Chapitre 18

2.2K 176 1
                                    

Greg

Je me rappelle de la petite gamine qui se faisait chahuter par les garçons du quartier. J'avais 15 ans, j'étais en 3ème et elle, elle était encore au primaire. Je m'étais interposé en les menaçant de leur exploser la tête s'ils continuaient à s'en prendre à plus faible qu'eux, une fillette de surcroît !
   Elle me regardait avec gratitude, des larmes dans les yeux, et je me sentais comme superman ayant sauvé le monde.
J'avais toujours rêvé d'avoir une petite sœur à protéger, et là je venais de la trouver. Si petite, si fragile et si gentille. Je lui avais dit que si elle avait des problèmes, il fallait qu'elle m'en parle et que je la protégerai. Ce que j'ai fait jusqu'à ce que je parte en internat trois ans plus tard. Après mes études j'ai trouvé un job et on s'est complètement perdus de vue. J'ai appris la mort de ses parents par les miens, qui étaient toujours voisins à ce moment là, et quand j'ai voulu la voir elle avait déménagé je ne sais où. J'ai regretté de n'avoir pas pris de ses nouvelles avant ce drame.
On s'est croisés par hasard au N8 il y a deux ans. Elle avait beaucoup changé, une vraie femme. Je ne l'avais pas reconnue, c'est elle qui était venue me voir. On a passé la soirée à se raconter nos vies et on s'est promis de ne plus jamais se perdre de vue.
C'est ce même soir où j'ai rencontré la femme que je croyais être celle de ma vie. Une de ses amies. Rien que d'y penser j'ai des hauts-le-cœur. Ça m'a fait si mal quand au bout de plus d'un an de relation je me suis rendu compte que j'étais cocu. Je voulais l'épouser , lui faire des enfants, lui offrir la terre entière, et elle... pff... Allé c'est du passé ! Reprends-toi Greg. N'empêche que j'étais au bout du rouleau, j'avais envie de crever, non, je voulais crever ! Et je ne sais par quel miracle, j'ai appelé celle que j'avais sauvée des vilains garçons, la personne la plus douce que je connaissais... Lucie. Je voulais juste entendre encore une fois sa voix, parler une dernière fois à ma « petite sœur ». J'avais bu, beaucoup, elle s'en était rendue compte immédiatement et avait compris que quelque chose n'allait pas car un quart d'heure plus tard elle frappait comme une forcenée à ma porte.
Heureusement que mon ange gardien m'a fait composer son numéro ce soir là. Elle est restée toute la nuit, et le lendemain aussi, puis le surlendemain jusqu'à ce qu'elle soit sûre que je ne ferai plus de conneries. Elle m'a bien remonté le moral. Pourtant sa vie n'a vraiment pas été facile non plus. Orpheline à 18 ans puis une vie de merde avec un gros connard qui a eu la chance que je ne traînais plus dans les parages, sinon je pense qu'il serait six pieds sous terre.

Elle m'a sauvé la vie et là je viens de pourrir la sienne ! J'espère que cette tête de nœud de Tristan n'a pas trop déconné avec elle. Elle n'a rien voulu me dire au téléphone mais ça n'avait vraiment pas l'air d'aller.
J'ai essayé plusieurs fois de la rappeler mais je tombe systématiquement sur le répondeur. Putain si jamais c'est elle qui avait fait une connerie et que j'arrivais trop tard...

Il est 14h00. J'ai quand même attendu, pour laisser une chance à Tristan de se rattraper avant d'aller lui péter la gueule. Je sonne, pas de réponse, je frappe, rien, silence. Je commence à paniquer !

- Lucie ! Hurlé-je. Ouvre, c'est moi, Greg ! Et je frappe à la porte à m'en faire mal. Lucie !!!
J'entends du bruit de l'autre côté, puis le verrou et enfin la porte s'ouvre. Oh bordel, elle est horrible, mais elle est vivante ! Ouf. Elle a des yeux de lapins albinos avec des traînées de panda dessous.
- Wow! C'est plus grave que je ne le pensais, lui dis-je. Tu me laisses entrer ?

Je ne lui laisse pas le temps de répondre que je rentre et vais m'asseoir sur le canapé. Je tape sur l'assise à côté de moi pour qu'elle me rejoigne. Elle s'installe en reniflant. Tout le salon ressemble à un champ de bataille, comme si une bombe remplie de mouchoirs avait explosé là. Je ne sais pas comment aborder le sujet. Je décide de faire dans l'humour.
- Je croyais qu'Halloween était passé...

Elle me regarde en haussant les sourcils l'air interrogateur.
- Laisse-moi deviner, chaussettes de ski, peignoir en peluche, nez rouge et yeux de panda, la détaillé-je, euh... l'abominable femme des neiges ayant chopé la grippe ?
- T'es con ! Sourit-elle doucement en me donnant une petite tape sur l'épaule.

Puis elle se met à pleurer. Je lui passe un bras autour des épaules et elle craque complètement, se serrant contre moi avec de violents sanglots.
- Allé, allé, calme-toi, essayé-je de l'apaiser en lui caressant le dos. Raconte-moi ce qui s'est passé.

Elle se mouche en faisant un bruit de trompette, s'essuie les yeux du revers de sa manche et elle prend une grande inspiration.
- J'ai pas envie d'en parler, hoquète-t-elle.
- C'est à cause de Tristan, c'est ça ?
Elle hoche la tête.
- Ok... Pourquoi tu répondais pas au téléphone, je me suis inquiété ! La grondé-je.
- Désolée...je l'ai mis en mode silencieux. Je n'avais pas vu que tu m'avais appelée.
- Ok... donc tu n'as pas eu Tristan non plus ?
Elle relève la tête l'air interrogatif.
- Il... il m'a appelée ? Demande-t-elle d'une toute petite voix.
- Je ne sais pas, mais je lui ai donné ton numéro et il devait le faire. Il est où ton portable ?
- Dans ma chambre, sur le chevet.

Je pars le chercher et j'espère que je vais voir un appel en absence de l'autre abruti, sinon pote ou pas pote, je vais lui faire péter une mandale dans les dents.

Je regarde l'écran et il y a 9 appels en absence. Je sais que 6 sont de moi, je croise les doigts en espérant que parmi les trois restants il y en ait au moins un de lui. Je déverrouille l'écran et je suis soulagé quand je vois que c'est carrément les trois qui proviennent de son numéro et qu'en plus il y a un message répondeur.
J'hésite à le donner à Lucie, car je ne sais pas ce qu'il a bien pu lui dire dedans.
- Tu trouves ? Me crie-t-elle du salon.
- Oui, j'arrive.

Je reviens vers elle et le lui tend.
Quand elle regarde l'écran, je crois voir la naissance d'un sourire.

- Tu m'as appelée 6 fois ? Pardon Greg, je ne voulais vraiment pas que tu t'inquiètes comme ça, je suis désolée.
- C'est bon, on n'en parle plus. Alors ?
- Oui... il m'a appelée... trois fois... et y a un message.
- Tu veux que je te laisse seule pour l'écouter ? Demandé-je sincère.
- Non reste ! Si jamais... son visage recommence à fondre.
- Je sais pas ce qu 'il s'est passé entre vous, mais si tu veux savoir ce qu'il a à te dire y a qu'une solution ! Appuie !

Je la vois trembler en appuyant sur l'écran et porter l'appareil à son oreille.

Acid Love ( Terminé)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant