les causes de cette envie viscérale qui m'animait d'une si grande force de persuasion, presque féroce. Toutefois, plus d'une fois il m'a donné l'illusion d'avoir compris mes intentions. Et plus d'une fois il m'a rejeté, pour ces mêmes raisons que je pensais acquises de son côté. Elles ne l'étaient pas, vraisemblablement.

Un léger coup sur la porte me fait relever la tête. J'attache alors la serviette autour de mes cheveux tout en vérifiant le noeud de celle accrochée autour de mon corps. Jeanne me fait face lorsque j'ouvre la porte, une petite pile de vêtements dans les mains. Elle me sourit doucement, presque maternellement, puis me tend un bas de jogging accompagné d'un basique tee-shirt blanc. Simple mais efficace.

- Tiens, enfile ça et viens nous rejoindre dans le salon. Nico veut nous montrer quelque chose.

- Ok mais... et Raf ?

- Il a pris sa douche dans ma salle de bain, ne t'en fais pas pour lui.

Les doigts accrochés à ma serviette comme si je m'accrochais à la dernière branche d'un arbre, je sens mes yeux s'embuer lentement. Pleurer ne me ressemble pas. Ce verbe ne fait même pas parti de mon vocabulaire, je l'en ai banni il y a plusieurs années déjà. Il faut croire que je deviens une tout autre femme au contact du beau garde du corps. Et cela m'embête, sans que je ne puisse rien y faire. Nous sommes aimantés d'une telle force que j'ai l'impression de ne plus pouvoir envisager ma vie sans lui, que ce soit au premier plan comme au dernier.

- Oh non ma belle, ne pleure pas.

La meilleure amie de Rafael vient me serrer dans ses bras en frottant mon dos de réconfort. Je me retiens comme je peux mais je n'arrive pas à étouffer les sanglots qui ne demandent qu'à s'échapper. Je me sens faible. Il y a quelques semaines, jamais je n'aurais imaginé pleurer pour un garçon. À l'inverse, j'aurais ri de bon cœur à cette idée. Cela me paraît si impensable que je me demande même si je ne suis pas en train de rêver. Cependant, j'ai beau fermer les yeux et les rouvrir quelques secondes plus tard, tout ceci est bien réel.

- Je ne sais pas ce qu'il s'est passé entre vous mais laisse-lui du temps. Il reviendra vers toi.

- Je ne pense pas.

- Je suis persuadée que si. Je connais Raf mieux que personne, crois-moi.

J'ai tellement envie de la croire. Ce qui me force à douter de ses paroles, c'est le fait qu'elle n'ait aucune connaissance du sujet de notre dispute. Je suis même persuadée qu'elle me détestera dès l'instant où elle apprendra la raison pour laquelle je me retrouve dans cet état. Ce sera compréhensible, moi-même je me déteste actuellement. Je n'ai qu'une envie, partir loin d'ici. La seule et unique chose qui me retient de prendre mes bagages et de fuir, c'est l'enquête concernant mon paternel. J'ai besoin de connaître la vérité pour me sentir plus légère et pour pouvoir enfin enfermer mes souvenirs et mon passé dans un coffre-fort. La clé finira dans l'océan, je ne veux plus jamais avoir à faire à eux. Une page vierge, voilà ce qu'il me faut véritablement.

- Aller, sèche tes larmes et viens nous rejoindre. Je veux revoir ton sourire illuminer les yeux de Raf, c'est un phénomène assez rare.

Elle m'envoie un clin d'œil tandis que je lui souris tristement. Cela ressemble plus à une grimace mais elle ne semble pas s'en formaliser. Tant mieux, j'ai comme l'impression que les commissures de mes lèvres ne peuvent plus se soulever sans trembler. Ce qui est carrément pitoyable, il faut se le dire. Une fois Jeanne partie, je tourne la tête et fixe mon visage à travers le miroir. Un visage que je n'ai jamais vraiment pris le temps d'apprivoiser comme il se doit. Aussi, un soupir tremblotant m'échappe. Légèrement rouges, mes yeux attestent de ma récente faiblesse. Mon regard descend ensuite sur ma bouche qui reste immanquablement pincée. Et puis je finis par détacher ma serviette qui était enroulée autour de mon corps, elle tombe à mes pieds.

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